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Les Chroniques

«Woven» de Gavin Greenaway : une fantaisie inouïe (par Ana Isabel Ordoñez)

Ecrit par Ana Isabel Ordonez , le Mercredi, 13 Mars 2019. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

Musicien : Gavin Greenway

Album: Woven

Titres:  «A Beginning», «The Sun Rose», «And Then I Saw You», «A Conversation», «We Danced For Seven», «Autumn Came So Soon», «The Fall», «Adrift», «The Melting», «Singing Old Songs», «We Travelled Far», «Goodnight My Love»

 

La formidable puissance musicale de Gavin Greenaway s’est très largement construite autour des notes de son piano. Titan des musiques de film, Gavin incarne le talent et le vertige du succès. Sa musique recèle une grande élégance. Les titres enregistrés dans son dernier album « Woven », sont parmi les plus touchants, créatifs et précis réalisés par le pianiste.

Poèmes, Jean-Pierre Faye (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 11 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Poèmes, Jean-Pierre Faye (éditions Polyglotte, 2013, 22 €)

 

Faisant face à une grande quantité de livres en attente dont je veux faire la chronique, cette anthologie de Jean-Pierre Faye et ses quatre cents pages m’ont imposé une lecture véloce. Cela ne m’a pas empêché de découvrir néanmoins le parcours d’une vraie route poétique, originale et intense. Le recueil m’est tout de suite apparu comme tourné vers le corps, les membres du corps ou encore, l’humidité de la chair, la fluidité du sang. Et cela parfois dans une langue hermétique. Donc, ici les éléments physiques fondamentaux, et une langue qui garde son mystère. Il faudrait peut-être relire encore cette anthologie de manière plus appliquée, sachant qu’une première lecture m’a fait aimer cette langue énigmatique. En tous cas, ce livre couvre les poèmes de Jean-Pierre Faye de 1939 à 2013, et s’oriente au fur et à mesure dans la recherche d’une poésie de l’incarnation. Nonobstant, je dirais mieux mon sentiment en rapprochant cette sorte de poésie orphique d’une poésie abstraite, capable de tenir le corps comme une composante géométrique, prosodique.

Euclidiennes, Eugène Guillevic (par Matthieu Gosztola)

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Vendredi, 08 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Euclidiennes, Eugène Guillevic, Gallimard, coll. Folio+Collège n°46, septembre 2018, dossier par François Mouttapa, 160 pages, 5,50 €

François Mouttapa, dans son édition commentée, didactisée à destination des collégiens, des Euclidiennes de Guillevic (qui, en mêlant poésie et mathématiques, a inventé une « poémathique »), nous invite, de manière sous-jacente, à repenser l’enseignement des Lettres.

Anne Armand, dans L’Histoire littéraire, Théories et pratiques [1], pose les cadres de référence : « Pour l’élève d’aujourd’hui, qui manque des repères traditionnels proposés par les manuels, par le discours scolaire, “toutes” les œuvres du passé, c’est-à-dire qui n’appartiennent pas à son temps personnel, apparaissent globalement comme lointaines, dans une perspective écrasée qui mêle au moins trois siècles de littérature ».

L’enseignement des Lettres qui traite d’objets patrimoniaux doit « relever un défi », commente François Mouttapa dans L’histoire littéraire au lycée : retour ou nouveau départ ? [2] Quel est ce défi ? « [F]aire face au “régime d’historicité”, pour reprendre la formule de François Hartog, à la manière dont les jeunes générations pensent leur rapport au passé. Il y a d’un côté le présent auquel ils appartiennent, et de l’autre un bloc informe, celui du passé, écrasant toutes les œuvres sans approche linéaire, séquencée ou hiérarchisée.

Peaux d’écriture (6) « Chaque poème est une navette » (par Nathalie de Courson)

Ecrit par Nathalie de Courson , le Jeudi, 07 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

Trajectoire déroutée de Sanda Voïca (Lanskine, 2018)

Trajectoire déroutée, que Sanda Voïca dédie à sa fille disparue Clara Pop-Dudouit (1994-2015), est un recueil de poèmes dont Didier Ayres a justement souligné ici l’absence de pathos et la profonde sobriété (http://www.lacauselitteraire.fr/trajectoire-deroutee-sanda-voica-par-didier-ayres).

Je voudrais à mon tour entrer dans ce texte et m’approcher de son « je » solitaire qui, dans des vers courts et dépouillés, présente dès les premiers mots un corps profondément atteint :

 

C’est quoi une fenêtre ?

Mon squelette récent.

J’ai soif

de la tombe blanche

ovale dans mon corps.

Billy le menteur, Keith Waterhouse (par Fedwa Bouzit)

Ecrit par Fedwa Ghanima Bouzit , le Jeudi, 07 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Editions du Typhon

Billy le menteur, Keith Waterhouse, janvier 2019, trad. anglais Jacqueline Le Begnec, 239 pages, 17 €

 

Billy le menteur de Keith Waterhouse m’a réellement surprise. Le titre simplet pourrait laisser suggérer une histoire banale, voire un roman jeunesse. Mais dès les premières pages, on se rend compte qu’il s’agit en fait d’un récit sombre, servi d’un humour désespéré et drôlement addictif. Publié d’abord en 1960, Billy le menteur est un roman culte au Royaume-Uni. La plume de Keith Waterhouse s’inscrit dans une vague littéraire des années cinquante apparue dans le nord du pays, et que la critique avait désignée de « jeunes hommes en colère ».

On a bien l’impression d’avoir affaire à un jeune homme en colère avec Billy Fisher, le personnage principal. Mais on ne saurait le réduire à cette couche primaire, qui n’est probablement que le symptôme d’un malaise plus complexe. Billy Fisher habite la ville fictive de Stradhoughton, dans le Yorkshire. Au seuil de l’âge adulte, il habite chez ses parents avec lesquels il se chamaille tous les jours, il travaille dans une compagnie des pompes funèbres où il passe le plus clair de son temps à composer des poèmes satiriques, et en fin de journée il courtise des femmes qui toutes l’irritent d’une façon ou d’une autre : Barbara avec ses manières prudes et sa manie de manger des oranges à longueur de journée, Rita avec son langage ordurier et Liz avec ses vêtements froissés et poussiéreux.