Présence du poème dans la vacuité de nos vies. « Qu’arrive-t-il quand rien ne se passe ? » La question, essentielle, se pose et résout ses entrelacs de tergiversations habituelles ou son élision, dans l’extraction vers le haut, du limon quotidien, opérée par ces poèmes écrits entre 2010 et 2014 par le poète Philippe Blondeau.
Œuvrant au laboratoire des dissections (Autopsie des temps morts, ainsi s’intitule ce recueil), la poésie inaugure une commémoration d’instants fugitifs mémorables ; exécuté sur le mode opératoire de l’invocation où le passé s’appelle et est interpellé, et sur le mode de la dérision (car l’auteur sait diluer dans l’humour nos concentrés de vies pressées par un temps volatile), le découpage d’un réel parfois tragique (ainsi la parenthèse d’un enterrement) restitue en les recollant, en les rassemblant, ces morceaux éparpillés de nos réels agencés à notre insu ou avec nous dans ces temps qui courent et qui – il le faut bien – s’arrêtent un jour, au bord de notre route (« (…) ce monde qu’il nous faut tenter de retenir car il nous quittera plus que nous le quitterons, nous qui ne cesserons jamais tout à fait d’être là, traces infimes et inutiles sans doute, mais présentes malgré tout, comme le poème précisément »).