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Récits

J'ai fait l'amour avec la femme de Dieu, Serge Gonat

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 10 Janvier 2013. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Québec, Myriapode

J’ai fait l’amour avec la femme de Dieu, octobre 2012, 204 p. 18 € . Ecrivain(s): Serge Gonat Edition: Myriapode

 

 

Récit fantastique ? Ecriture poétique délirante ? Conte de la folie peu ordinaire ?

Il y a un peu de tout cela dans cette histoire déroutante.

Bernardo, pieux puceau, vit à Quérouville, une société hors du temps où les règles du Bien et du Mal sont édictées par le mystérieux chef spirituel manichéen de l’Armée De Salut, un certain Lazard, qui s’évertue à détourner ses ouailles du péché de luxure.

Le Mal, le sexe en l’occurrence, est incarné, clame ce saint homme, par Madame Gilbert, la tentatrice, qui, en incitant Bernardo à lui faire la lecture des Onze mille verges d’Apollinaire, œuvre indexée comme satanique par Monseigneur Lazard, a pour dessein de le dévoyer et de l’amener à perdre avec elle son pucelage et davantage.

Les greniers de Babel, Jean-Marie Blas de Roblès

Ecrit par Anne Morin , le Lundi, 17 Décembre 2012. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Invenit

Les greniers de Babel, Invenit, collection Ekphrasis, 70 p.12 € . Ecrivain(s): Jean-Marie Blas de Roblès Edition: Invenit

Qui préside aux destinées qui se croisent dans cette Tour, dans cette représentation de la Tour par Bruegel dans laquelle Jean-Marie Blas de Roblès pénètre, apparemment sans effraction ? Quelle instance suprême préside à sa construction ? Est-elle même bien en construction ou en destruction, ruine de ce qu’elle a été, dont les ouvriers tels des Sisyphes sont condamnés à monter les pierres, puis à mourir sur elles, épuisés par la lourdeur de leur tâche ? Au dernier étage, encore inconçu, on meurt d’épuisement. Ce cimetière débouche sur des greniers à ciel ouvert, sorte de paradis après les ténèbres, la famine et l’incommunicabilité régnant aux étages inférieurs. Plus on monte, moins vastes sont les étages, plus la vie et la nourriture se raréfient. De loin en loin, une secousse plus ou moins violente abat une partie de la construction qui s’effondre debout, de l’intérieur. A quoi sert-il de noter sur les parois de la Tour, dans une obscurité trouée seule par la lueur des torches, des inscriptions pour la plupart dans des langues indéchiffrables ? Si ce n’est pour se prouver à soi-même qu’on est bien passé par là ? Qu’on a laissé une trace, sa trace, même si elle ne fait ni signe, ni sens. Cette Tour, symbole moins du temps qui passe, d’une impossible communauté, que d’une perpétuelle tentative d’évasion, que symbole de la réversibilité du temps : « Mon chamelier m’assure que la Tour existe de toute éternité, que ses ancêtres et les ancêtres de ses ancêtres la connaissent, et qu’elle fut non point bâtie, mais exhumée au cours des siècles précédents » (p. 19).

Le poète russe préfère les grands nègres, Edouard Limonov

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 14 Décembre 2012. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Russie, Flammarion

Le poète russe préfère les grands nègres, traduit du russe Emmanuelle Davidov, 2012, 329 p. 20 € . Ecrivain(s): Edouard Limonov Edition: Flammarion

 

La grande illusion…

Ce pourrait être un sous-titre pour ce roman âpre, violent, acide.

Mais c’est plutôt une immense désillusion que vit le poète russe Limonov, personnage éponyme de l’auteur.

Ecrivain contestataire dans la glorieuse Union des Républiques Socialistes Soviétiques, Limonov est « autorisé » à émigrer avec sa femme Elena aux Etats-Unis d’Amérique, la non moins glorieuse patrie des libertés, le pays porte-étendard du « Monde Libre ».

Il ne lui faut pas longtemps pour déchanter. Elena le quitte pour un homme au présent plus argenté et au futur matériellement plus confortable.

Le voilà, littéralement, anéanti :

Laisser les cendres s’envoler, Nathalie Rheims

Ecrit par Stéphane Bret , le Lundi, 10 Décembre 2012. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Biographie, Léo Scheer

Editions Léo Scheer, août 2012, 256 pages, 19 € . Ecrivain(s): Nathalie Rheims Edition: Léo Scheer

 

Comment amortir le choc consécutif au départ d’une mère du foyer familial lorsque l’on est âgée de 13 ans, et que l’on appartient à l’une des familles les plus prestigieuses d’Europe, les Rothschild, dont on découvre sans peine l’identité dans le récit de Nathalie Rheims, Laisser les cendres s’envoler, sans qu’elle mentionne leur nom dans l’ouvrage.

Le titre aurait pu être libellé à l’impératif, c’est l’infinitif du verbe qui est retenu, pour une raison simple : ce travail de deuil de la disparition de sa mère a été long, douloureux, source de recherches sur sa famille, sur les pratiques de cette dernière, sur ses ascendants. Il s’impose comme un constat à la fin du livre, et non comme un impératif.

Ainsi, Nathalie Rheims nous suggère-t-elle que sa mère, enfant elle-même issue du remariage de son grand-père, aurait été fragilisée dans l’atteinte de son propre équilibre affectif. Ce dernier, sa mère semble l’atteindre en tombant amoureuse d’un peintre prétendument avant-gardiste dont Nathalie Rheims tourne en dérision les prétentions, l’arrogance intellectuelle, et surtout la place qu’il prend dans la vie de sa mère, excessive à ses yeux, car provoquant son exclusion affective de la famille.

Scènes de la vie d'un propre à rien, Joseph von Eichendorff

Ecrit par Lionel Bedin , le Lundi, 19 Novembre 2012. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Phébus

Scènes de la vie d’un propre à rien, texte français de Madeleine Laval et Robert Sctrick . Ecrivain(s): Joseph von Eichendorff Edition: Phébus

 

Le voyage et l’amour : tels sont les deux sujets de ces Scènes de la vie d’un propre à rien, récit de Joseph von Eichendorff. Pour faire simple : Un « propre à rien » qui se dore au soleil pendant que son père s’épuise au moulin finit par partir sur les routes. Pour voir. Il devient jardinier, puis receveur dans un château viennois. Il tombe amoureux d’une femme qu’il pense inaccessible. Pour fuir l’amour, un seul remède : la route. Vers l’Italie. Après diverses aventures il revient à Vienne. Il apprend alors que rien ne s’oppose à ce qu’il retrouve la femme aimée.

Joseph von Eichendorff (1788-1857) est l’un des « romantiques allemands ». Il a mené une existence quasi insignifiante. Il a fait quelques voyages à travers l’Europe, mais a toujours rêvé de visiter l’Italie, pourtant décrite dans ces Scènes. Ce besoin de partir, de voyager, sera également transposé dans ses autres récits et ses poèmes, essentiellement centrés sur le vagabondage  et l’aventure, et qui ont servi à construire le mythe du Wanderer, ce voyageur lancé sur les « improbables chemins du monde ». Un ton léger, voire ironique, caractérise ce « désenchanté discret », frère de Nerval.