Campagne perdue, « certes, mais une campagne transfigurée par le poème, et par là retrouvée, au moins pour un temps », comme l’écrit si justement Stéphane Pétermann dans sa postface. Postface dans laquelle il explique aussi que ce livre, paru en 1972, fut le résultat d’une longue genèse, les premiers jalons ayant été posés en 1933, à la mort de la mère de Gustave Roud, mais ce n’est que 30 ans plus tard qu’un projet littéraire, qui nécessitera encore de longues années de décantation, aboutira à une première publication à la Bibliothèque des Arts de Lausanne, en avril 1972 donc.
Campagne perdue est un tissage de proses écrites dans le Journal de l’auteur entre 1918 et 1963 avec des poèmes ayant paru pour la plupart en revues entre 1919 et 1957, des écrits glanés par le poète en marche à travers le Haut-Jura, sous le regard lointain de ses ancêtres paysans du côté maternel. En marche aussi à travers le temps, un demi-siècle qui a transformé les paysages et les hommes qui les habitent et les travaillent. Campagne perdue est un vibrant hommage à tous ces travailleurs et tout particulièrement aux laboureurs, aux faucheurs qui sous sa plume s’auréolent d’une lumière quasi sacralisée. La beauté de ces hommes, qui sont au centre de l’attention de l’auteur – qui a d’ailleurs pas mal photographié ces vigoureux corps paysans – y est soulignée, subtilement érotisée même.