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Les Livres

Rimbaud est vivant, Luc Loiseaux (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 13 Février 2025. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Rimbaud est vivant, Luc Loiseaux, Gallimard, novembre 2024, 271 pages, 39 €

 

Encore Rimbaud ? Oui. À croire qu’il est devenu une tête de gondole pour les éditeurs. Sans doute parce que la version affadie, commerciale de son mythe, pour reprendre le titre d’un essai d’Étiemble ayant fait du bruit en son temps, séduit nos contemporains et correspond à leur vision de la poésie et d’une carrière de poète.

Un « hôtel littéraire » à son nom (quatre étoiles) s’est ouvert à Paris, il y a quelques années : son chiffre d’affaires est florissant, paraît-il. Tant mieux pour son propriétaire, et tant pis pour lui, Rimbaud, qui a souvent dormi dans des bouges. À Charleville, son souvenir est partout, entretenu avec un sens de la réclame aiguisé. Librairie Rimbaud. Collège Rimbaud. Boulangerie pâtisserie Rimbaud. Coiffeur barbier Rimbaud. Médiathèque « Voyelles ». « Cuvée d’Arthur », même (excellente bière, au demeurant, à déguster, Place Ducale, un jour point trop pluvieux, avec un boudin blanc de Rethel).

La porte étroite, André Gide (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 12 Février 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard), En Vitrine, Cette semaine

La porte étroite, André Gide, Folio, 182 pages Edition: Folio (Gallimard)

 

Un roman sublime est le mot qui s’impose à la lecture de cet ouvrage. Sublime dans toute sa polysémie, à la fois d’une beauté fabuleuse, d’une élévation d’âme absolue, d’une intensité incandescente et enfin le roman d’une sublimation amoureuse irrésistible vers l’Autre et vers Dieu. Alissa et Jérôme sont les doubles littéraires de Ada et Van (Ada ou l’ardeur, Vladimir Nabokov) qui, par le mécanisme puissant de la sublimation, transfèrent l’ardeur des sens vers l’ardeur des âmes. Dans les deux cas la quête suprême est l’absolu et pour Gide le chemin est celui d’un voyage intérieur. Dans un récit marqué par une tension extrême et continue, il tisse une histoire introspective qui met en jeu la possibilité de la pureté.

Aux élans irrépressibles du cœur de Jérôme répondent les passions spirituelles d’Alissa, l’un amoureux, l’autre extatique. Non qu’Alissa aime moins Jérôme que Jérôme aime Alissa mais les chemins de la passion diffèrent, plus amoureux pour l’un, plus mystiques pour l’autre comme une exigence intangible de pureté qui ne supporte aucune trace triviale. Ainsi Alissa :

Ann d’Angleterre, Julia Deck (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 12 Février 2025. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Seuil

Ann d’Angleterre, Julia Deck, Le Seuil, août 2024, 256 pages, 20 € . Ecrivain(s): Julia Deck Edition: Seuil

 

Entremêlant passé et présent d’une femme au grand âge, le roman, pour être largement autobiographique, découvre des pans entiers d’une vie qu’une fille aborde à propos de sa mère.

A 84 ans, Ann mène encore une vie autonome, faite de cours, de voyages, de lectures. Et puis, c’est l’AVC qui la rend dépendante, qui l’amène pour de longs mois à l’hôpital. Sa fille Julia se bat parce qu’elle croit intimement qu’elle va récupérer. C’est alors la litanie des passages d’une clinique l’autre, la recherche d’une maison de repos qui ne soit pas un mouroir.

A la sidération succède chez Julia, romancière, le sentiment de perdre quelqu’un qu’elle a toujours vu en grande forme.

La quête du passé très riche de la mère dévoile une personnalité féconde, intellectuelle, active. Venant d’un milieu défavorisé, Ann s’est battue elle aussi pour trouver sa place dans une société très marquée par les castes.

Photographies à l'Atelier Contemporain (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Mardi, 11 Février 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts, L'Atelier Contemporain

Edition: L'Atelier Contemporain

Hivernies, Patrick Bogner, L’Atelier contemporain, décembre 2024, 144 pages, 30 €

Les Oubliées, Stéphane Spach, Gilles Clément, L’Atelier contemporain, décembre 2024, 64 pages, 25 €

 

Le noir et blanc et son esthétique éloquente

On ne dira jamais assez le charme des photographies en noir et blanc. Dans ces images, il y a une force, une densité et une profondeur extraordinaires. Est-ce parce que l’œil ne se laisse pas distraire par les couleurs ? Ou bien est-ce que ce choix photographique contribue à épurer le sujet ? On a l’impression que de telles photographies font ressortir avec intensité le volume, les formes et le contraste des choses entre elles. On dira volontiers que le noir et blanc donne du relief, de la couleur au sujet photographié. C’est à ce genre de réflexion que l’on est conduit en ayant entre les mains deux ouvrages publiés par les éditions L’Atelier contemporain, Hivernies, de Pascal Bogner, et Les oubliées, de Stéphane Spach, ces deux albums, chacun à leur manière, sublimant l’art de la photographie en noir et blanc.

Ainsi parlait Colette, Gérard Pfister (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mardi, 11 Février 2025. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Ainsi parlait Colette, Gérard Pfister, Arfuyen, janvier 2025, Dits et maximes de vie choisis, 192 pages, 14

 

Le principe de cette collection (retenir d’abord les formules générales d’existence, collecter les « maximes de vie » d’un auteur) devait plutôt interdire à Colette d’y figurer – elle qui ne sait faire que dans l’immédiat, le menu, le profus et l’accident – mais le recours ici aux entretiens, à la correspondance, à son œuvre journalistique fait d’elle une sorte de philosophe obligée, qui l’aurait amusée et, de toute façon, nous enchante : peu familier de son œuvre, je note ici quelques raisons de m’être (profondément) attaché à ce recueil, libre et vif, comme elle.

« Nous ne sommes pas jolis, quand nous écrivons. L’un pince la bouche, l’autre se tète la langue, hausse une épaule ; combien se mordent l’intérieur de la joue, bourdonnent comme une messe, frottent du talon l’os de leur tibia ? Nous ne sommes pas – pas tous – élégants : la vieille robe de chambre a nos préférences, et la couverture de genoux, brodée à jours par les braises de cigarettes… » (fragment 319).