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L’enfant thérapeute, Samuel Dock (par Pierrette Epsztein)

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Jeudi, 29 Juin 2023. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

L’enfant thérapeute, Samuel Dock, éditions Plon, janvier 2023, 333 pages, 20,90 €

Dans son dernier ouvrage dédié à Sœur Térèse, celle qui a su protéger la mère, et à Frédéric, le thérapeute de Samuel, L’Enfant thérapeute, que certains pourraient assimiler à une autobiographie ou à une autofiction alors qu’en fait il s’agit, de notre point de vue, d’un véritable roman, Samuel Dock aborde un sujet épineux qui peut paraître éprouvant à certains lecteurs. Alors comment se fait-il que ceux qui s’y risquent peuvent prendre un tel plaisir à cette lecture ? Et qu’est-ce qui nous permet d’affirmer que ce texte a toutes les caractéristiques propres à une fiction ? La seule explication que nous pouvons avancer est que ce qui, nous, nous importe et nous emporte, c’est la qualité incontestable de l’écriture, la force des mots, les formules inédites, les oppositions puissantes, les anaphores, les insistances persistantes, les images insolites, sans omettre les constantes interrogations, les répétitions volontaires, les grossièretés délibérées, les phrases très courtes qui fouettent, les titres des chapitres qui édifient une armature. En mettant le sujet à une certaine distance afin d’éviter de tomber dans l’écueil de la lamentation, nous pénétrons au cœur du travail minutieux de broderie que Samuel effectue tout au long de ce récit. Il utilise toutes les ressources de la stylistique et de la syntaxe pour traduire au plus juste son propos de romancier. À chaque étape, l’auteur insuffle un mouvement dynamique dans ce qui aurait pu se noyer dans le macabre.

Sur Huysmans et une exposition (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mercredi, 28 Juin 2023. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

L’Œil de Huysmans, Manet, Degas, Moreau… Musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg, septembre 2021, 43 pages (hors-commerce)

 

« Concentrée, les yeux fixes, semblable à une somnambule, elle ne voit ni le tétrarque qui frémit, ni sa mère, la féroce Hérodias, qui la surveille »

(À Rebours, chapitre V (1884)).

 

1. L’œuvre de Huysmans n’est pas méconnue. Ses romans sont réédités avec constance, un volume de la Bibliothèque de la Pléiade lui a été consacré en 2019 et la Collection de Poche Poésie/Gallimard a rendu accessibles les poèmes en prose du Drageoir aux Épices et les Croquis parisiens.

Contrepoints, Lucien Noullez (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 26 Juin 2023. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Poésie

Contrepoints, Lucien Noullez, éd. Corlevour, mai 2023, 15 €

 

Souffle

Quand je dis souffle dans mon titre, il faut prendre ce mot à la lettre : la respiration humaine. De plus, le souffle de l’inspiration artistique est le souffle du poème, monde symbolique de la création. Donc expiration/inspiration dans la densité d’une écriture simple, presque naïve mais pleine de vitalité. Et si je peux filer la métaphore, je dirais souffle qui nécessite une excavation, là où l’inspiration fait poche. En fait, c’est comme aspirer et exhaler pour aller avec sagesse vers la mort, le dernier seuil. Un mouvement. Le besoin élémentaire de la vie, sans que l’on connaisse le travail de la respiration, qui, comme le cœur, est inconscient, non ressenti.

Je crois que le travail poétique revient à chercher dans le gouffre (l’inconscient du texte). Écrire de la poésie, c’est voir dans le gouffre, chercher dans le gouffre, aller vers le gouffre. Quoi de plus naturel dès lors que ce besoin de respirer, cette recherche pouvant se faire en apnée. Il suffit pour cela de se conformer au mouvement du souffle, à sa mécanique ondulatoire. Ici, au sein d’une écriture serrée, légèrement cursive, mais cultivée avec entrain, lucidité. Celle concernant la mort, essentiellement.

A propos de Wilderness, Lance Weller (par Sandrine-Jeanne Ferron-Veillard)

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Jeudi, 22 Juin 2023. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, USA, Roman, Gallmeister

Wilderness, Lance Weller, éd. Gallmeister, 2017, trad. américain François Happe, 346 pages, 10 €

 

De l’endroit où l’auteur écrit. Ou depuis lequel lire un livre. Sans doute cela modifie-t-il la lecture. L’impression. Créer une expérience de lecture. J’ai souhaité lire Wilderness sur l’île d’Hawaï, qu’ici, aux États-Unis, nous appelons Big Island. Big Island, tout simplement parce que c’est la plus grande de l’archipel. Parce que dans les îles dites Américaines, l’histoire n’est pas seulement écrite dans les livres, elle se vit quotidiennement. Elle suinte, elle déborde, elle est un marqueur. Émotionnel. Et dans la langue américaine, les mots sont pragmatiques. La pensée, factuelle. Ce sont des mots comme patrie, serment, camp, communauté, partisan. Des pensées comme autant d’images cinématographiques. Des gueules qui accrochent la cornée et leur histoire tatouée sur l’écran. Les rides, les cicatrices, les plaies comme autant de mots à traduire. Lire Wilderness, c’est assurément renouer avec ces termes-là. Leur application dans le monde dit réel.

À l’écoute du poème, La voix dans la voix, Revue L’Oreille voit, n°1, Éditions du Cygne (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 21 Juin 2023. , dans La Une CED, Les Chroniques, Poésie, Revues

À l’écoute du poème, La voix dans la voix, Revue L’Oreille voit, n°1, Éditions du Cygne, mai 2022, 70 pages, 12 €

L’Oreille voit n°1 publie Mathias Pérez, Serge Martin-Ritman, Laurent Mourey, Armand Dupuy, Cédric Le Penven, Yann Miralles, Frédéric Cosnier, Alexandra Anosova-Shahrezaie, Arnaud Le Vac.

Poème organique, Poésie torcheculative à la moelle gargantuesque, Écriture sensitive… Chant polyphonique énoncé par un sujet qui ne se saisit qu’au contact du Je avec l’Autre… Dire poétique qui prend corps et langage par la voix et résonne de bouche à Oreille par l’Oralité qui l’accouche, l’expulse du silence de sa nuit vers la lumière qui le façonne et le module à la mesure du monde qui l’accueille… Qui contesterait que la Voix poétique : Je-Poème-Proue de mille vaisseaux battant pavillon sur le sable échevelé et dans le sang lourd du monde, vertigineusement nous embarque dans une synesthésie sensorielle et spirituelle qui ouvre, à l’infinitième inconnue, la perspective de nos perceptions et fonde les poèmes-relation de nos vies par le passage qu’elle opère dans la langue de nos existences ?