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Les Livres

La Cathédrale des noirs, Marcial Gala (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 13 Décembre 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

La Cathédrale des noirs, Marcial Gala, Belleville éditions, octobre 2021, trad. espagnol (Cuba) Maïra Muchnik, 240 pages, 19 €

 

« SI T’ATTERRIS ICI, C’EST POUR LA VIE, quelqu’un l’avait écrit sur le mur d’une maison, et c’est vrai que le quartier était chaud, vraiment chaud »

 

D’une construction fort originale, La Cathédrale des noirs, avec ses airs de simplicité et son humour caustique de quartier populaire, se bâtit sur une succession de témoignages qui dessine de plus en plus clairement une réalité trash et sanglante. Nous sommes à Cienfuegos, la « perle de Cuba », sa fameuse baie et ses plages adulées par le touriste, mais dans La Cathédrale des noirs, nous ne verrons pas la plage, juste quelques virées au quartier blanc de Punta Gorda pour y vendre de la viande et quelle viande !

Les faits qui sont au cœur de ce roman se déroulent à Punta Gotica, quartier pauvre, quartier noir, avenir barré, vilaines combines, drogue, alcool, sorcellerie, putes et criminalité. Punta Gotica est un quartier où on pisse sur la tête de l’ennemi vaincu.

Ainsi parlait Pétrarque, Dits et maximes de vie (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 13 Décembre 2021. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Anthologie, Italie

Ainsi parlait Pétrarque, Dits et maximes de vie, François Pétrarque, éditions Arfuyen, octobre 2021, trad. italien et latin, Antoine de Rosny, 169 pages, 14 €

 

Écriture universelle

Découvrir l’axiologie de Pétrarque est une grande joie littéraire et philosophique. Car cette lecture nous replace au cœur de ce que l’on nomme la sagesse gréco-latine. Tout ici émane du parfum subtil de notre vieil humanisme de la Renaissance – si l’on considère le trecento comme ouvrant sur la Renaissance Italienne. L’homme occidental est défini lui aussi, bien après, par Montaigne et la valeur qu’il donne à « L’Honnête homme », et par l’invention au siècle suivant de la perspective (avec Masaccio). En tous les cas, la poésie change, se transforme, quitte l’emprise féodale et la chanson des troubadours par exemple, pour explorer des sentiers neufs (comme le fait parallèlement Dante Alighieri). Il y a certainement la conscience de l’éclosion d’un nouvel homme – à l’image peut-être de notre temps où l’on ressent la fin d’une conception anthropologique pour une autre acception.

Hospitalité des gouffres, Réginald Gaillard (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 10 Décembre 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Poésie

Hospitalité des gouffres, éd. Ad Solem, novembre 2020, 128 pages, 17 € . Ecrivain(s): Réginald Gaillard

 

Doublement fêté par le Prix Max-Jacob et le Prix Verlaine de l’Académie française, Hospitalité des gouffres, préfacé par Jean-Yves Masson, est un grand livre. L’oxymore du titre dit assez la conscience poétique de son auteur, près d’affronter les affres de l’enfance comme les promesses « à la cendre ».

Si les ténèbres « rôdent », il y a foi en la force même du vers « qui persiste dans le crâne », telle une lumière. Il faut porter des fardeaux, et « les temps sont courts » ; il faut user de légèreté pour saisir « une main qui soulève la tempête du salut ». Atteindre « l’arbre de vie » : tel est le vœu de ce livre fortement architecturé. Entre désir, constat, souhait et espérance.

Le « gouffre » était là, loin dans le temps, au temps des femmes de l’enfance. « Un enfant de ferme désormais seul » pleure ses « terres jurassiennes ». Un poète rameute le meilleur, quitte à énoncer ces blessures sans repos, sans répit.

Nous voilà lecteur hôte des gouffres !

Lignes de crêtes, Promenades littéraires en montagne, Collectif (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Vendredi, 10 Décembre 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Anthologie, Editions Noir sur Blanc

Lignes de crêtes, Collectif, mai 2021, 296 pages, 29 € Edition: Editions Noir sur Blanc

Excellente idée que celle des Éditions Noir sur Blanc, de marier anthologie littéraire et guide touristique ; encore ce dernier adjectif est-il peut-être mal choisi, car on n’imagine guère des personnes âgées en tenues courtes venir par autocars entiers pour effectuer ces itinéraires, dont certains ne semblent pas vraiment faciles. Précisons encore que les montagnes sont celles de la Suisse, pays bien pourvu dans ce domaine, et les écrivains avant tout ceux de la Confédération, également bien pourvue, ce que la France et l’Allemagne voisines ignorent en général (la littérature helvète étant au moins bilingue). Cela dit, on croise également au fil des pages et des cimes des écrivains aussi divers que Hegel, D. H. Lawrence, Mark Twain, Rimbaud, Herman Melville, André Maurois, Chateaubriand, Musil, Tolkien (qui, comme il le reconnut dans une lettre, s’inspira des paysages suisses pour ses contrées fantastiques), Amiel, Maupassant, Proust, Goethe, James Baldwin ou Paul Celan. Sans qu’elle s’en vante outre mesure, la Suisse se trouve au centre de l’Europe et, avec son mélange de langues allemande, française et italienne, constitue un microcosme du continent entier, une autre « terre du milieu », une Mitteleuropa paisible. Nombreux furent les écrivains qui ne s’y trompèrent pas. De plus, la Confédération offrait un îlot de paix et de stabilité politique au milieu des conflits incessants et des révolutions en tous genres.

Portraits de pessimistes, De Shakespeare à Schopenhauer, Paul-Armand Challemel-Lacour (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Jeudi, 09 Décembre 2021. , dans Les Livres, Recensions, Essais, La Une Livres, Editions des Instants

Portraits de pessimistes, De Shakespeare à Schopenhauer, Paul-Armand Challemel-Lacour, Editions des Instants, octobre 2021, 168 pages, 15 € Edition: Editions des Instants

 

Une joviale lucidité.

La fréquentation des pessimistes avec leur âpre lucidité entraîne-t-elle immanquablement l’affliction, le désespoir ou un sentiment de déréliction ? On pourrait le croire. Mais étrangement, on tire de leur lecture quelque chose de revigorant. C’est comme toucher du pied le fond d’une eau noire et profonde et d’un coup de talon rebondir et resurgir vers la surface. Il est bon quelquefois de ruminer des idées sombres pour mieux s’en défaire, de ronger la corde de la mélancolie et de se tourmenter avec de douloureuses interrogations sur la difficulté d’être pour retrouver ensuite plus fortement le goût de vivre et le désir de la lutte. Chez les pessimistes, comme l’écrit Nietzsche dans ses Considérations inactuelles, on éprouve « une joviale lucidité » qui a le don de rendre serein. Une sorte de bonne santé qui naît au contact des miasmes des pensées amères et maussades C’est ce que l’on ressent en lisant le livre de Challemel-Lacour, Portraits de pessimistes, de Shakespeare à Schopenhauer, publié aux Editions des Instants.