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Poésie

"Birthday Letters" et "Contes d'Ovide" de Ted Hughes

, le Jeudi, 29 Septembre 2016. , dans Poésie, Les Livres, La Une Livres, Iles britanniques, Gallimard, Contes

Birthday Letters, trad. anglais et préface, Sylvie Doizelet, et Contes d’Ovide, Phébus, trad. anglais et présentation, Patrick Reumaux . Ecrivain(s): Ted Hughes Edition: Gallimard

 

Ted Hughes, né en 1930, marié à Sylvia Plath de 1956 jusqu’au suicide de celle-ci en 1963, poète officiel de la cour d’Angleterre, est l’une des grandes voix du vingtième siècle. La parution simultanée de ces deux recueils d’une rare densité, publiés peu avant sa mort survenue en 1998, atteste l’intérêt que lui porte l’édition française. Les Lettres d’anniversaire ont connu un succès sans précédent ; ces deux cent-trente pages-là se sont en effet vendues à cinq cent mille exemplaires, outre-Manche. Quant aux Contes, ils revisitent si bien tout ce que notre Occident répudie, le sacré par-dessus tête, qu’ils participent d’une nécessité en apparence distincte, mais tout aussi puissante.

Le suicide de la mère de ses deux enfants, à qui le poète dédie le monument funéraire que constituent ces Lettres, avait fait l’objet d’un silence irréfragable. Ce livre rompt trente-cinq ans de mutisme qu’aucun venin, aucune hyène n’avaient pu forcer. Mais la surprise, le goût pour le mystère dépecé n’expliquent pas à eux seuls un tel élan pour des poèmes. Si la lecture paraît à la portée de tous, le monde auquel renvoie celle-ci reste sans concession. Ces Lettres rebroussent la mort ; elles retrouvent la morte telle qu’elle n’a jamais cessé d’être aux yeux de ceux qui l’ont aimée : vivante. L’amour vibre et siffle entre les vers – seul oxygène que la mort ne ravit pas.

Derrière le dos de Dieu, Lorand Gaspar

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Samedi, 17 Septembre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Derrière le dos de Dieu, 111 pages, 14,90 € . Ecrivain(s): Lorand Gaspar Edition: Gallimard

 

Par le seul titre de son nouveau recueil de poèmes, qui s’inscrit dans l’œuvre complète de telle sorte qu’il semble inséparable du précédent recueil intitulé Patmos, et publié chez Gallimard en 2001, Lorand Gaspar parle tout à la fois de son goût pour Dieu et de son goût pour les voyages, l’un et l’autre se révélant inséparables.

En effet, « Derrière le dos de Dieu » est le « nom donné à cette région de la Transylvanie orientale où se situent les rudes villages des hauts plateaux des Carpates ». Les grands-parents de l’auteur viennent de cette belle région rocailleuse et inhumaine. D’où, peut-être, en partie, le goût de toujours de l’auteur pour l’austérité des déserts (la montagne et le désert étant plus proches qu’on pourrait le penser, l’un et l’autre forçant l’homme à ne s’intéresser qu’à son environnement, à cette chair de la terre qui prend soudain toute la place, physique et psychique).

A Oui, Boris Wolowiec

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 06 Septembre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

A Oui, Editions du Vide Immédiat, 2016, 432 pages, 20 € . Ecrivain(s): Boris Wolowiec

 

L’œuvre de Boris Wolowiec s’inscrit, quant à la structure, plus du côté de Levinas que de l’aphorisme. S’il reprend la formulation de ce dernier, c’est pour immédiatement le mettre an abîme afin de casser ce que ce type d’écriture a de trop fringant et de faussement définitif.

L’auteur ne pense et n’écrit jamais par idées distinctes et simples ou dichotomiques, mais par un feuilletage progressif fondé sur l’exactitude et l’épaisseur du sentiment. Il faut son tribunal de nécessaire déraison sans quoi tout jugement rationnel ne serait qu’une vue de l’esprit, une quintessence statique. A l’inverse, tout chez Wolowiec est en mouvement.

Les textes eux-mêmes ne cessent de muter et restent en état provisoire même lorsqu’ils paraissent définitifs. Proche d’un Michaux (l’ironie en moins), il démaquille les apparats. Si bien que l’aphorisme devient l’apostille qui évite les réductions simplistes au profit d’une diaphonie.

Dans ce livre, division du discours n’est qu’apparente : s’y instaure tout un jeu de « répons » visant à embrasser l’humain un peu à la manière dont Ponge embrasse les choses entre altération et confrontation.

Vitraux de songes, Francis Etienne Sicard Lundquist

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 30 Août 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Ipagination

Vitraux de songes, 2015, 132 pages, 13,60 € . Ecrivain(s): Francis Etienne Sicard Lundquist Edition: Ipagination

 

Cent vingt-et-un poèmes.

Cent vingt-et-un sonnets.

Cent vingt-et-un morceaux d’architecture.

 

Francis Sicard fait dans la dentelle (c’est un de ses termes récurrents).

Francis Sicard remet le sonnet à l’honneur.

Francis Sicard cisèle ses sonnets comme un orfèvre.

 

Les cent vingt-et-un sonnets de ce recueil ont tous exactement la même forme, exactement la même composition, exactement le même rythme.

Comme un rire de lumière, Charles Tomlinson

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Lundi, 29 Août 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques

Comme un rire de lumière, Éditions Caractères, édition bilingue, trad. anglais Michèle Duclos, préface Michael Edwards, dessins Charles Tomlinson, 128 pages, 20 € . Ecrivain(s): Charles Tomlinson

 

Michael Edwards constate avec justesse que la poésie de Tomlinson, « vibrant de tant de présences observées, élucidées et mises en œuvre, s’intéresse souvent […] à l’inaperçu et à l’absent ». Il n’est que de se reporter au poème « The Track of the Deer » (« La Trace du chevreuil ») pour s’en rendre compte.

 

… The track of the deer

That strayed last night into the garden,

Stops beneath the fruitless apple tree,

Shaped out and shimmering with that frost

You can feel here at the edge of all imaginings :