Photographie Francesca Mantovani © Éditions Gallimard.
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Je ne tiens pas du tout à mourir, mais, s’il le faut physiquement, j’accepte, comme prévu, qu’on enterre mes restes au cimetière d’Ars-en-Ré (Sollers en Ré), à côté du carré des corps non réclamés, des très jeunes pilotes et mitrailleurs australiens et néo-zélandais, tombés là, en 1942 (pendant que les Allemands rasaient nos maisons), c’est-à-dire, pour eux, aux antipodes ;
Simple messe catholique, à l’église Saint-Etienne d’Ars, XIIe siècle, clocher blanc et noir servant autrefois d’amer aux navires, église où mon fils David a été baptisé ;
Sur ma tombe, 1936-20…, cette inscription : Philippe Joyaux Sollers, Vénitien de Bordeaux, écrivain ;
Si un rosier pousse pas trop loin, c’est bien. (Philippe Sollers).
Philippe Sollers, que nous pensions immortel, s’est éteint. C’est une perte immense pour la littérature et pour l’édition. De Tel Quel à L’Infini, d’Une curieuse solitude (1958) à Grall (2022) qui s’ouvrait sur cette parole de Jean : « Alors entre aussi l’autre, arrivé le premier au tombeau. Il voit, et il croit », il aura marqué son temps, qui est devenu le nôtre.