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Les Chroniques

Le journal de MCDem (7), par Murielle Compère-Demarcy

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 15 Février 2018. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Mardi 5 décembre

Revoir les grands nocturnes religieux de Georges de La Tour. Le Tricheur à l’as de carreau, noirci par le temps, tableau tombé dans l’oubli découvert par un collectionneur chez un antiquaire du Pont-Neuf, en 1926. Né à la fin du 16è siècle, Georges de La Tour sera consacré comme un des plus grands maîtres français suite à plusieurs expositions, jusqu’à la grande monographie de l’Orangerie en 1972. Caravage veille de son ombre, en haut à gauche du tableau, voyage comme une référence d’un tableau à l’autre – telle la lumière à l’intérieur de la nuit, la nuit à l’intérieur de la lumière ? La lumière venant d’en haut à gauche du tableau, le contraste entre les pièces violemment éclairées de l’espace et les parties en contre-jour, cette minutie dans les détails pouvant remuer le spectateur comme une tragédie antique pouvait provoquer un choc esthétique proche de l’effroi…

Jean, un homme hors du temps, Axel Kahn, par Pierrette Epsztein

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Mercredi, 14 Février 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

Jean, un homme hors du temps, Axel Kahn, Stock, octobre 2017, 326 pages, 20 €

 

Dans le récit d’Axel Kahn, Jean, un homme hors du temps, publié aux éditions Stock en 2017, on n’est certes pas pris par surprise. Dès les premières pages, on sait que le drame final est inéluctable.

Ce qui peut troubler le lecteur, c’est que l’auteur ne se contente pas de tenter de retrouver son père, de s’identifier à lui. Il va beaucoup plus loin, il endosse son corps, son costume, prend le train à sa place pour faire le dernier voyage et transcrit en son nom la relation de cette histoire familiale, de ses détours, de ses contours. Il s’empare de ses pensées, des traces écrites qu’il a laissées. Il accepte la posture risquée d’être lui, tellement lui qu’il choisit délibérément d’employer la première personne du singulier. Durant plus de trois cents pages et durant les quelques heures que durera le trajet, il sera Jean. Nous le suivrons avec une émotion qui croît au fil de son itinéraire qui sera plus intérieur et vagabond que chronologique et géographique.

Gabriel Matzneff : deux lectures, par Philippe Chauché

Ecrit par Philippe Chauché , le Mardi, 13 Février 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

 

La Jeune MoabiteJournal 2013-2016, Gabriel Matzneff, Gallimard, novembre 2017, 704 pages, 29 €

Maîtres et complices, Gabriel Matzneff, La Table Ronde, La Petite Vermillon, janvier 2018, 320 pages, 8,70 €

 

« La vie est un perpétuel jaillissement de surprises, elle ne cesse de m’étonner, et c’est pourquoi je remettrai au plus tard possible le ghiribizzo (la lubie) de me faire sauter la cervelle qui me visite de temps à autre (depuis l’âge de seize ans) », La Jeune Moabite, Carnet 151, Dimanche 26 avril 2015, midi, à la terrasse du Métro.

Carnet du désert, suivi de Fragments de solitude, René Pons, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Jeudi, 08 Février 2018. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

Carnet du désert, suivi de Fragments de solitude, René Pons, éditions Rhubarbe, août 2017, 200 pages, 13 €

 

« Ce livre, au jour le jour salivé, est formé de mes manques, de cette incapacité à enchaîner, à fixer mon attention qui, de loin en loin, me torture plus ou moins longtemps »

René Pons, p.151

 

« Je ne marche pas / dans le désert / mais le désert en moi / s’étend à l’infini »

René Pons, p.5

 

Du doute au sur-doute

Mère, pute ou hadja ?, par Amin Zaoui

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 07 Février 2018. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Elle naît comme toutes les autres filles aux quatre coins du monde. Belle. Ange. Pleine de rêves. Fascinée par les jouets. Comment l’ange-fille se métamorphose-t-elle en diable, dans le monde arabo-musulman ?

La fille musulmane naît encerclée par des centaines de vigiles. Toutes sortes de vigiles. Ils sont dans la langue. Dans la morale. Dans la rue. Dans le regard. Dans le hadith. Dans des fatwas perverses.

Elle est née condamnée. Elle est la faute-suprême. Elle est l’erreur-tentation. Elle est la trahison-possible. Elle est la fornication-attendue. Elle est le serpent dans la poche. Elle est la malédiction-retardée.

Dès que la fillette met le pied dans la rue, le regard entre les pieds, elle devient une bombe sexuelle qui menace la galaxie tribale. Dès qu’elle commence à se regarder dans la glace, elle devient la sœur du Satan, « chitane », qui dérange les ablutions des prieurs. Dès qu’elle s’assoit sur le banc d’école, elle est soupçonnée de semeuse de chaos ! Dès qu’elle fait son premier pas sur un talon, elle menace l’équilibre de la terre dans son parcours sur l’orbite habituelle, et donc, elle est exclue de l’espace des anges.