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Les Livres

Vous êtes ici, Renaud Ego (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 11 Avril 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Vous êtes ici, Renaud Ego, éditions Le Castor Astral, 2021, 176 pages, 14 €

 

Englobement

Il est difficile pour le lecteur que je suis de résumer mes diverses impressions, tant les 15 poèmes de cet ouvrage nous donnent à découvrir 6 années de travail toujours animées du même entrain. Une poésie dynamique. Ce qui veut dire ici que, le procédé poétique restant le même, la ligature autour de laquelle tournent ces poèmes se déforme et se dilate dans la lecture. Est-ce la fleur manquante faisant le bouquet ? Sans doute, si l’on espère dans le rassemblement de la lecture, de l’inquiétude humaine et de la forme écrite, voyant dans le poème le poète comme fleur absente mais qui à lui seul fait entièrement le poème – c’est d’ailleurs pour moi le point essentiel : voir le poète sous le glacis de son poème. Forme du discours et espace abstrait.

Le Corsaire Rouge, James Fenimore Cooper (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 07 Avril 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, USA, Roman, Folio (Gallimard)

Le Corsaire Rouge, James Fenimore Cooper, Gallimard, Folio Classique, juin 2021, trad. anglais, Auguste-Jean-Baptiste Defauconpret, 690 pages, 11,50 € Edition: Folio (Gallimard)

Présentée, préfacée et commentée par Philippe Jaworski, cette édition, magnifiquement servie par la traduction, dans un français d’une magistrale pureté classique, de Defauconpret de Thulus, permet à tout lecteur, au prix modeste du format Poche, d’embarquer pour une odyssée marine prodigieuse et conséquemment inoubliable.

L’action commence en 1759, précisément le jour où les habitants du lieu, fidèles sujets de la monarchie anglaise, célèbrent la victoire de l’Angleterre sur la France, laquelle perdait là ses colonies américaines et canadiennes, à Newport, alors petit port de Rhode Island, où mouillent deux navires, le Dauphin et la Royale Caroline, dont la présence, la nature, l’équipage, les qualités opératives, l’élégance, la provenance, la destination, l’activité hypothétique constituent, ponctués d’allusions répétées sur les faits et gestes d’un pirate quasi légendaire qui sillonne et écume l’océan en accumulant prises, massacres et autres forfaits, le sujet principal des conversations qui se nouent sur terre, à l’occasion récurrente de rencontres aux circonstances provoquées ou semblant relever du hasard, entre des personnages qui vont et viennent, en un chassé-croisé dont l’intrigante durée narrative suscite une attente croissante d’il ne sait quoi chez le lecteur littéralement (littérairement) captivé.

Profession fripouille, Mémoires, George Sanders (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 06 Avril 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Biographie, Séguier

Profession fripouille, Mémoires, George Sanders, Séguier Editions, janvier 2023, trad. anglais, Romain Slocombe, 288 pages, 20 € Edition: Séguier

 

« L’un des plus grands héros de mon enfance, mon oncle Jack, se livrait avec une joie obstinée à l’un de ses passe-temps favoris. Depuis son immense lit sculpté, un pistolet de calibre 22 dans sa main tremblante de lendemain de cuite, il tirait sur les mouches rassemblées qui se régalaient de la confiture dont il avait barbouillé le plafond ».

Ces mémoires piquantes de l’un des grands acteurs américains restaient introuvables dans l’édition française, ou alors à des prix que la courtoisie littéraire nous empêche de relever. On devait la première édition à Roland Jaccard pour sa Collection Perspectives Critiques aux PUF, c’était en 2004. Cette nonchalance, ce style, cette attitude d’élégant dédain (1) du comédien aux cent dix films, dont quelques pépites et de nombreux navets ne laissèrent pas indifférent Roland Jaccard, grand admirateur de Louise Brooks et ami de Cioran. Depuis Roland Jaccard, comme quelques années plutôt George Sanders, a mis fin à ses jours, à ses livres et à ses chroniques, même si quelques amis inconnus continuent à le lire et à relire, souvenirs de temps anciens, que certains diraient perdus !

Qui est l’extrémiste ?, Pierre-André Taguieff (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 06 Avril 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Qui est l’extrémiste ?, Pierre-André Taguieff, Éditions Intervalles, août 2022, 168 pages, 13 €

 

Pierre-André Taguieff est l’auteur d’une œuvre impressionnante en volume, en qualité et en richesse d’information : les notes infrapaginales foisonnantes sont une de ses signatures (il y a du Bayle chez lui) et l’on serait mal avisé de les survoler d’un œil distrait, car elles ne se contentent pas de jouer le rôle traditionnel de justificatifs ou de sources, mais elles permettent de prolonger la réflexion avec, par exemple, l’éloge du livre de Seymour Martin Lipset, L’Homme et la politique, vieux de plus de soixante ans, qui avait dégagé, sans qu’on la comprît à l’époque, la notion de « fascisme du centre »). Une œuvre qui sera peut-être un jour étudiée pour elle-même et dont la clef de voûte est un livre intitulé L’Effacement de l’avenir. Pierre-André Taguieff est un analyste lucide et par conséquent subversif, en des temps où les hommes sont installés dans la caverne platonicienne du divertissement sportif et télévisuel et paraissent heureux de s’y trouver. C’est un des paradoxes de notre époque sinistre : jamais l’information n’a été aussi libre et abondante et jamais la réflexion, la pensée, n’ont été aussi pauvres. Ceux qui nous gouvernent auraient bien tort de réfréner leur appétit de domination et leur pente au despotisme, face à une matière humaine aussi ductile.

Trafic, Galien Sarde (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Mercredi, 05 Avril 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Trafic, Galien Sarde, Editions Fables Fertiles, avril 2023, 146 pages, 17 €

 

La littérature n’est-elle pas le fil invisible qui relie par-delà les siècles les hommes et les femmes, leurs vies, leurs passions, leurs œuvres et les personnages qui les animent ? N’est-elle pas célébration de l’intemporel, de ce qui demeure au fil des générations ? N’est-elle pas l’écritoire géant de nos quêtes existentielles ? Trafic, le merveilleux livre de Galien Sarde, incarne un peu de tout cela.

Dès les premières pages, on se laisse emporter dans le tourbillon d’une fresque vivante en perpétuel mouvement, à l’image des tumultes de l’existence. Aux « accidents de trafic » (embouteillages, accidents graves, visions cauchemardesques comme ce « visage bandé respirant en réanimation »), succèdent des jeux de lumière qui contribuent à créer une ambiance poétique, onirique et envoûtante. Ainsi, Galien Sarde dépose-t-il ses mots tel un peintre par touches flamboyantes de couleurs, dans un « déluge de lumières ». Il « peint » l’air brûlant de l’appartement où vit le héros, « les rayons de soleil » qui le « flambent », le « criblent » de « lignes étincelantes ». Il recrée des ambiances, immortalise la « féerie solaire » qui règne à proximité du Mississippi, « en se mêlant à l’eau du fleuve », les « teintes charnelles, rose, rouge et or ».