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Les Livres

Les Agents, Grégoire Courtois (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 28 Novembre 2022. , dans Les Livres, Critiques, Science-fiction, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

Les Agents, Grégoire Courtois, Folio SF, septembre 2022, 320 pages, 8,90 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Allons au plus bref : ce roman est tout simplement illisible. Tâchons d’expliquer pourquoi, malgré l’envie de juste en rester à cette phrase.

L’histoire se déroule dans un futur indéterminé ; le narrateur appartient à une « guilde » réfugiée à l’étage 122 de la tour 135 du quartier sud d’une ville indéterminée. L’objectif ? Survivre dans un univers de données affichées sur écran, alors que d’autres guildes, survivant dans la même tour, tentent d’éliminer leurs concurrents, et que la rue est devenue un enfer ou une jungle, ou un truc du genre. Métaphore d’un capitalisme poussé à outrance, probablement ; contre-utopie où des lecteurs autrement complaisants liront une référence au Ubik de Philip K. Dick, on peut y songer par charité. Il doit y avoir de tout cela, et on aurait aimé voir où Courtois allait emmener le lecteur.

La vallée des papillons, Inger Christensen (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 28 Novembre 2022. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

La vallée des papillons, Inger Christensen, Poésie/Gallimard, septembre 2022, trad. Danois, Janine et Karl Poulsen, 304 pages, 10,80 €

 

Je pense une lumière

Quelle rencontre avec la poète Inger Christensen dont une traduction récente m’a permis de découvrir le travail ! À vrai dire, je m’y suis engouffré comme si cette écriture était mienne ; je me suis accaparé son style et son étrangeté – ici prise dans le sens de Freud, pour qui c’était le surgissement de l’inconnu dans du connu. Ces poèmes, où parfois l’on butte sur des choses peu identifiées, viennent à nous par une force disons, chtonienne, une force lointaine, souterraine, une prosodie remarquable justement grâce à des altérités, des images qui se répètent, qui finissent par s’enfouir dans l’esprit du lecteur comme une forme de présence d’âme, une correspondance d’âme à âme.

De plus, l’écoute de cette écriture reste labile, meuble, pénétrée d’un sentiment d’exploration, une aventure en profondeur dans l’abysse si dur de la langue poétique. Et sa langue réussit à capter, à retrancher un hors champ des poèmes pour retenir de toutes petites choses, des « je-ne-sais-quoi et le presque-rien » susceptible de nous introduire dans un esprit, comme on le ferait d’une chambre étrange.

Vagabonde, Fumiko Hayashi (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 25 Novembre 2022. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Biographie, Japon

Vagabonde, Fumiko Hayashi, éditions Vendémiaire, septembre 2022, trad. japonais, René de Ceccatty, 192 pages, 20 €

 

Fumiko Hayashi fut dans les années trente une romancière à succès. Née en 1903, elle mourut en 1951. Son parcours, presque invraisemblable, la conduisit à travers le Japon, dans des périples qui lui donnèrent matière poétique et romanesque. Quel destin, que ces aventures existentielles, sentimentales d’une écrivaine, issue d’un pauvre milieu, obstinée à devenir ce qu’elle fut, une romancière et une diariste exceptionnelle.

Le texte, que nous découvrons, appartient à la veine à la fois du récit de vie et de la chronique des jours. Tout y prend place : la quête du travail, de l’argent ; les relations avec ses parents ; celles avec ses partenaires (amants, mari). C’est relaté avec réalisme et poésie. Le récit se voit ainsi truffé de poèmes et de références.

Pierre Reverdy, Écrire, pour survivre, Roger Aïm / Julien Gracq, Prix Goncourt 1951, Histoire d’un refus (Essai), Roger Aïm (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 24 Novembre 2022. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Pierre Reverdy, Écrire, pour survivre, Roger Aïm, Éditions La Simarre, juin 2022, 132 pages, 15 €

Julien Gracq, Prix Goncourt 1951, Histoire d’un refus (Essai), Roger Aïm, Éditions La Simarre, août 2020, 75 pages, 13 €

 

« Écrire m’a sauvé – j’ai sauvé mon âme. Je ne peux pas imaginer ce qu’eût été ma vie si je n’avais pas écrit. Mais je crois que je ne suis ni un poète, ni un écrivain, ni un artiste. Mais un homme qui n’a pas trouvé d’autre moyen de garder le contact avec la vie, de surnager. J’ai écrit comme on s’accroche à une bouée » (Lettre de Pierre Reverdy à Jean Rousselot, 16 mai 1951).

« Dadaïste avant le mouvement Dada, surréaliste avant Breton, il s’inscrit dans la discipline constructive (Apollinaire) du cubisme. Même si plus tard il préserve ses relations avec les artistes surréalistes comme il l’avait fait avec les cubistes, sa trajectoire poétique originale sera autre, dans la solitude (Roger Aïm).

Face à la destruction, Psychanalyse en temps de guerre, Houria Abdelouahed (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 24 Novembre 2022. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Face à la destruction, Psychanalyse en temps de guerre, Houria Abdelouahed, éd. Des femmes-Antoinette Fouque, septembre 2022, 160 pages, 16 €

 

Au bord de l’indicible

Dans son ouvrage récent, Face à la destruction, Psychanalyse en temps de guerre, Houria Abdelouahed (professeure à l’université Sorbonne Paris Nord, psychanalyste, traductrice) soulève une question fondamentale : « Pourquoi un tel chaos et de quoi Daesh est-il la survivance ? ». Durant les douloureuses séances à l’écoute de ses patients lesquels « livrent en vrac les détails d’un quotidien désastreux et la lutte des individus face à la famine, l’humiliation et la mort », H. Abdelouahed note que « le corps de l’analyste devient le réceptacle du cru, de l’inassimilable ». En amont du spectacle monstrueux des corps déchiquetés en Syrie, par exemple, il y a planification et concepts déclencheurs de conflit, propagande, des idéologues et une adhésion à la guerre fratricide.