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Les Livres

Lorraine brûle, Jeanne Rivière (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mercredi, 05 Février 2025. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Gallimard

Lorraine brûle, Jeanne Rivière, Gallimard, Coll. Sygne, janvier 2025, 182 pages, 19 € Edition: Gallimard

 

Comment être au monde autrement, comment éviter le piège du conformisme rassurant mais ennuyeux ? Ce sont ces questions auxquelles tente de répondre l’auteure dans ce roman qui met en scène une narratrice qui semble toujours au bord du gouffre, sans cesse en quête d’un sens qui tarde à se faire jour, une quête perpétuelle pour échapper au pire, le piège du quotidien, du couple, de la famille…

Nous sommes, comme le titre le suggère, en Lorraine. La narratrice y vit, et la décrit d’une façon qui laisse peu de place au doute : « Metz ici Metz. On aime le crade. On érige le trash en esthétique. La turpitude est notre maison mère. On se pose des lapins, on se ment, on prend de la drogue en cachette. On fait des fanzines avec des emballages de boîtes de méthadone, on met en scène des cures de désintox. On a la gueule de bois rien qu’en passant devant un bar. On flirte un peu trop avec la mort ».

Intégrale H.P. Lovecraft, Tome 3, L’Affaire Charles Dexter Ward, Howard Philip Lovecraft (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 04 Février 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Fantastique, Folio (Gallimard)

Intégrale H.P. Lovecraft, Tome 3, L’Affaire Charles Dexter Ward, Howard Philip Lovecraft, Éditions Mnémos, mai 2022, trad. américain, David Camus, 168 pages, 19 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Resté inédit du vivant de Lovecraft, qui trouvait imparfait ce récit, son plus long, L’Affaire Charles Dexter Ward, publié pour la première fois dans la revue Weird Tales en 1941, est depuis considéré comme l’un des textes majeurs d’un auteur surtout connu pour sa mythologie autour de Cthulhu, cycle de fantasy horrifique qui a même inspiré des disques de rock progressif. Pour citer le docteur Willett dans une lettre publiée en fin de volume, ce roman est l’histoire d’un jeune homme qui « n’a jamais été un monstre, ni même vraiment un fou, mais seulement un garçon avide de découvertes, studieux et curieux, dont l’amour pour le mystère et le passé a causé la perte. Charles est tombé sur des choses qu’aucun mortel ne devrait connaître, et a remonté le temps plus loin qu’il n’est recommandé d’aller, vers ces années d’où quelque chose a surgi pour l’engloutir ».

Du fil à retordre, Michelle Gallen (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mardi, 04 Février 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, Joelle Losfeld

Du fil à retordre, Michelle Gallen, éditions Joëlle Losfeld, janvier 2025, trad. anglais (Irlande), Carine Chichereau, 352 pages, 25 € Edition: Joelle Losfeld

 

Une histoire irlandaise

Dans son nouveau roman, Du fil à retordre (Factory Girls), Michelle Gallen campe le portrait de Maeve, née en 1994 dans une petite ville de l’Irlande du Nord, qui s’exprime dans un idiome populaire anglo-irlandais, lequel forme une sorte de sociolecte qui permet de combattre l’anglais institutionnel. Le ton enlevé, revanchard mais spirituel est émaillé de propos non dénués d’humour (noir) permettant à la jeune fille de résister, de braver l’altérité, l’adversité (…) « ça lui foutait la gerbe de la voir fringuée comme ça, avec sa jupe droite beige et son chemisier en dentelle couleur crème. Putain, un chemisier ! Sûr que c’était sa mère qui l’avait habillée ». Brutalité rime avec précarité dans cet univers très dur. Le problème irlandais est évoqué sans ambages : « Et les frontières, ça a besoin de soldats. Plus y sont jeunes, plus y sont naïfs. C’est pour ça que les Rosbifs filent des armes à des gamins. L’IRA fait pareil. Parce que ça marche ».

Monsieur William, Dominic K. (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mardi, 04 Février 2025. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Jeunesse

Monsieur William, Dominic K., Editions Les Petites Moustaches, juin 2024, 96 pages, 14 €

 

La maison d’édition Les Petites Moustaches a créé la Collection 22H24 (en 2024) à partir d’un fait aussi réel que déconcertant : la porte d’entrée de l’éditrice craque chaque jour à 22h24.

A partir de cette information, l’auteur Dominic K. donne naissance au personnage de Monsieur William, 48 ans, encadreur de métier, qui habite dans une petite ville de l’Aquitaine, en bord de Garonne. Son quotidien est aussi réglé, aussi ascétique, que sa solitude semble profonde. Non pas qu’il soit parfaitement isolé : sa fille Jennifer lui rend régulièrement visite. Néanmoins, elle aura l’occasion de sentir l’inquiétude grandir face à l’obsession de son père, pour qui il deviendra impossible de voir ou d’entendre autrement qu’à travers son unique point de vue. Bien qu’ayant un ami lui suggérant de briser cette solitude rigide, Monsieur William ne semble, au long de son aventure intérieure, voué qu’à une seule compagne : sa porte d’entrée qui, chaque soir, craque de manière similaire et rigoureuse à 22h24. Tout en restant quelque peu préoccupé par sa santé, il développe une fidélité telle à ce phénomène qu’il lui paraît impensable d’être absent de sa maison à l’heure fatidique. Devient-il fou ?

L’après-exil, Georges-Arthur Goldschmidt (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 03 Février 2025. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Biographie, Récits, Verdier

L’après-exil, Georges-Arthur Goldschmidt, éd. Verdier, janvier 2025, trad. allemand, Jean-Yves Masson, 96 pages, 18,50 € Edition: Verdier

 

Les deux frères Goldschmidt, Juifs allemands, Erich, et son cadet de quatre ans, Georges-Arthur, ont dû quitter le pays natal et ont connu dès les années 1938/1939 l’exil. Plus de quatre-vingts ans après les faits, le second, devenu écrivain, relate cette période sombre où il faut fuir l’Allemagne, devenue meurtrière pour la communauté juive, et trouver refuge, d’abord en Italie, à Florence, puis en France, du côté de Chambéry.

Les toutes premières pages contribuent à cerner de manière précise, complexe, cette notion d’exil que l’auteur va véritablement éprouver dans sa chair d’exilé. Il faut, pour l’auteur de ces pages, passer au crible des définitions les seuls mots d’exil et d’après :

« Quiconque a été contraint à l’exil n’en sort plus de toute sa vie » (p.9).

« Vu de l’extérieur, l’exil semble être un événement anodin, minuscule, mais après lequel tout est irrémédiablement terminé » (p.14).