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Les Chroniques

Traduire Hitler, Olivier Mannoni (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mercredi, 16 Novembre 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Traduire Hitler, Olivier Mannoni, éd. Héloïse d’Ormesson, octobre 2022, 128 pages, 15 €


« J’allais replonger dans le texte d’Hitler, ce marécage dont la boue n’avait pas fini de coller à mes bottes de traducteur ».

« Historiciser le mal, Une édition critique de Mein Kampf, 2021, 700 pages, 2 livres, 27 chapitres, pour le livre d’Hitler, entouré d’un appareil critique d’une rare ampleur ». Qui ne s’en souvient ? Le projet, les historiens, l’opinion ; les différents points de vue ; le faire, ne pas le faire. La longue – et argumentée – polémique faisant la « une » pendant plusieurs mois, agitant le fond de notre conscience à tous, historico-morale ; pas si souvent qu’on a l’occasion d’un débat de ce type. Celui qui parle ici, c’est le traducteur, et quand on sait l’importance de la traduction, cette « autre » voix d’une œuvre, on ne peut qu’être très attentif à son récit – son rapport, pourrait-on dire.

Sur Âmes d’automne de Jean Lorrain (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mardi, 15 Novembre 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

 

La situation de Jean Lorrain, dans notre paysage littéraire, est singulière : ni franchement visible, ni vraiment invisible. On l’évoque ici et là quand on s’intéresse à ceux qu’il croisa, dont il se moqua, avec qui il se brouilla, qui le détestèrent. On cite des anecdotes où il eut rarement le beau rôle. On s’attarde sur des faits biographiques, toujours les mêmes, comme son célèbre duel avec Proust en février 1897 après la publication des Plaisirs et les Jours et ses insinuations venimeuses (selon Proust) sous le pseudonyme sans mystère de Raitif de La Bretonne, dans un article du Journal. On le révoque parfois pour sa misogynie supposée, son antisémitisme imbécile, son aristocratisme de pacotille. On ne le lit guère. Et c’est dommage : le recueil de nouvelles Âmes d’automne (1898), réédité en 2015 par Le Chat Rouge, nous rappelle qu’il fut à sa façon, sinon un écrivain majeur (l’œuvre est trop disparate et inégale pour cela), du moins un écrivain mineur de première importance – si tant est que ces nuances fassent sens.

Filaments, Elisa Biagini (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 14 Novembre 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Filaments, Elisa Biagini, éditions Le Taillis Pré, juillet 2022, trad. italien, Roland Ladrière, 160 pages, 18 €

 

Contenir

Grâce à cette traduction depuis l’italien, Roland Ladrière nous fait découvrir la poésie d’Élisa Biagini. Cela est important que l’écoute de la poésie se diffuse et s’agrandisse à un lectorat international, dessinant le profil d’une poétesse dont l’expression est tenue.

 

rassembler partout

dans la sphère mais au centre

le silence tout seul

Hannah Arendt, lectrice de Proust (par Pierre Lurçat)

Ecrit par Pierre Lurçat , le Mercredi, 09 Novembre 2022. , dans Les Chroniques, La Une CED

« Il y a des facteurs sociaux qui sont cachés sous la surface des événements, qui échappent à l’attention de l’historien et que rapportent seuls les poètes et les romanciers, grâce à la force supérieure de leur passion et de leur pénétration » (H. Arendt, Les origines du totalitarisme).

 

Parmi les nombreux lecteurs de Proust, sur la scène intellectuelle du vingtième siècle, Hannah Arendt occupe une place singulière, à la fois par l’acuité de sa lecture et par l’importance qu’elle donne à l’œuvre de Proust. Celle-ci, comme nous le verrons, est en effet centrale dans son analyse politique de l’antisémitisme et de l’évolution de la condition juive en Occident, aspect important de son grand livre, Les origines du totalitarisme. Ce dernier est paru en anglais en 1951, mais la lecture de Proust par Arendt remonte à la période de la guerre, cruciale pour l’évolution de ses idées. Dans sa préface à l’édition de 2002 des Origines du totalitarisme, Pierre Bouretz s’interroge sur le lien entre politique et littérature chez Arendt. « D’où vient qu’Hannah Arendt ait si souvent cherché chez les écrivains et les poètes une manière d’approcher le monde, de saisir l’histoire et de juger les hommes ? » (1). La réponse à cette question nous est donnée par Arendt elle-même, dans un passage révélateur de son livre.

Le Livre de la contemplation intérieure, et autres textes taoïstes, Anonyme chinois (par Didier Ayres)

, le Lundi, 07 Novembre 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Asie, Poésie, Rivages poche

 

Tao

Le livre de la contemplation intérieure, traduit par Catherine Despeux, ouvre une fenêtre sur la philosophie de Lao-Tseu. De cette fenêtre on aperçoit les thèmes récurrents du Tao-te-King. Au reste, cette plongée dans le cœur du monde oriental, dans le chef-d’œuvre de la littérature chinoise, offre une vue sur l’aspect religieux du texte de Lao-Tseu. Il retrace ainsi une sorte de mythologie avec sa cosmogonie et peut-être aussi une eschatologie. Tout cela conduit vers le concept premier du taoïsme, c’est-à-dire, la Voie. Ces textes anonymes nous y invitent. Ils soulignent surtout l’alliance, délicate à comprendre pour un Occidental, de la philosophie et de la religion. Et même si les conseils d’ascèse de la Bible sont nos références ici, l’on voit nettement comment la poursuite de la Voie rejoint la notion de régénération chrétienne. Je dirai plus en faisant de l’exercice spirituel taoïste une forme de mystique – mystique hindoue, musulmane, juive, chinoise, chrétienne, donc universelle.