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Les Livres

J’ai un rendez-vous avec la Mort… Alan Seeger (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 16 Décembre 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Correspondance, Les Belles Lettres

J’ai un rendez-vous avec la Mort… Alan Seeger, Lettres et poèmes écrits durant la guerre, réunis par son père et traduits par Odette Raimondi-Matheron, Paris, Les Belles-Lettres, 2025, 302 pages, 23, 50 € Edition: Les Belles Lettres

Existe-t-il un équivalent français d’Alan Seeger, né en 1888 à New York, mort en 1916 sur un de ces fronts absurdes de la Première Guerre mondiale ? Ce n’est pas qu’il n’y ait pas eu de poètes français morts dans ce massacre inutile – la liste en est au contraire fort longue, dont bien des jeunes poètes qui n’eurent que le temps de donner, qui une plaquette, qui un recueil – poètes prometteurs sans le moindre doute, mais fauchés en pleine floraison (on pense par exemple à Jean de La Ville de Mirmont). Le cas d’Alan Seeger est différent : il eut, comme Rupert Brooke, la chance ambiguë de composer au moins un poème devenu très tôt célèbre, qui figure dans la plupart des anthologies de poésie anglo-américaine, une sorte de « Dormeur du val » anglais : « I have a Rendezvous with Death ». Ce poème était, paraît-il, le préféré du défunt président Kennedy (ce qui ne prouve rien en faveur ou en défaveur de sa qualité) et une légende, qui vaut ce que valent les légendes, affirme qu’il en aurait eu une copie dans la poche de sa veste, le jour de son assassinat. Quoi que l’on pense du président Kennedy et de ses préférences littéraires, il faut admettre que le poème de Seeger est un grand texte et son auteur un écrivain de premier plan.

My name is Orson Welles / ouvrage collectif sous la direction de Frédéric Bonnaud (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 15 Décembre 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, La Table Ronde

My name is Orson Welles / ouvrage collectif sous la direction de Frédéric Bonnaud / Editions La Table Ronde / 464 pages 320 illustrations / Septembre 2025 / 44,50€ Edition: La Table Ronde

 

Orson Welles ou la figure protéiforme

 

A l’occasion du 40ème anniversaire de la disparition d’Orson Welles, la Cinémathèque française organise une exposition sur le cinéaste, véritable légende du cinéma. Un catalogue d’exposition l’accompagne, un ouvrage collectif très documenté, un « beau livre » comme on dit, riche d’illustrations et de toutes sortes d’informations sur le créateur de Citizen Kane. Ce qui frappe, en premier lieu, lorsqu’on parcourt ce livre, et cette impression va en s’approfondissant, c’est la dimension littéraire d’Orson Welles. Non seulement il apparait dans sa vie comme un véritable personnage romanesque, mais encore la littérature est omniprésente dans ses créations, notamment par ses adaptations radiophoniques et filmiques, de Shakespeare à Franz Kafka en passant Joseph Conrad et H. G Wells.

La Parole, Malcolm de Chazal (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 12 Décembre 2025. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

La Parole, Malcolm de Chazal - texte inédit présenté par Yves Moatty, Arfuyen, 96 pages, septembre 2025, 14€

 

"La Parole est ce par quoi la vie est une, et qui fait de l'homme le fils aîné de la Nature. La Nature est la Parole, dont l'homme s'est échappé. Et l'abîme où il est tombé, est son abstrait" (p.43)

 

Malcolm de Chazal (1902-1981), l'homme de l'île Maurice, avait - c'est bien connu - le génie plutôt présomptueux ("Je considère n'être pas inférieur à Dieu", déclarait-il à Bernard Violet, car "Je vais vous dire. Si Dieu n'existait pas, si l'univers n'existait pas, si vous n'existiez pas : moi, j'existerais. Ce qui m'intéresse, c'est de me créer "), et un brin paranoïaque ("Le fait que j'existe est une ignominie pour l'île Maurice, parce que personne ne peut m'aimer. S'ils m'aimaient, ils se haïraient", ajoute-t-il tranquillement, car "Une oeuvre comme la mienne demande l'obstacle, la solitude, le refus. Et j'ai à Maurice tout ce que je veux..."). Mais génie il y a, et même les rares qu'il ménageait ou flattait dans ses innombrables articles insulaires l'ont senti passer :

André Breton, Julien Gracq – Correspondance 1939-1966 (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 11 Décembre 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard, Correspondance

André Breton, Julien Gracq – Correspondance 1939-1966 – Présentée et éditée par Bernard Vouilloux et annotée en collaboration avec Henri Béhar – Gallimard – 240 p. – 21 euros – 16/10/25.

 

« Vous disposez, me semble-t-il, de grands secrets qui ne sont pas seulement ceux de la poésie et c’est ce qui me fait balancer entre l’envie de vous connaître, l’espoir d’accéder par vous à tout autre palier que celui qui est naturellement le mien et la tentation de respecter cet anonymat duquel, m’a-t-on dit, vous refusiez à peu près de vous départir. »

Lettre d’André Breton à Julien Gracq (Dimanche 13 mai 1939)

« Je pense que l’existence de cette conspiration amicale singulière (mais très souvent pour toujours silencieuse) autour de vous vous est assez connue, par d’autres témoignages, et de plus de valeur, que le mien. Je ne tiens pas particulièrement à l’anonymat – sauf à Quimper que j’habite en ce moment – mais vous voir, surtout après votre lettre, représente pour moi quelque chose de très intimidant. »

Lettre de Julien Gracq à André Breton (Quimper, jeudi 18 mai 1939)

Datura, Leena Krohn (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 11 Décembre 2025. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Pays nordiques, Roman, Zulma

Datura, Leena Krohn, trad. Claire Saint-Germain, 256 p., éd. Zulma, oct.2025, 21,50€ Edition: Zulma

 

Leena Krohn (née en 1947 à Helsinki, écrivaine finlandaise, dont les œuvres sont traduites en de nombreuses langues), campe, dans son dernier livre intitulé Datura, le récit et la voix intérieure d’une narratrice asthmatique, en proie à de fréquentes crises de toux. La clé du roman de Leena Krohn réside dans le fait que la réalité du monde est sans cesse altérée, dans la vie courante et dans l’intimité. C’est ce qui va arriver à l’héroïne (jamais prénommée), quand sa sœur va lui offrir en guise de cadeau d’anniversaire une plante magnifique mais toxique, le datura aux « graines noires, en forme de minuscules reins » ; les hallucinations vont alors commencer ! Devenue secrétaire de rédaction d’un journal à sensations, Le Nouvel Anomaliste (quelque peu conspirationniste), la jeune femme va se familiariser avec l’occulte et le paranormal - sujets traités avec humour. La découverte de ce monde crypté, qui laisse le champ libre aux suppositions les plus inexpliquées et les plus loufoques, tient un peu de la franc-maçonnerie, dans la mesure où les expériences sont posées comme des énigmes à déchiffrer et qui changent le quotidien de la jeune éditorialiste.