De silence et de chair, Valérie Fontalirant
De silence et de chair, juin 2016, 41 pages, 15 €
Ecrivain(s): Valérie Fontalirant Edition: Les Vanneaux
Le titre du recueil de Valérie Fontalirant aux éditions des Vanneaux fait appel aux sens avant même l’incipit où « les vents d’éther », par un jeu du lexique, surprennent d’emblée le lecteur. En même temps que le destinataire du texte, celui-ci voit et entend dans un monde en guerre passé au crible et où la matière se meurt : « plafond craquelé », « surface écaillée ».
La marche, métaphore de l’écriture, et ses « collets » est-elle une solution comme la symbiose à la terre jusqu’à « devenir limon » ? En effet, avec la présence quotidienne de la mendiante, elle conduit au Tiers-monde au milieu de « la rumeur de la faim ».
Pour montrer la résistance à cette misère, les verbes d’action s’énumèrent à l’infinitif dans des strophes en vers libres et aux mètres variés.
A la suite de cette réflexion surgissent la figure de « l’Autre » et, sournoise, la présence des mots du passé dont il faut « laisser (l’ombre) émerger ».
Face à des ennemis sans nom aux « mains assoiffées de pouvoir » la narratrice, celle qui fut « la fille de Minos », tente de survivre à la décomposition des choses et de retrouver le visage de l’alter ego, le sien peut-être. Et comme Bartleby de « Fuir, mais en fuyant, chercher une arme » (1).
Le jeu des pronoms personnels – un « tu », encore, est nommé « Pythie » – brouille l’énonciation et la 3° personne est sans aucun doute le double de celle qui erre jusqu’à l’arrêt, à la toute fin de l’opus, de sa marche.
Bien avant ce moment, la poète, aux prises avec le mal, tente de lutter grâce à ses mots : « tu frappes le silence / de verbes poreux » tout en sachant que cela ne suffit pas car « chaque lettre n’est qu’un mensonge ». Il reste le souvenir du contact avec les éléments, la « soumission / à la matière ».
Le lecteur attentif peut alors assister au combat ultime entre cette réalité extérieure et le « grondement intérieur » qui s’exprime ici.
Il importe – c’est le message du livre – de « contrer l’effroi et d’insuffler la parole ». Pour ce faire, que ce soit la nuit ou en plein jour, servent d’adjuvants la présence de l’auteure mais celle également de l’être aimé avec « ses humbles frissons ».
France Burghelle Rey
(1) Gilles Deleuze, Claire Parnet, Dialogues, Flammarion, 1974
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