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Les Chroniques

Les lois de la Grande Maison pour éviter l’incendie et tuer le métier à tisser

Ecrit par Kamel Daoud , le Mercredi, 18 Juin 2014. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Lisez-vous ce que propose, en guise de programme, un gouvernement algérien aux députés ? En général non. Car on sait. On sait que le programme va se réduire à l’os de l’essentiel : le régime vend du pétrole et du gaz, puis donne de l’argent à ceux qui le menacent par leurs émeutes ou ceux qui le soutiennent par leur servilité. La stratégie économique est d’une pauvreté affligeante à chaque fois. Rien que du Souk El Fellah, échelle nationale. Le Pouvoir n’arrive pas à sortir de la conception du colis alimentaire pour deux raisons : à cause de son essence et à cause de sa conception de l’économie. Son essence est distributive : il a chassé le colon et il ne peut concevoir la fortune de tous que comme distribution du butin. On ne crée pas, on partage ce que Dieu ou le colon ont laissé ou donné. Il n’y a pas de conception de l’enrichissement que par la légitimité idéologique. On devient riche par l’Histoire, pas par l’effort. Et cette histoire peut être celle de la révolution, du sang, de la légitimité, de la filiation ou de la vitesse.

L’essence du régime est populiste et sa vision de l’économie est celle de la cantine.

Avec Lacan

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 12 Juin 2014. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

J’ai évité de justesse d’intituler cette chronique « Jacques là quand ? », par un calembour digne de l’almanach Vermot, ou, pour être d’emblée dans le propos, digne de Jacques Lacan. Pour vous donner quelque idée de la passion de Lacan pour le calembour, je ne citerai que l’intitulé de deux de ses derniers séminaires de l’ancienne fac de droit : « Les non-dupes errent », « L’insu que sait de l’une-bévue s’aile a mourre ». Dans le cas du second, nous sommes encore un certain nombre à nous demander comment le « déconstruire » (ça joue sur Unbewusste = inconscient chez Freud). C’est que parfois, ce goût du Maître pour le jeu de mots nous mettait sacrément dans l’embarras. Un souvenir précis : Lacan dit, lors d’une rencontre, « De préférer, somme toute, à la trique la bonace ». On prend des notes frénétiquement. « Eh ! comment tu écris bonace ? 2 ss ou c ? » « bonasse » (simple, sans malice, peu d’esprit) ou « bonace » (mer calme, par exemple dans un port) ? Un autre : Le séminaire de 75-76 s’intitulait le « Sinthome ». On a passé l’année à se demander, chaque fois qu’il prononçait le mot, s’il s’agissait du sinthome ou du symptôme.

Michel Foucault : l’« Aide au retournement salutaire »

Ecrit par Nadia Agsous , le Mardi, 10 Juin 2014. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

« C’était mai 1968 sauvé ». C’est en ces termes que Christian Revon, ancien religieux devenu avocat, qualifie M. Foucault lorsqu’il parle du personnage, de sa vie, de son action et de l’effet de sa pensée sur sa pratique professionnelle et sa vie quotidienne, dans le texte intitulé Michel Foucault vivant, publié dans l’ouvrage collectif que les éditions de l’Herne ont consacré au philosophe (1).

Hommage ! Reconnaissance ! Admiration ! Car C. Revon avoue avoir été fasciné par la personnalité de M. Foucault, par sa pensée et par-dessus tout par « la marge qu’il entretenait avec la norme et par sa capacité à l’action, sa volonté d’agir, sa liberté […], son homosexualité, sa volonté audacieuse de vivre sa vie sans concession, sans compromis ».

C’est en 1975 que C. Revon a lu Surveiller et punir (2). Cette lecture est intervenue dans un contexte bien particulier dans la trajectoire biographique de l’auteur. Sur le plan personnel, il vivait une situation de désarroi car il acceptait mal le fait d’avoir quitté l’univers religieux. Selon son témoignage, ce livre a « bousculé, inspiré, inquiété » sa vie personnelle notamment professionnelle. A cette époque, C. Revon faisait ses débuts dans la profession d’avocat.

Le Scalp en feu VII par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Mercredi, 04 Juin 2014. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

« Poésie Ô lapsus », Robert Desnos

 

Le Scalp en feu est une chronique irrégulière et intermittente dont le seul sujet, en raison du manque et de l’urgence, est la poésie. Elle ouvre un nombre indéterminé de fenêtres de tir sur le poète et son poème. Selon le temps, l’humeur, les nécessités de l’instant ou du jour, ces fenêtres changeront de forme et de format, mais leur auteur, un cynique sans scrupules, s’engage à ne pas dépasser les dix à douze pages pour l’ensemble de l’édifice.

Lecteur, ne sois sûr de rien, sinon de ce que le petit bonhomme, là-haut, ne lèvera jamais son chapeau à ton passage car, fraîchement scalpé, il craint les courants d’air.

Enfin, Le Scalp en feu est désormais publié simultanément, ou successivement, le hasard décidant de ces choses, sur les sites de Recours au poème et de La Cause Littéraire.

décembre 2013/janvier 2014, Michel Host

Présent absolu, Gérard Pfister

Ecrit par Didier Ayres , le Samedi, 31 Mai 2014. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

L’expérience du vide


Gérard Pfister publie le troisième et dernier volet de son travail poétique rassemblé sous le titre La Représentation des corps et du ciel, entreprise qui comporte comme sous-titre Oratorio. Ici, nous avons à faire avec le mouvement de cette expérience poétique, que j’appellerai, si vous me le permettez, une expérience du vide. Car je crois qu’à la manière d’Henri Michaux, avec son Connaissance par les gouffres, Gérard Pfister nous engage dans une psalmodie, issue d’une sorte de marche, de parcours à la fois intérieur – et donc spirituel – et physique – d’où viennent la scansion et le style rhapsodiques. Ainsi, Présent absolu aurait peut-être pu se sous-titrer par Rhapsodie. En effet, c’est à une expérience à la fois musicale en même temps que portée vers le silence – ce qui n’est pas incompatible – que nous convie ce livre.