Régulièrement, Paul Auster pose un regard dans son œuvre sur le chemin de vie parcouru. Dans l’invention de la solitude, le Carnet rouge, le diable par la queue il nous donnait des époques, des clés qui ouvraient à la fois la compréhension d’une vie mais aussi et surtout d’une œuvre. Chronique d’hiver est donc dans cette scansion itérative de l’œuvre d’Auster. Mais avec cette chronique, Paul Auster prend un chemin nouveau. Il semble clore comme un bilan. Qu’on se rassure, loin d’être complet, loin d’être systématique, loin même d’être ordonné !
Le premier trait de ce « bilan » est justement le désordre. Point de chronologie d’ensemble, des moments, pris semble-t-il au hasard mais on sait, avec Auster, que rien n’est au hasard. Disons qu’il s’agit plutôt d’une parole libre, à la façon de celle qu’on tient devant un psychanalyste. Un lien peu apparent, mais d’autant plus fort entre les séquences de parole. Paris, l’enfance, la mère, aujourd’hui, puis de nouveau Paris, les femmes – deux femmes surtout, La mère et Siri * – l’enfance encore … Auster enchaîne les bribes de souvenirs comme des inventaires : inventaires des lieux habités, inventaire des voyages à travers les USA et le monde, inventaire des femmes, des morts.