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Monsieur William, Dominic K. (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon 04.02.25 dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Jeunesse

Monsieur William, Dominic K., Editions Les Petites Moustaches, juin 2024, 96 pages, 14 €

Monsieur William, Dominic K. (par François Baillon)

 

La maison d’édition Les Petites Moustaches a créé la Collection 22H24 (en 2024) à partir d’un fait aussi réel que déconcertant : la porte d’entrée de l’éditrice craque chaque jour à 22h24.

A partir de cette information, l’auteur Dominic K. donne naissance au personnage de Monsieur William, 48 ans, encadreur de métier, qui habite dans une petite ville de l’Aquitaine, en bord de Garonne. Son quotidien est aussi réglé, aussi ascétique, que sa solitude semble profonde. Non pas qu’il soit parfaitement isolé : sa fille Jennifer lui rend régulièrement visite. Néanmoins, elle aura l’occasion de sentir l’inquiétude grandir face à l’obsession de son père, pour qui il deviendra impossible de voir ou d’entendre autrement qu’à travers son unique point de vue. Bien qu’ayant un ami lui suggérant de briser cette solitude rigide, Monsieur William ne semble, au long de son aventure intérieure, voué qu’à une seule compagne : sa porte d’entrée qui, chaque soir, craque de manière similaire et rigoureuse à 22h24. Tout en restant quelque peu préoccupé par sa santé, il développe une fidélité telle à ce phénomène qu’il lui paraît impensable d’être absent de sa maison à l’heure fatidique. Devient-il fou ?

Ce récit ingénieux fait habilement trembler les frontières du surnaturel, nous tenant, nous lecteurs, devant une obsession virant au cauchemar plus que d’une hallucination. Nous évoluons à travers le personnage de Monsieur William (est-ce son nom ou son prénom ?), fascinant et inquiétant, comme à travers une ascension progressive vers la terreur, vers l’étouffement de soi – arrivé au sommet de cette ascension, il semble que seuls les murs d’une prison personnelle soient à trouver, des murs qui nous cernent avec trop peu de distance. Cependant, nous sommes aussi avec Monsieur William dans son atelier, dans ses promenades auprès de la Garonne qui le rassérènent, et dans sa lutte insoupçonnée contre les éléments naturels lorsque la nuit noire est tombée et l’effraye – un moment où, apparemment, il a voulu créer son propre piège.

Mystère et poésie sont parmi les caractéristiques de ce récit, dont le style est très fluide : la force du texte réside d’ailleurs dans son aspect simplement descriptif, épuré de tout effet sensationnel. Ainsi un fait anodin peut-il se transformer en énigme extraordinaire. Ainsi la personnalité de Monsieur William, qui voudrait se fondre dans la foule et le paysage, prend-elle une dimension qui nous interroge, imperceptiblement, puis qui nous stupéfie.

Notons que l’illustration de couverture, réalisée par Giordano Poloni, très stylisée, donne un rendu parfait de l’atmosphère de ce roman très court qui, en raison de ses questions psychologiques et de son style, s’adresse à des adolescents, mais également aux adultes.

 

François Baillon

 

De son vrai nom Dominic Rousseau, Dominic K. a été professeur des écoles à Bordeaux. Désormais, il se consacre entièrement à l’écriture et est l’auteur de plusieurs essais historiques, publiés en France et au Maroc. Monsieur William fait émerger l’étendue de sa palette, puisqu’il s’adonne également à la fiction littéraire.



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A propos du rédacteur

François Baillon

 

Diplômé en Lettres Modernes à la Sorbonne et ancien élève du Cours Florent, François Baillon a contribué à la revue de littérature Les Cahiers de la rue Ventura, entre 2010 et 2018, où certains de ses poèmes et proses poétiques ont paru. On retrouve également ses textes dans des revues comme Le Capital des Mots, ou Délits d’encre. En 2017, il publie le recueil poétique 17ème Arr. aux Editions Le Coudrier.