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La Une CED

Le poète italien Mario Benedetti foudroyé par le Covid-19 (par Mustapha Saha)

Ecrit par Mustapha Saha , le Mardi, 05 Mai 2020. , dans La Une CED, Les Chroniques

J’apprends la mort, le vendredi 27 mars 2020, du poète italien Mario Benedetti à l’âge de soixante-quatre ans. Le Covid-19 l’a emporté comme un souffle de vent. La disparition de ce poète majeur passe sous silence dans la presse française, pour la plus terrible des raisons, par ignorance. Un éditeur, contaminé par le néolibéralisme, m’écrivait récemment : « La poésie n’entre pas dans les lois du marché ». Les éditeurs métropolitains ont refusé, jusqu’à présent, de publier des traductions. J’écris cet hommage, patchwork de résurgences, comme une urgence. Un écrivain d’une rare humilité, sur lequel les sollicitations médiatiques n’avaient aucune prise. Se distillent les réminiscences, les évanescences, les nitescences. La maladie, inséparable compagne depuis l’enfance. La douleur. La lenteur. La douleur ne se dit pas. Elle ruisselle. Naufrage de la mémoire avant qu’elle ne se constitue en barque. Isis se perpétue dans la figure de la mère. « La pierre s’enfonce sans la corde autour du cou / Affleurent en cercles les mots sur ses lèvres / Mais peu importe, peu importe / Quelques voyelles, le long du visage blanc / Et noire de cheveux sa lumière / Blottie sur elle-même, Effondrée sur le côté. / Derrière toi, et devant, et au-delà, il n’y a rien » (Mario Benedetti, Pitture nere su carta (Peintures noires sur papier), éditions Mondadori, Milan, 2009). Regarder la dernière cigale. Se réfugier dans les monosyllabes et se dissoudre dans les intervalles.

Début du jour (par Clément G. Second)

Ecrit par Clément G. Second , le Lundi, 04 Mai 2020. , dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

 

Le noisetier qui grince l’heure

ne dissuade aucun oiseau

– et le sang, redite intérieure,

se confirme à travers les os

 

Dans un haut ciel inassouvi

cette lumière à la concave

dérobée, rayons poursuivis,

est au regard antiétrave

Camus, le coronavirus et nous (par Mona)

Ecrit par Mona , le Vendredi, 01 Mai 2020. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

 

La bourse ou la vie ? Choix tragique pour nos gouvernants : sacrifier l’économie pour sauver des vies humaines. Le chef de l’état avait pressenti le retour du tragique en confiant à la revue NRF en 2018 : « l’histoire que nous vivons en Europe redevient tragique ».

La tragédie du coronavirus a commencé avec le refus des autorités chinoises de reconnaître clairement le mal. L’épisode du docteur Li Wenliang, l’homme qui dit la vérité et risque sa vie, donne à cette tragédie une dimension camusienne : « ce qu’il fallait faire, c’était de reconnaître clairement ce qui devait être reconnu et prendre les mesures qui convenaient », disait le narrateur de La Peste. Honte à la Chine donc.

Psychopathologie sociale du confinement (2) (par Mustapha Saha)

Ecrit par Mustapha Saha , le Jeudi, 30 Avril 2020. , dans La Une CED, Les Chroniques

21. L’universitaire Niklas Luhmann était fonctionnaire au début de sa carrière. C’est ainsi qu’il a pris conscience des disfonctionnements endémiques du système. Il s’est, dès lors, donné comme mission de façonner des curations palliatives, neutralisatrices des initiatives citoyennes. La vie sociale ne réduit pas aux mécanismes performatifs du système légal, ne se contente pas de replâtrages réformistes. L’hermétisme luhmannien recèle, en vérité, une redoutable stratégie technocratique de robotisation sociétale. Sa métathéorie enchevêtre les problématiques conceptuelles pour dissoudre la complexité des résistances réelles.

22. Le filtrage des initiatives émanant de la base, libérées de leur gangue étouffante par l’émergence de la révolution numérique, se profile ainsi comme ultime recours d’un ordre hiérarchique en survie, qui ne retient de la submersion télématique que les récupérations mercantiles et les combinaisons logarithmiques de contrôle. La communication est envisagée, dans cette perspective, comme interface abrogative de la pensée libre. L’intelligence critique est considérée comme une contingence parasitaire. Le sens de l’existence n’est, dans cette logique, qu’un moment éphémère où une possibilité programmatique s’actualise, se concrétise, et planifie les virtualités successives.

Le rire de Sade, Marie-Paule Farina (par Jean-François Mézil)

Ecrit par Jean-François Mézil , le Mercredi, 29 Avril 2020. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Le rire de Sade, Marie-Paule Farina, L’Harmattan, 2019, 258 pages, 25 €

 

On me pardonnera, j’espère, de chroniquer ce livre alors que je ne suis qu’un piètre lecteur de Sade. J’en avais depuis longtemps du remords et l’ouvrage de Marie-Paule Farina n’a fait que le renforcer. C’est donc un livre qui, entre autres mérites, a celui d’inciter à (re-)découvrir l’œuvre du « divin marquis ».

On y suit les pérégrinations de l’écrivain qui a elles seules valent un roman. Ses allers et venues en prison. Ses lectures. Sa correspondance. Un essai à la fois très étayé et vivant. Jamais on ne s’ennuie. Amateur éclairé ou non de l’œuvre de Sade, nous sommes tous concernés par la « sadothérapie joyeuse » qui nous est proposée. À tous, elle est bénéfique et, a priori, sans effets secondaires.

Bénéfique et facile à prendre, car Marie-Paule Farina enrobe son essai de douceurs à l’instar de Sade qui, pour mieux faire passer la pilule de sa philosophie, l’enrobait de « sucreries romanesques » et enduisait « les bords de la coupe d’un miel doux et doré », comme on le fait pour faire avaler aux enfants une potion amère.