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La Une CED

La Styx Croisières Cie - Juillet 2020 (par Michel Host)

Ecrit par Michel Host , le Jeudi, 03 Septembre 2020. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Ère Vincent Lambert, An II

Humain, citoyen le plus vulnérable, la République française, la médecine, la banque et la magistrature réunies, t’ayant baptisé Légume, te tueront.

 

« Nos aventures passées agacent notre femme, mais la flattent. Les femmes veulent toutes être distinguées par des hommes à bonnes fortunes, c’est-à-dire par des hommes inconstants ; elles ont l’impression d’être admises à un concours ! Elles souhaitent toutes un don Juan fidèle, autant dire un ivrogne qui ne boit pas ! ».

Francis de Croisset, Nos marionnettes

Lµ-1. C’est l’été. Nous le comprenons d’abord en ce que le jardin de Bourgogne est plongé dans le silence. Nous y attendons le retour de la gent ailée et chantante. Dans cet autre fait aussi que nos radios, commerciales ou culturelle, donnent d’infinis temps de parole à des troupes de bavards qui ne savent parler que de leur soi-même auquel ils attribuent une importance fictive à la mesure de leur insignifiance réelle.

Le Llano en flammes, Juan Rulfo (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 02 Septembre 2020. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Le Llano en flammes, Juan Rulfo, Folio

 

Chaque page, et chaque ligne et chaque mot de Juan Rulfo sont de précieux trésors littéraires. Par leur beauté suffocante et aussi par leur rareté qui fait que l’on est sans cesse hanté, en les lisant, par le désespoir de n’avoir plus rien à lire de l’auteur après son roman, Pedro Paramo, et ici ses nouvelles, qui constituent ses premières œuvres publiées. Rulfo, par son silence littéraire qui durera plus de 30 ans après la parution de Pedro Paramo, a bâti une légende, une fascination qui jaillissent puissamment de la lecture – plus encore de la relecture – de ses deux œuvres. Comment pareil conteur, pareil styliste, pareil génie littéraire a-t-il pu se taire, à jamais ? Pourquoi ?

Des nouvelles donc. Et pourtant, la suite de ces textes est si proche d’un roman qu’ils s’imposent ainsi au lecteur. Unité de lieu, de temps, de thème. Proximité étroite des figures de personnages. Voisinage des situations. On lit Le Llano en flammes non comme quatorze histoires mais comme une seule, puissante, ravageante, d’une sècheresse et d’une sobriété suffocantes.

La région c’est le sud de l’État de Jalisco, dont la nature sauvage, aride, désertique est racontée en touches sèches, sans trace de folklore, sans complaisance romantique. Un enfer qui va jusqu’à faire taire ceux qui y vivent tant parler est pénible.

Le théâtre est dans le pré (1) (par Marie du Crest)

Ecrit par Marie du Crest , le Mercredi, 02 Septembre 2020. , dans La Une CED, Les Chroniques


Le monde du théâtre, celui du spectacle vivant, a disparu soudainement de nos vies en mars dernier : les représentations ont été annulées, les salles ont été désertées, les festivals ont renoncé à l’été. Aujourd’hui encore, le théâtre vit une forme de quarantaine. Pourtant il faut recommencer à vivre, à jouer, à écouter.

Le Collectif Le Lieu-Dit, autour de Philippe Labaume (auteur, metteur en scène et codirecteur du théâtre du Verseau à Lyon), installé dans la campagne du Beaujolais vert, à Claveisolles, a décidé de réinventer le spectacle, loin de la ville, face à un paysage de collines boisées, de petites routes qui serpentent, créant en quelque sorte une saison estivale (en juillet-août) autour de formes diverses : lecture collective du public et de l’auteur Samuel Gallet ; adaptation ; cirque ; musique…

Aladin et Sindbad chez Libretto (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 01 Septembre 2020. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Le Roman d’Aladin, Phébus/Libretto, 2002, trad. arabe, René R. Khawam, 222 pages, 8,70 €

Les Aventures de Sindbad le Marin, Phébus/Libretto, 2001, trad. arabe, René R. Khawam, 256 pages, 9,50 €

 

Nous avons été dupés, dans notre grande majorité, et nous dupons de même nos enfants et nos petits-enfants. Cette duperie a pris et prend pourtant place à un moment de grande intimité, de grande confiance, celui de l’histoire avant d’aller au dodo. Que de versions avons-nous subies et faisons-nous subir, d’autant que l’industrie éditoriale s’en est mêlée (ah ! l’invention de la littérature enfantine !…) après que Walt Disney a déjà fait des ravages, de contes édulcorés, remaniés, arrangés à une sauce censément destinée à plaire aux enfants du XXIe siècle. Notre seule excuse est que ce n’est pas nous qui avons commencé, Perrault l’emperruqué poudré avait déjà commis quelques remaniements à destination de la Cour de Louis XIV, car il fallait plaire, et lorsqu’on veut plaire, on ment.

L’anniversaire (par Marie-Pierre Fiorentino)

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Mardi, 01 Septembre 2020. , dans La Une CED, Ecriture, Nouvelles

 

Daniel avançait, parce qu’elle était petite et nonchalante, du même pas que sa mère, triomphal comme un homme promenant à son bras une femme attirante. Le halo inhabituel de son parfum lui rappelait les grandes occasions. Le manteau de printemps bleu ciel qu’elle étrennait, presque superflu tant l’air était doux, l’avait ébloui. Que maman était belle !

– « Voilà les garçons, je vous laisse » annonça-t-elle en observant alentour sans lâcher la main de son cadet.

À cette heure-ci, les enfants du quartier rivalisaient pour accéder aux balançoires ou au bac à sable, les amoureux à un banc discret. Un groupe de lycéennes riait de confidences murmurées ; peut-être se moquaient-elles du quadragénaire dont l’attention, faussement accaparée par les courtes plaques fixées au socle des statues, louchait sans cesse vers elles.

– « Vous allez pouvoir profiter du beau temps, mes chéris. Christian, fais très attention à ton frère, s’il te plaît, même si tu rencontres tes camarades ».