L’Occitanie telle que cet auteur l’aime hors de lui, et la respecte en lui, est un Midi complexe (même géographiquement, de Toulouse à Nîmes, de Figeac à Foix), rude (sans pétanques ni plages) et caché (caché, justement, dans les pudiques âmes du Midi), mais certain. En croyant quitter son pays natal, on emporte bien plutôt avec soi le « fatras des origines » dont on pensait se débarrasser. En y revenant, ce qui nous en a (ou aurait) fait partir nous pardonne. Comme une odeur (ou une voix) oubliée traverse d’un coup toute une vie pour nous atteindre neuve, le passé fondateur d’un écrivain sort de son livre nous rejoindre. Nous sommes alors de son ici.
Alain Monnier (né à Narbonne en juillet 1954) est un homme (ouvert, fin, raisonnable et souriant) qui rend ici justice à une enfance heureuse (« Il est facile de grandir dans un milieu bienveillant », p.22), qui rend raison du ridicule de ses premiers émois (« Les amours de jeunesse sont rudes pour les âmes romantiques. Les tourments pour cette Nicole S. dont je n’avais même pas effleuré un sein furent quelque peu démesurés », p.74), qui rend hommage au courage vivant (sans protection ni ressources) – celui d’un Jankélévitch traqué et banni pendant la guerre –, opposé au courage confortable, purement médiatique et complaisant d’un Sartre en 70 :