Dans son dernier roman, Tous les mots qu’on ne s’est pas dits, Mabrouck Rachedi nous fait pénétrer au centre d’une famille nombreuse issue de l’émigration, la famille Asraoui, dont il va scruter toutes les contradictions avec l’attention d’un entomologiste. Le récit est écrit à la première personne. Le narrateur, appelé dans sa famille « le petit Malik », est un observateur méticuleux des remous interfamiliaux. Il utilise le « je » pour que le lecteur puisse s’identifier aux personnages. On peut parler d’un long monologue intérieur tourmenté. Pour cela le narrateur va entrer dans la peau de chacun.
À certains moments, il délègue le soin de raconter à un tiers qui s’empare alors d’un épisode précis du périple. Comme dans le théâtre classique, il va opter pour l’unité de lieu : une péniche, louée un soir par le frère du milieu qui n’a pas lésiné sur la dépense, façon pour lui d’affirmer sa légitimité et sa toute puissance en exhibant une réussite éclatante. L’unité de temps sera concentrée dans cette seule soirée. Cependant, cela sera le moment pour le narrateur de pratiquer le retour en arrière afin de remonter le temps et de revisiter son existence et celle de sa famille.