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Les Livres

Les Indignes, Agustina Bazterrica (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 29 Janvier 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Roman, Flammarion

Les Indignes, Agustina Bazterrica, Flammarion, janvier 2025, trad. espagnol (Argentine), Margot Nguyen Béraud, 190 pages, 21,50 € Edition: Flammarion

 

Atmosphère, atmosphère… Voilà un roman qui a vraiment une gueule d’atmosphère… nauséeuse.

L’histoire se situe quelque part au milieu de nulle part, dans une ère indéterminée que le lecteur est toutefois à même d’à peu près dater, en interprétant quelques éléments narratifs indiciels pseudo-historiques disséminés parcimonieusement, comme postérieure à une catastrophe apocalyptique provoquée par une humanité rapace ayant réussi à détruire la quasi-totalité des espèces végétales et animales et à provoquer presque intégralement l’extinction de son propre genre. La narratrice est l’une des résidentes, arrivée là après une longue errance, dont elle relate par ailleurs, histoire dans l’histoire, le cheminement aventureux dans un environnement désertique à ce point dévasté que, symptomatiquement, le mot « forêt » est systématiquement barré dans le texte lorsqu’il apparaît « accidentellement » sous la plume de cette chroniqueuse clandestine.

L’anniversaire de toutes les choses, Roxana Hashemi (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mercredi, 29 Janvier 2025. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

L’anniversaire de toutes les choses, Roxana Hashemi, Éditions Nous, novembre 2024, 96 pages, 14 €

 

Cette jeune poète a l’horreur facile :

« des spores fongiques sortiront de bouches âgées

à chaque expiration

les poumons ont commencé

la décomposition

une personne posera déjà son

bébé sur le compost » (p.23)

mais elle n’a l’horreur facile, que parce que l’horreur est réelle, et que la virtuosité de cette auteure saisit son réel par cœur. La preuve est qu’elle a tout aussi naturellement l’humour facile :

Trilogie d’une nuit d’hiver, Katherine Arden (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 28 Janvier 2025. , dans Les Livres, Critiques, Science-fiction, La Une Livres, USA, Roman, Folio (Gallimard)

Trilogie d’une nuit d’hiver : L’Ours et le rossignol (9,40 €), La Fille dans la tour (9,40 €), L’Hiver de la sorcière (9,90 €), Katherine Arden, Folio, mai 2024, trad. anglais (USA) Jacques Collin Edition: Folio (Gallimard)

 

L’Ours et le rossignol (9,40 €), La Fille dans la tour (9,40 €), L’Hiver de la sorcière (9,90 €), Katherine Arden, Folio, mai 2024, trad. anglais (USA) Jacques Collin

La Russie du XIVe siècle, sous les règnes successifs d’Ivan II et Dimitri Ier Donskoï : un double moment-clé dans l’histoire de ce pays destiné à devenir un empire. D’une part, la religion chrétienne prend peu à peu le pas sur le paganisme ; d’autre part, Dimitri, grand prince de Moscou et de Vladimir, prend son indépendance par rapport à la Horde d’or des Tatars, et remporte une victoire décisive lors de la bataille de Koulikovo. C’est ce cadre historique qu’a choisi Katherine Arden pour raconter sa Trilogie d’une nuit d’hiver, trois romans à lire d’une seule traite pour qui aime la fantasy.

Vibre, exquise nature ! selon Chardin, Alain Vircondelet (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 28 Janvier 2025. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Récits

Vibre, exquise nature ! selon Chardin, Alain Vircondelet, éditions Les Ateliers Henry Dougier, janvier 2025, 130 pages, 14,90 €

Durée

Oui, la durée est le maître mot de ce livre qui se propose, avec simplicité, de recourir à l’écriture pour en faire une escorte suffisante et le récit d’un tableau : Le Panier de fraises des bois, de Jean Siméon Chardin. Cette entreprise de lecture d’un chef d’œuvre est facile, vivante, argumentée comme en un sens l’est une biographie. Qui essaie de prendre à bras le corps le monde de la vanité du XVIIIème siècle.

Ce livre nous plonge dans un compotier de fraises sauvages afin de comprendre de l’intérieur – si je puis dire – ce qui est passage ou pérennité dans l’activité de toute vie humaine. Cette pyramide de fruits rouges nous permet de comprendre le but de la vie, à l’instar de la leçon que donnent ces fraises peintes, qui vraisemblablement seraient promises à une destruction naturelle, où ici elles se figent et tendent vers l’éternité. C’est en tout cas le flux logique de toute matière, sachant qu’ici c’est la peinture qui fait écran à la mort. Et si je dis la mort, il faut comprendre le temps. C’est à un archi-présent que nous avons à faire, au carrefour du fini et de l’infini, sorte de magie végétale métaphysique.

Lire les Rivières précédé de La Rivière des Parfums, Bernard Fournier (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 28 Janvier 2025. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Lire les Rivières précédé de La Rivière des Parfums, Bernard Fournier, Éditions Aspect, Coll. Folium, 2017, 14 €

Le poète Bernard Fournier poursuit sa quête de Réponses (Marches III, partie I), à l’écoute symbiotique du monde naturel qui l’environne, dépositaire de voix humbles ou enfouies auxquelles de prime abord on ne prête pas toujours attention. Ici la rivière prend le relais des pierres qui, Vigiles des villages, peuvent comme nous écouter l’univers, lorsqu’« elles veillent, / les yeux mi-clos sur leurs traits lapidaires / à l’écoute du bruissement des soies, des griffures d’insectes : froissements ou feulements de fauves ». S’il ne l’arraisonne pas complètement, l’homme qui marche (cf. Marches, éd. Aspect) gère son embarquement dans sa traversée du monde, afin de ne pas se perdre et pouvoir poursuivre sa destination. Et même si la poésie – cette nourriture des mots – pourrait éventuellement égarer son cap, il se préoccupe d’accomplir un destin davantage qu’un voyage : « Apprenons la patience des orages le long des routes et des rivages » écrit le poète. Savoir la terre, les arbres, les fleurs, ici les rivières, c’est, non seulement (re-)connaître le terroir et nos territoires mais aussi, écouter l’environnement et s’y accorder, notamment en célébrant par le chant poétique la symphonie polyphonique d’un Univers-Un.