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Les Livres

Disputes au sommet, Ismail Kadaré (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Lundi, 07 Mars 2022. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, Récits, Fayard, Histoire

Disputes au sommet, janvier 2022, trad. albanais, Tedi Papavrami, 216 pages, 19 € . Ecrivain(s): Ismail Kadaré Edition: Fayard

 

Le sous-titre Investigations définit précisément le contenu et le dessein de cet ouvrage de l’écrivain albanais pressenti à plusieurs reprises pour le Nobel de littérature, ce à quoi il est fait allusion de façon récurrente dans le fil de ce récit, cette potentialité, qui lui a valu quelques tracasseries de la part des autorités de son pays, ayant un rapport étroit avec « l’affaire ».

« L’affaire » en question, sujet passionnant, présenté comme unique préoccupation de cette œuvre singulière de Kadaré, n’est autre qu’un entretien téléphonique de trois minutes ayant eu lieu en juin 1934 entre Staline et Pasternak à propos de l’arrestation de Mandelstam.

L’auteur analyse l’une après l’autre pas moins de treize versions peu ou prou connues de cette conversation, chacune rapportée tantôt par des témoins directs ou présupposés, ou se prétendant tels, tantôt par des protagonistes évoluant dans la sphère politico-littéraire entourant Pasternak et Mandelstam.

« Des treize versions que je possédais, chacune tentait, solitaire et butée, de livrer la vérité ».

Le Livre de ma jungle, Alice de Nussy, Estelle Billon-Spagnol (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Lundi, 07 Mars 2022. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Grasset, Jeunesse

Le Livre de ma jungle, Alice de Nussy, Estelle Billon-Spagnol, Grasset-Jeunesse, janvier 2022, 32 pages, relié 275x225 mm, 14,90 € Edition: Grasset

 

En toute liberté dans la forêt

L’album pour les tout petits intitulé Le Livre de ma jungle foisonne de fleurs, de fruits, de verdure, d’animaux divers (mammifères, insectes et espèces vivipares, serpents), représentés dans des tableaux pleine page. Ce bel ouvrage est conçu à l’unisson par deux auteures et illustratrices, Alice de Nussy, graphiste et directrice artistique, et Estelle Billon-Spagnol, laquelle, après des études de droit pénal, a publié une vingtaine de livres. Dans les pages de garde l’on retrouve imprimée la scène loufoque et joyeuse de la couverture. L’extravagance est le fin mot pour qualifier le rendu plastique. L’imaginaire de l’enfant va ainsi être abondamment sollicité par les mille et un détails fantaisistes aux tons plus sémillants les uns que les autres.

Blond comme les blés, Sjón (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 07 Mars 2022. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Métailié

Blond comme les blés, Sjón, éditions Métailié, janvier 2022, 119 pages, 16 €


100 pages pour se souvenir – exactement parallèle à la lecture – que les pays du Nord ont recelé, et subissent encore nombre de groupuscules d’activistes d’Extrême Droite, et autres engeances néo-nazis. 100 pages pour que l’Histoire la plus noire de l’Europe contemporaine sonne à notre mémoire : le Nazisme en marche était – aussi – un monde industrieux, minutieux dans le travail, un monde d’ingénieurs/ouvriers passe partout, qui avançaient la besogne à l’ombre de cahiers des charges dûment remplis, dont celui de la Shoah elle-même ! 100 pages, pour enfin clignoter sur notre actualité la plus brûlante, celle des populismes en action, et des propos inouïs de candidats à des présidentielles sur des terres de longue tradition démocratiques dans la vieille Europe… immanquablement, c’est un autre blond comme les blés qui s’invite en sinistre mémoire, cet Anders Breivik qui faucha 70 jeunes travaillistes norvégiens l’été 2011.

Dans la tanière du tigre, Nicolas Idier (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 04 Mars 2022. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Stock

Dans la tanière du tigre, janvier 2022, 300 pages, 20 € . Ecrivain(s): Nicolas Idier Edition: Stock

 

« Reclus dans ma chambre de luxe, avec son ventilateur au plafond digne d’India Song de Marguerite Duras, je sens cette vibration permanente que rien n’arrête. Immobile, séquestré dans un palace, à l’agonie, j’intègre Delhi à mon système nerveux. Le virus de la ville est inoculé. Je me sens capable de sortir d’ici ».

Depuis le premier février, nous sommes entrés dans le Nouvel An Chinois et dans l’année du Tigre d’Eau. Un Tigre plus sage que les autres Tigres de l’astrologie chinoise, mais tout aussi fort, associé à l’eau, il annonce une année de transformations, de maturité et de profondes émotions. Le nouveau roman de Nicolas Idier est à sa manière un Tigre d’eau. La tanière où se glisse cet impressionnant roman d’émotions profondes, n’est pas chinoise mais indienne, mais les Tigres y règnent. C’est une Inde en feu que découvre le diplomate, il y marche sur les traces des grands écrivains voyageurs, qui s’éprennent de la vie qu’ils découvrent, tout en témoignant des horreurs qui assombrissent leur ciel. Un feu alimenté par le nationalisme électrisant de Narendra Modi, qualifié de « boucher de Gujarat » où des indouistes fondamentalistes ont massacré plusieurs centaines de musulmans en représailles à l’incendie criminel d’un train de pèlerins hindous.

À la recherche de Céleste Albaret, Laure Hillerin (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Vendredi, 04 Mars 2022. , dans Les Livres, Recensions, Essais, La Une Livres, Flammarion

À la recherche de Céleste Albaret, Laure Hillerin, septembre 2021, 510 pages, 23,90 € Edition: Flammarion

 

C’est d’abord avec réflexion et circonspection, puis résolue que Célestine, dite Céleste, Gineste, née en 1891, épousera le 28 mars 1913 Odilon Albaret, chauffeur de taxi de son état. Lorsque la grande jeune femme d’un mètre soixante-douze un peu languide, apathique, est menée par son frère Paul à l’autel, elle ne sait pas quel est l’auteur du « petit bleu » que le facteur vient de remettre à Odilon dans l’église pour le féliciter de ce mariage. Elle l’apprendra plus tard, quand transportée d’Auxillac, dans la haute vallée du Lot, non loin du Gévaudan, à Paris, boulevard Haussmann, « Nymphe superbe et paisible, endormie au sein de sa chrysalide », elle fera la connaissance d’un « Marcel Proust, en négligé décoiffé et sans barbe ».

Proust lui confiera d’abord un travail de coursière, elle devra livrer aux amis de Monsieur les premiers exemplaires de Du côté de chez Swann. Elle apprendra à connaître un peu de Paris, la parcourant à pied, en taxi, en transport en commun. Entre ses livraisons, elle restera à attendre dans la cuisine du boulevard Haussmann que l’on ait besoin d’elle.