Identification

Les Livres

La lumière de ma mère, Mehdi Charef (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 21 Avril 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Maghreb

La lumière de ma mère, Mehdi Charef, éditions Hors D’atteinte, Coll. Littératures, mars 2023, 120 pages, 17 €

Algérie, de l’origine

Mehdi Charef (né en Algérie en 1952, auteur et réalisateur, considéré comme le père de la « littérature beur »), construit son dernier roman autour de la figure maternelle. Après la trilogie Rue des Pâquerettes, Vivants, La Cité de mon père, La lumière de ma mère poursuit la trajectoire d’un enfant maghrébin et ce, depuis Maghnia, une ville moyenne de la commune de la wilaya de Tlemcen. L’auteur émigre en France à l’âge de dix ans. Son enfance et son adolescence se déroulent entre le bidonville de Nanterre et les cités de transit de la région parisienne. Fils d’un terrassier, il va travailler lui-même en usine de 1970 à 1983, comme affûteur ; d’où ce constat amer : « On nous considère comme des bâtards nés de rien, de personne ».

Mehdi Charef célèbre la bonté, le courage et l’abnégation de sa mère, femme maghrébine invisibilisée, participant du phénomène de masse d’une population immigrée exposée aux formes de pauvreté et d’isolement dans des conditions de vie indignes ; mère proscrite dans « une baraque sordide, obscure ». En dépit du très long séjour en France – toute une vie –, les exhortations haineuses et racistes se prolongent :

Soutine et son temps, Emil Szittya (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 21 Avril 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Arts

Soutine et son temps, Emil Szittya, Éditions du Canoë, mars 2023, 112 pages, 15 €

 

Voici la réédition d’un ouvrage publié en 1955 par l’essayiste hongrois Emil Szittya (1886-1964). Le titre résume bien l’entreprise : cerner Soutine, son environnement artistique, son époque, celle de l’école de Paris, regroupant nombre d’étrangers notoires.

De la formation de Soutine aux années de guerre, l’essayiste suit les longs développements artistiques et créatifs d’une personnalité, rebelle, difficile à saisir, assez misanthrope, née juif en Lituanie, à la fin du XIXe siècle.

Haineux, ne croyant guère à l’amitié, farouchement indépendant, d’une hygiène toujours douteuse, Soutine fut un solitaire frustré, fréquentant les bordels, s’adonnant à la boisson, n’ayant connu pour ainsi dire aucune relation amoureuse durable. D’une jalousie féroce à l’égard des autres artistes (Krémègne, Modigliani, Picasso…), il connut à Paris (Montparnasse) une vie misérable durant de nombreuses années.

Un merveilleux souvenir, Marc Pautrel (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 20 Avril 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Un merveilleux souvenir, Marc Pautrel, Gallimard, Coll. L’Infini, février 2023, 88 pages, 12 € . Ecrivain(s): Marc Pautrel

« J’ai la chance de travailler avec l’un des plus grands romanciers vivants, tout à la fois auteur et éditeur depuis soixante-ans, un cas unique dans l’histoire littéraire, d’ailleurs célébrissime, et un homme de si précieux conseils pour moi depuis une quinzaine d’années que nous nous connaissons ».

« J’ai comme perdu ma sœur. Je ne sais pas si je la reverrai un jour. Je l’espère, mais je n’y crois pas vraiment. Trop de petits drames de l’enfance handicapent les adultes. J’ai été sauvé par miracle, enlevé par les phrases et protégé par elles, celles des autres puis les miennes. Elle, elle a dû se battre dix fois plus, et contre des dangers bien plus grands ».

Un merveilleux souvenir est publié par Philippe Sollers, dont le nom n’est jamais nommé dans ce merveilleux petit roman, mais dont la présence l’irrigue. Il accompagne l’écrivain depuis bien longtemps dans L’Infini, la Collection qu’il dirige avec toute la finesse d’un capitaine de corvette et d’un grand lecteur de la haute mer, depuis L’homme pacifique en 2009 – C’est un homme qui parle sans arrêt, et sans doute même parle-t-il tout seul chez lui. Mais il ne veut pas seulement parler, il veut raconter des histoires –, en passant par Un voyage humain, Polaire ou encore Le peuple de Manet, son petit livre sur Ozu (1), jusqu’à ce très vif roman familial où un drame ancien rôde et nous échappe.

Le Glorieux et le Maudit, Olivier Charneux (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 20 Avril 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Seuil

Le Glorieux et le Maudit, Olivier Charneux, Le Seuil, mars 2023, 268 pages, 19,50 € Edition: Seuil

 

Quand l’imagination s’ankylose ou devient suspecte, l’autofiction est un recours facile. Autre commodité : écrire la biographie arrangée d’un auteur à demi obscur ; faire ajouter « roman » sur la couverture pour appâter le chaland ; se présenter comme un redresseur de torts, un réparateur d’injustices ; viser un public moyen – moyennement cultivé, moyennement intéressé, moyennement paresseux. Avec un peu de chance et une solide campagne de promotion, le succès sera au rendez-vous. On peut rêver, avec plus de chance encore, à une adaptation cinématographique ou, de façon plus modeste, à un téléfilm diffusé en prime time.

Après le médiocre Mourir avant que d’apparaître, de Rémi David (1), chroniqué ici-même, consacré à la relation passionnée entre Genet et Abdallah Bentaga, voici Le Glorieux et le Maudit d’Olivier Charneux qui retrace l’histoire d’amour (tumultueuse) entre Jean Cocteau et Jean Desbordes, né en 1906 à Rupt-sur-Moselle et qui succéda auprès de l’Oiseleur à Raymond Radiguet.

La Dernière Amitié de Rainer Maria Rilke, suivi des lettres à Nimet Eloui Bey et Les derniers mois de Rilke, par Genia Tchernosvitow, Edmond Jaloux (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 20 Avril 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

La Dernière Amitié de Rainer Maria Rilke, suivi des lettres à Nimet Eloui Bey et Les derniers mois de Rilke, par Genia Tchernosvitow, Edmond Jaloux, Arfuyen, mars 2023, 132 pages, 15 €

La courte 4ème de couverture résume parfaitement les circonstances et l’objet de ce livre :

« Dans les premiers jours de septembre 1926, à l’hôtel Savoy de Lausanne, Rilke fait la connaissance de Nimet Eloui Bey. Son père, Achmed-Khaïri Pacha, a été premier chambellan du sultan d’Égypte Hussein Kamal. Sa haute stature et son élégance naturelle attirent sur elle tous les regards. Mais plus encore, ce qui la rend fascinante, c’est la terrible lucidité et l’inquiétude spirituelle qu’on sent en elle ».

La présence de Nimet Eloui Bey illuminera les derniers mois de Rilke. « Tout à la fin de septembre, raconte sa dernière secrétaire, une amie, dont il disait qu’elle était la femme la plus belle du monde, était montée de Lausanne le voir dans sa tour. Il avait tenu à cueillir lui-même des roses de son jardin pour en mettre partout dans “sa” maison ». Il s’égratigna sur une épine et sa santé se dégrada subitement. Rilke mourut de leucémie trois mois plus tard, le 29 décembre 1926.