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La Une CED

Un honnête homme, Isabelle Flaten (par Pierrette Epsztein)

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Lundi, 05 Juin 2023. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Roman, Anne Carrière

Un honnête homme, Isabelle Flaten, éditions Anne Carrière, mars 2023, 224 pages, 19 €

 

À chaque roman, Isabelle Flaten s’autorise une nouvelle expérience, une nouvelle exploration, une nouvelle écriture. Donc, à chaque fois, ses lecteurs fidèles s’attendent à une aventure inédite et se laissent surprendre. Dans cet ouvrage qui fait partie intégrante de notre patrimoine, elle assume avec hardiesse le risque de puiser dans la bibliothèque du monde pour inventer une nouvelle version d’un roman emblématique : Madame Bovary. Par là-même, elle pointe toutes les contradictions de son créateur originel qui critique son époque tout en s’y complaisant.

Dans sa dernière publication, Un honnête homme, publié pour la première fois aux éditions Anne Carrière en 2023, l’écrivain exerce avec talent sa liberté de penser. D’emblée, le titre nous annonce la suite. Elle va donner consistance à un personnage de l’ombre, un simple « officier de santé », celui de Charles Bovary, un antihéros. Elle va prendre le contre-pied de Flaubert qui fait de Charles un portrait peu valorisant. Elle choisit celui-ci délibérément pour en dessiner un portrait complexe loin de la médiocrité où son précurseur l’avait cantonné qui l’avait délibérément affublé d’un nom ridicule proche du bovin.

Le Livre, Gérard Pfister (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mercredi, 31 Mai 2023. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Poésie

Le Livre, Gérard Pfister, éd. Arfuyen, mars 2023, 228 pages, 17 €

 

Nous croyons décrire une réalité, nous en créons une autre. Nous croyons parler des choses, les mots parlent d’eux-mêmes.

Gérard Pfister

Expérience

Expérience, tel est le livre, Le Livre. Un approfondissement, un creusement que le poète opère dans son langage poétique, offrant une vision des gouffres, mots incandescents devant la pensée, ou pensée incandescente qui trouve issue dans la langue du poète ; voilà le destin du poète. Le lecteur ainsi est confronté à une vérité de la forme. Cette poésie est adressée aux idées telles que les présente Platon dans sa fameuse caverne. Donc images, ou plutôt fondements de l’image, quintessence de l’image, signe absolu. Difficile sujet. Les mots du Livre sont maux humains. Sont mots humains.

Aloha (par Sandrine Ferron-Veillard)

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Mardi, 30 Mai 2023. , dans La Une CED, Ecriture, Récits

 

Amis Français d’ici ou d’ailleurs, good morning ! Je suis à peu près sûre que vous ne savez pas situer sur une carte, Kalapana, Pahoa, Big Island. Quand même ! Hawaii. Ça y est, vous y êtes ! Appelée aussi Le Nombril du Monde. Kalapana, c’est assurément le bout du monde. J’y suis allée pour écrire. Et au bout de deux jours, j’ai cherché s’il n’y avait pas un cimetière d’écrivains Français. Epitaphe : ils n’y ont pas survécu.

À l’isolement.

Davantage qu’aux coulées de lave du volcan qui, depuis trente-cinq ans, assure à Kalapana, à peu près tous les quatre à huit ans (petite prédilection à creuser pour les chiffres pairs) un spectacle pyrotechnique des plus réussis. Résultat : il faut tout reconstruire.

Le Roitelet, Jean-François Beauchemin (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 26 Mai 2023. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Le Roitelet, Jean-François Beauchemin, Éditions Québec Amérique, janvier 2023, 144 pages, 16 €

« À ce moment je me suis dit pour la première fois qu’il ressemblait, avec ses cheveux courts aux vifs reflets mordorés, à ce petit oiseau délicat, le roitelet, dont le dessus de la tête est éclaboussé d’une tache jaune. Oui, c’est ça : mon frère devenait peu à peu un roitelet, un oiseau fragile dont l’or et la lumière de l’esprit s’échappaient par le haut de la tête. Je me souvenais aussi que le mot roitelet désignait un roi au pouvoir très faible, voire nul, régnant sur un pays sans prestige, un pays de songes et de chimères, pourrait-on dire.

Une semaine plus tard, tandis que nous nous amusions à sauter du petit quai aménagé sur la rive de l’Étang-aux-Oies, mon frère a éprouvé un bref malaise qui durant quatre ou cinq secondes lui a fait perdre conscience. J’ai vu ce corps déjà vigoureux s’enfoncer comme une pierre dans l’eau bleutée. Quelques mouvements de brasse ont suffi pour le rejoindre. Il ne m’a pas été tellement plus difficile de l’agripper et de le ramener, sain et sauf, sur la plage. Mais les paroles qu’il m’a soufflées à l’oreille dès son retour à la vie consciente demeureront elles aussi à jamais inscrites sur le petit tableau noir accroché au fond de ma mémoire : “Pourquoi m’as-tu sauvé ?” a-t-il dit. Et c’était comme si j’avais ramené à la vie un fantôme dont les chaînes allaient tinter, désormais, dans les moindres recoins de ma vie, de ma raison, et derrière chacun de mes pas » (p.14).

Un refuge autre que l’exil, Theombogü (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 24 Mai 2023. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Poésie

Un refuge autre que l’exil, Theombogü, Éditions du Cygne, Coll. Voix au poème, février 2023, 60 pages, 10 €

 

Dès le début, avec un texte d’ouverture dédié au « pays » (le Cameroun), le lecteur comprend que l’exil était acté pour l’auteur de ce livre publié aux éditions du Cygne. Au fil des pages l’on entend le cœur d’un homme terrassé par la terreur, aux « frontières de cet immense pays tracées avec le sang des dominés subversifs » :

Au départ…

Ce n’était qu’une grève, une protestation, une revendication…

Et ils sont venus avec leurs armes. Ils ont demandé à tout le monde de se mettre à plat ventre, les deux mains posées sur la nuque.

Ils ont tiré… tiré… tiré… Huit cent mille déplacés… Quatre cent mille exilés… Quinze mille prisonniers… Cent mille morts…