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Les Chroniques

Le journal de MCDem (5), par Murielle Compère-Demarcy

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 18 Janvier 2018. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Vendredi 24 novembre

La transformation de l’activité lectorale en expérience auditive, Guillaume Basquin, fondateur des Éditions Tinbad avec Christelle Mercier, en a signalé la mesure déterminante dans l’appréciation d’une écriture. La parole littéraire en général, la parole poétique en particulier, se donnent à entendre via le canal auriculaire et l’on imagine que tout lecteur doué de l’oreille dite absolue possède le sésame pour un plaisir inégalable. Ceci pour Quignard, ceci pour Basquin. Tous deux d’ailleurs aiment à écouter la musique baroque, dans laquelle les termes s’entrechoquent, où chaque note se révèle nécessaire, avenante. Sans doute y trouvent-ils cette tonicité, cette finesse spirituelle qu’une musique par ailleurs perçue comme plus remuante, comme plus dynamisante/grisante, n’apporte peut-être pas autant qu’elle, en réalité.

« Pour bien écrire, il faut avoir l’oreille musicale, savoir écouter et s’écouter chanter, même en silence », écrit Guillaume Basquin. « L’œil écoute » – l’expression claudélienne constitue davantage une évidence qu’une figure de style.

Etre, René Belletto, par Jean-Paul Gavard Perret

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mercredi, 17 Janvier 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

Etre, René Belletto, P.O.L, janvier 2018, 288 pages, 18 €

 

René Belletto poursuit son avancée dans un travail de la neutralité de la fiction dont Le Livre donnait déjà une bonne idée. Il s’agissait déjà d’envoyer le lecteur dans un jeu où le plus de précision et de vérité possible s’ouvrait tout en feignant d’ignorer certains piliers de la narration « classique » – ce qui permet paradoxalement de rendre la fiction plus forte.

Il en va de même avec Etre dont le terme générique remplace dans l’esprit de l’auteur celui de « Héros et narrateur de l’aventure ». D’autant que les aventures elles-mêmes ne se veulent pas « de ces prestigieuses aventures de jadis, ni de ces aventures sans lendemain errant à jamais entre les murs du désespoir ». Le livre caresse en effet une autre ambition : celle d’une fiction où l’auteur aurait voulu régner « au cœur d’une aventure sans aujourd’hui, comme si le grand livre du Destin avait brûlé dans l’incendie de quelque bibliothèque ».

Apprendre à vivre sous l’eau, Mémoires de violon, Ami Flammer, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Mardi, 16 Janvier 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

Apprendre à vivre sous l’eau, Mémoires de violon, Ami Flammer, Christian Bourgois, 2016, 230 pages, 14 €

 

« La musique n’est pas abstraite, elle est signifiante, autant qu’un poème ou qu’une peinture ; il faut savoir la faire parler et oser la faire parler ».

« Cette histoire commence, comme souvent dans les blagues juives, par Dieu qui annonce la fin du monde, consterné par l’une de ses plus importantes créations, qui ne sait pas faire autre chose que se vautrer dans la violence, la haine et la méchanceté ».

Ami Flammer, pp. 228 et 231

 

Vivre est le chemin

Qu’importe que la publication remonte à une année. Il n’est pas de date de péremption pour les livres, et d’autant moins s’ils sont porteurs de vérités et de sens. C’est bien le cas de ce récit autobiographique du violoniste Ami Flammer.

À propos de Œuvres, 1919-1922, Vélimir Khlebnikov, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 15 Janvier 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

Œuvres, 1919-1922, Vélimir Khlebnikov, Verdier, septembre 2017, trad. russe Yvan Mignot, 47 €

Révolution(s)

Écrire quelques mots sur le travail poétique de Vélimir Khlebnikov m’intimide un petit peu. Et cela à deux niveaux. Tout d’abord, parce que les textes des trois dernières années de la vie du poète (mort très jeune) ici rassemblés, constituent un ensemble de près de mille pages, qui varient dans la manière, allant de la prose à la poésie lyrique, du poème sonore au manifeste, de la lettre à des textes épiques. Puis, en second lieu, je suis intimidé par la force de ce poète au parcours un peu rimbaldien, qui dresse un portrait de la révolution de 1917, laquelle est autant pour lui une révolution politique qu’esthétique, à quoi Khlebnikov prend part avec émotion et violence. Donc je suis impressionné à la fois par la quantité, qui nous permet d’entendre le poète dans toute sa mesure, que par la sonorité, le phrasé des poèmes, leur musicalité, et en cela toutes les formes que prend le style de l’auteur. Il ne me reste que quelques phrases trop pauvres pour résumer et éclaircir mon propre sentiment à l’égard de cette voix poétique qui fait écho avec enthousiasme et presque un peu de folie, à la participation littéraire – sinon politique – à ce grand bouleversement révolutionnaire russe du début du siècle.

Rencontre avec Pierre Ménat, Paris, le 5 janvier 2018, par Sylvie Ferrando

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Vendredi, 12 Janvier 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED, Entretiens

1/ Vous avez effectué plusieurs missions diplomatiques, et en particulier vous avez été nommé aux postes d’ambassadeur de France en Roumanie, en Pologne, en Tunisie et aux Pays-Bas. Pouvez-vous revenir sur votre carrière ? Quels ont été les points forts de ces missions ? Laquelle de ces missions ou lequel de ces pays avez-vous préférés ? Quels souvenirs marquants pouvez-vous nous confier ?

 

J’ai en effet exercé la fonction d’ambassadeur de France en Roumanie de 1997 à 2002, en Pologne de 2004 à 2007, puis en Tunisie de 2009 à 2011 et enfin aux Pays-Bas de 2011 à 2014. Auparavant, j’avais été affecté à New York à la mission française auprès de l’ONU entre 1988 et 1992 et j’avais servi de nombreuses années à Paris, en particulier en tant que conseiller à l’Elysée pour les affaires européennes sous la présidence de Jacques Chirac. J’ai une affection particulière pour mon premier poste d’ambassadeur en Roumanie, qui a duré cinq ans. C’était une période charnière, celle de l’après-Ceausescu, il y avait un enjeu important de restauration des relations diplomatiques. Au cours de cette mission, j’ai appris le roumain, qui est une langue latine pas si éloignée du français. Le peuple roumain est fier de sa langue et exigeant sur son expression, ce qui m’a encouragé à bien savoir la parler.