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Encres lacérées, Muriel Augry (poèmes), Philippe Bouret (encres) (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 08 Septembre 2021. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Poésie

Encres lacérées, Muriel Augry (poèmes), Philippe Bouret (encres), éditions CronEdit, 2020, trad. roumain, Valeriu Stancu, préface Emmanuel Pierrat, 62 pages, 12 €


La démarche diffère de celle poursuivie dans la plupart des créations littéraires du psychanalyste-auteur Philippe Bouret, à savoir qu’il s’agit avec Encres lacérées d’un accompagnement graphique de textes écrits postérieurement.

Muriel Augry – poétesse, essayiste et nouvelliste, distinguée en 1990 pour son essai Le cosmopolitisme dans les textes courts de Stendhal et Mérimée (éd. Slatkine) par le Prix Roland de Jouvenel de l’Académie française – a en effet, ici, écrit des poèmes à partir des Encres de Ph. Bouret.

La particularité de ce recueil consiste également dans une présentation bilingue des textes (français-roumain) – opus par ailleurs publié par des éditions sises à Iaşi en Roumanie où Muriel Augry dirige depuis 2019 l’Institut français de Roumanie.

Ad libitum (3/3) (par Isabelle Morino)

Ecrit par Isabelle Morino , le Mardi, 07 Septembre 2021. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

Quelques instants plus tard, le téléphone me prévenait : Nina venait d’être emportée sur une civière par les pompiers. Ils étaient en route pour l’hôpital, elle serait aux urgences dans une dizaine de minutes. Je restai interdit.

C’était le même coup de fil de Philippe, celui d’il y avait quelques heures, celui que j’avais reçu en plein boulevard Suchet. Sauf que j’étais chez moi. Je me précipitai à la Salpêtrière. On défibrillait son cœur. Mais cette fois, il se stabilisa et Nina resta en convalescence quelque temps, avant de quitter l’hôpital pour venir s’installer chez moi.

Aujourd’hui, Nina est à la maison. Hier aussi. Elle y est tous les jours. Son état lui interdit l’agitation, les mouvements de foule dans le métro. Son cœur est stable, mais il l’est par le truchement des pilules qu’elle avale à chaque repas. Elle doit consigner sa fréquence cardiaque et son pouls dans un journal, tous les jours. Elle est souvent prise d’étourdissements, elle a des chutes de tension inattendues. Je suis le seul à savoir combien son cœur est fragile. Elle a dû arrêter le travail et elle remplit régulièrement des papiers administratifs pour continuer à percevoir un salaire qui a diminué de moitié. La dépression la tient prisonnière des murs : elle ne sort que pour aller voir son médecin, poster ses arrêts maladie et récupérer de nouvelles plaquettes de bétabloquants et d’anti-dépresseurs. Parfois, vaincue, elle se les fait livrer.

La Vie d’un poète, Stefan Zweig (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 06 Septembre 2021. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

La Vie d’un poète, Stefan Zweig, éditions Arfuyen, juin 2021, trad. allemand, Marie-Thérèse Kieffer, 192 pages, 17 €

 

Porosité

J’utilise le mot porosité pour ouvrir ma chronique, car l’ensemble du livre présente un écrivain en contact avec la poésie, et ce faisant s’approche des affres et luttes au cœur de l’exercice poétique, et ainsi dénote d’un moment de basculement vers le travail du poète. Il en fait presque un soin, toujours est-il. Et je persiste à penser à la porosité de ces poèmes, sachant l’œuvre romanesque si importante ; or un poète se glisse dans cette prosodie et rend poreuse l’écriture du roman par la pratique du poème en vers ou en prose !

Je crois encore que la vérité est derrière ces espèces de lieder, un chant qui va et vient entre le roman et le dit, cet épanchement sur l’authenticité, une certaine pureté de l’expression que recherche Zweig, et qui agit très certainement sur son travail de romancier – d’où l’aspect poreux que j’évoque. Poreux à la véracité, à la musicalité, à la couleur et au ton d’une métrique contrôlée, exigeante, nécessaire. Ce travail lui permet de revenir vers lui, vers sa force, et là, dans cet espace littéraire, le poème vient rendre possible la gésine de l’œuvre totale.

Ceci n’est pas un miroir, Mokhtar Chaoui (par Yazid Daoud)

, le Vendredi, 03 Septembre 2021. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Ceci n’est pas un miroir, Mokhtar Chaoui, éditions SL

 

Un roman de l’innommable

La littérature est aussi l’expression des frustrations, des malheurs et des traumatismes. Le dernier roman de Mokhtar Chaoui est le seul à avoir abandonné la société marocaine et ses travers pour se consacrer à l’Homme. La pandémie a unifié la planète et le romancier parle ici au nom de tous. Ceci n’est pas un miroir est un roman-cri, un roman vociféré, écrit dans la précipitation, tel un grand emportement qui ne saurait être adouci. Les 13 jours d’écriture du roman expliquent son style plutôt oral. C’est un roman à lire à haute voix pour percevoir les sonorités colériques et le rythme haché qui n’est autre que celui de l’homme essoufflé par la pandémie.

Dans ce roman-miroir, l’auteur pousse à l’extrême les tracas d’un confiné. Nommé Ixe, il s’agit (comme pour le cas de sa femme Zède) de « numéros matricules » qui représentent les hommes en confinement. En effet, le roman n’a ni lieu ni temps (sauf celui du confinement). Ce no man’s land renvoie au monde de Borges où le lecteur est déboussolé, incapable de situer les personnages ni de prévoir l’intrigue.

Une goutte d’éternité, Alain Joubert (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 02 Septembre 2021. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Une goutte d’éternité, Alain Joubert, Editions Maurice Nadeau, Les Lettres Nouvelles, 2007, 124 pages, 16 €

 

Mort le 22 avril 2021, Alain Joubert restera dans l’histoire littéraire comme l’un des compagnons les plus fidèles et les plus actifs du mouvement surréaliste, dont il fut le chroniqueur régulier et l’un des plus grands historiens.

Dans ce roman autobiographique intimiste, le surréalisme avec ses soubresauts, ses événements, ses aléas, est à la fois la toile de fond et le destinateur ou pour le moins l’un des adjuvants primordiaux de la vie d’un couple qu’il a constamment accompagnée, animée et nourrie.

L’auteur narrateur, en effet y dévoile et y analyse la relation d’amour, d’affection, d’inaltérable affinité qu’il a vécue avec son épouse Nicole, dans le champ mouvant et tourmenté du surréalisme, jusqu’à l’ultime seconde de la vie de cette femme remarquable, poétesse, partie prenante et actrice inconditionnelle méconnue du mouvement littéraire.

Le livre se décline en trois parties.