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Actes Sud

L'or des rivières, Nimrod

Ecrit par Theo Ananissoh , le Lundi, 26 Décembre 2011. , dans Actes Sud, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Afrique, Roman, Récits

L’or des rivières, 2010, 126 p. 13 € . Ecrivain(s): Nimrod Bena Djangrang (Nimrod) Edition: Actes Sud

L’Or des rivières est un roman en sept récits. On peut le lire en commençant par le quatrième « chapitre » intitulé Les arbres. C’est, me semble-t-il, le moyen d’apprécier d’emblée le projet rare qu’accomplit Nimrod. Ce projet, le poète tchadien l’énonce dans le troisième récit intitulé Le retour : « Mon voyage n’avait pour unique objet que celui d’inscrire ma présence dans le paysage ». C’est le retour d’un « orgueilleux qui a les poches vides » dans un pays où la guerre, sporadique, dure depuis trente ans, dans un Tchad dont les paysages, jadis, émurent André Gide. Et comme Gide autrefois, Nimrod décrit en se décrivant et en se voyant sentir. Il parvient ainsi à ne pas rendre les armes devant une réalité qui est faite à la fois de beauté et de laideurs.

Face au pays dont, sans en avoir l’air, il n’escamote rien des afflictions, Nimrod oppose donc sa sensibilité et son esprit. C’est plus qu’un simple rempart. L’affaire est d’importance. Ce n’est pas impunément que le poète remet les pieds là où il est né. D’emblée, il s’agit de défendre et de se défendre. Les gens ici sont occupés à faire des révolutions ineptes, à rouler en Land Cruiser, à ignorer la beauté des lieux où ils se démènent ainsi. En réalité, le poète est au front. Dans Voyage au Congo, André Gide s’exclame presque : « A présent je sais ; je dois parler ». Par ces mots, il ne signifie pas qu’il doit s’engager, prendre parti, combattre, mais plutôt se défendre contre l’horreur de ce qui est, affirmer l’intégrité de son esprit.

Millénium 1, les hommes qui n'aimaient pas les femmes, Stieg Larsson

Ecrit par Yann Suty , le Dimanche, 04 Décembre 2011. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Pays nordiques, Babel (Actes Sud)

Millénium 1. Les hommes qui n’aimaient pas les femmes (Män som hatar kvinnor, 2005), traduit du suédois par Lena Grumbach et Marc de Gouvenain, Babel Noir, 710 p. 11,50 € . Ecrivain(s): Stieg Larsson Edition: Babel (Actes Sud)

Après la bataille.

La saga Millénium a remporté un succès colossal. A un moment, tout le monde semblait la lire ou l’avoir lue, il devenait presque difficile de résister à la déferlante. Le livre était de toutes les conversations. Il y avait ceux qui l’avaient lu et les autres.

Les autres…

Certains, qui lisaient là leur seul livre de l’année, ne comprenaient pas qu’on ne puisse pas avoir déjà dévoré cette formidable aventure littéraire. Il nous manquait quelque chose à nous qui n’avions pas encore succombé.

Mais parfois on se méfie. Pas du succès. Ce n’est pas parce qu’un livre rencontre un tel engouement qu’il est nécessairement mauvais (comme peuvent le prétendre certains pour qui la confidentialité est gage de qualité). Mais on se souvient du précédent Da Vinci Code.

Journal de guerre, Ingeborg Bachmann (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Dimanche, 27 Novembre 2011. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Biographie, Récits

Journal de guerre, 2011, Trad. De l'allemand Françoise Rétif, 119 p. 16 € . Ecrivain(s): Ingeborg Bachmann Edition: Actes Sud

Le « Journal » de guerre d’Ingeborg Bachmann, à proprement parler, occupe dans ce petit livre 15 pages. 15 pages écrites par une jeune fille de 18 ans, autrichienne, fille d’un père nazi convaincu et d’une famille et d’un voisinage qui ne le sont pas moins. On est en 1945 et les alliés (essentiellement les Britanniques) occupent le pays après la libération.

La première surprise du lecteur est là. Ces pages de journal d’adolescente n’ont rien d’éblouissant, ni dans la forme, ni dans le contenu et à la page 34 (fin du « journal » déjà !) on se demande un peu s’il était besoin de publier ces lignes somme toute banales, ne présentant apparemment d’autre intérêt que d’être les premières traces d’écriture de celle qui va devenir la plus grande poétesse et auteure de langue allemande de l’après-guerre.

Oui mais. Un événement nous a retenus un peu dans le « journal » : la rencontre d’Ingeborg avec un jeune soldat « libérateur » britannique. Jack Hamesh. Il a une double particularité identitaire : il est autrichien et juif. Pendant la montée des persécutions antisémites, en 1938, il a réussi à s’enfuir vers l’Angleterre. Et son engagement dans l’armée britannique, sa connaissance parfaite de l’allemand, l’ont ramené en 45 vers sa terre natale.

Le Grand Partout, William T. Volmann

Ecrit par Yann Suty , le Dimanche, 30 Octobre 2011. , dans Actes Sud, Les Livres, Recensions, La Une Livres, USA, Récits, La rentrée littéraire

Le Grand Partout (Riding Toward everywhere), (2011), trad. de l’américain par Clément Baude, 240 p. 22 €, . Ecrivain(s): William T. Volmann Edition: Actes Sud

Le Grand Partout est le récit d’un périple mené à travers les Etats-Unis par William T. Vollmann, selon la méthode hobo. Suivant les traces d’illustres prédécesseurs comme Henry David Thoreau, Ernest Hemingway, Thomas Wolfe ou Jack Kerouac, Vollmann a pendant de longs mois sillonné le pays en grimpant dans des trains de marchandises, en toute illégalité.

Pendant des heures, il se retrouve à guetter un train dans lequel il pourra sauter, un train dont il ne connaît pas toujours la destination.

« Comme je n’avais aucune raison d’y aller, je me suis embarqué pour Cheyenne ».

Il doit aussi veiller à éviter les « bourrins » les forces de sécurité ferroviaire dont certains membres ont la violence plus que facile envers les hobos qui resquillent.

Le but de Vollmann, comme celui de nombreux hobos qu’il croisera, et avec lequel il fera un bout de route, est d’atteindre « le Grand Partout », où se trouve la légendaire Montagne Froide, lieu mythique décrit par des sages chinois … mais qui ne pourrait s’avérer qu’un leurre.

La couleur de la nuit, Madison Smartt Bell

Ecrit par Yann Suty , le Vendredi, 21 Octobre 2011. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, La rentrée littéraire

La couleur de la nuit (Color of night) (2011) 240 p. 22 € Traduit de l’américain par Pierre Girard . Ecrivain(s): Madison Smartt Bell Edition: Actes Sud

 

Mettons de côté ce titre, La couleur de la nuit (Color of night en VO), le même que celui d’un mémorable nanar avec Bruce Willis et Jane March. Titre aussi un peu bateau, aux allures de déjà vu et qui ne rend pas tout à fait compte de la teneur de ce petit joyau noir, très noir.

Les attentats du 11 septembre 2001 font replonger Mae dans son passé. Devant sa télé, elle reconnaît Laurel, son amour de jeunesse, avec laquelle elle a perdu contact depuis plus de trente ans. Elle se passe dès lors en boucle les images de l’apocalypse new-yorkais et ne songe qu’à retrouver son ancienne amie.

Les images de Laurel réveillent également la mémoire de Mae. Elle se rappelle cette époque flower power, au moment où les deux femmes s’étaient rencontrées. Elles avaient finies par se retrouver membres d’une secte, dirigée par D, « le visage de Dieu parmi nous », « notre père, notre mère à tous ». Entre deux partouzes et trips hallucinatoires, à ne plus savoir distinguer la réalité, ni qui est qui, ils partaient dans des virées meurtrières ne rappelant que trop celles de Charles Manson et de sa bande, comme le meurtre de Sharon Tate, la femme de Roman Polanski, alors enceinte.