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La Une CED

L’Origine des lèvres, Jacques Cauda (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 25 Juin 2024. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Poésie, Tarmac Editions

L’Origine des lèvres, Jacques Cauda, éditions Tarmac, mars 2024, 52 pages, 11,50 €

 

D’aucuns émettent l’idée qu’écrire proviendrait peut-être de la nécessité (compulsive) d’un règlement de compte déclenchant un processus de revanche sur la vie à s’offrir/souffrir – à se payer cash sans entrave – jusqu’à l’extase érotique du souffle, avec la dévoration/dévotion d’un ogre de malices et de sainteté dont, Vivant parmi les vivants, nous prenons toutes et tous plus ou moins le masque, à nous en arracher la face, dans l’excès même d’excéder selon G. Bataille. Bataille : nous y revoilà ! « Bataille pour livrer “bataille” », écrit Cauda… Bataille et Cauda semblent se rejoindre là dans l’entreprise scripturale/scripturaire sacrale, à faire de l’expérience biographique à la fois sacrée et « tache aveugle », une donnée anthropologique mettant la question du reste (reliquat), produit de l’excès humain, au centre de ce qu’est l’homme. Ecce homo c/o Cauda remet à l’art du « peindrécrire » le pouvoir, par la fiction ou la (Sur)figuration, de faire de « la représentation » de ce qu’est la part maudite chez l’homme, cette part de l’intraitable, cette présentation absente qui fait reste et dont l’œuvre par son inachèvement essentiel tente de restituer, dans la couture à vif des mots, l’impossibilité même de son excès.

Au-delà du ciel sous la terre, Aleš Šteger (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 24 Juin 2024. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Poésie

Au-delà du ciel sous la terre, Aleš Šteger, Gallimard, Coll. Du Monde Entier, avril 2024, trad. slovène, Guillaume Métayer, 140 pages, 16,50 €

 

Le haut et le bas

La poésie de Aleš Šteger que je découvre dans la fameuse Collection Du Monde Entier, de Gallimard, représente à mon sens une tentative osée de faire correspondre dans une même expression les deux pôles de notre condition humaine : le ciel et la terre. Cette conception du monde est figurée par une écriture que je serais tenté de traiter d’oxymorique. Le bas et le haut, l’espoir et le désespoir, le noir et le blanc, le bien et le mal, le beau et la laideur, la présence et l’absence, le monde physique et métaphysique, le temps et l’éternité tout à la fois. Il y a donc deux mondes, le palpable et l’impalpable, deux mondes qui luttent au sein d’un débat axiologique, où matière et esprit sont l’étayage des poèmes, son bois d’œuvre.

Œuvres en prose, Hugo von Hofmannsthal (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 20 Juin 2024. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Le Livre de Poche

Œuvres en prose, Hugo von Hofmannsthal, Le Livre de Poche, La Pochothèque, 2010, trad. Jean-Yves Masson, 911 pages, 24 €

 

Sur Une lettre de Hofmannsthal

La Lettre de Lord Chandos à Francis Bacon de Hofmannsthal, publiée en 1902 dans le journal berlinois Der Tag (je me réfère à la traduction d’É. Hermann à laquelle Charles Du Bos, dit-on, aurait contribué, rééditée en 2010 dans les Œuvres en prose de l’écrivain viennois, pp.491-502) et datée du 22 août 1603, peut être lue comme un examen personnel, Hofmannsthal se cachant derrière le « fils cadet du comte de Bath » pour relater une « crise » : l’impossibilité d’écrire, l’adieu aux armes, c’est-à-dire à la littérature – adieu qui au contraire de ceux de son personnage ou de Rimbaud avec les Illuminations n’en sera pas un pour l’auteur lui-même puisque, s’il s’éloignera de la poésie, il ne renoncera jusqu’à sa mort brutale le 15 juillet 1929 ni à la fiction narrative ni au théâtre ni aux interventions dans les revues et quotidiens de son époque.

« Littérature, théorie littéraire et démocratie ». Entretien avec Alexandre Gefen (par Haytham Jarboui)

, le Mercredi, 19 Juin 2024. , dans La Une CED, Les Dossiers, Entretiens

 

J’ai rencontré le 3 juin 2024 Alexandre Gefen (*) entre deux conférences à l’Hôtel Le Carlton à Tunis pour l’interviewer. Il a accepté de répondre à mes six questions autour de l’idée de réparation, du rapport entre littérature et démocratie, la théorie littéraire et l’avenir de la littérature à l’ère de l’IA.

 

H. Jarboui : Vous soutenez, dans votre essai Réparer le monde, La littérature française face au XXIe siècle, que la réparation est l’une des vertus et des finalités de la littérature. Vous écrivez d’ailleurs dans votre introduction : « La littérature contemporaine se confronte au monde, non en voulant le changer ou s’en extraire, mais en cherchant à en penser ce qui ne peut être pensé que par la littérature » (1) et vous ajoutez qu’« [elle] a l’ambition de prendre soin de la vie originaire, des individus fragiles, des oubliés de la grande histoire, des communautés ravagées, de nos démocraties inquiètes, en offrant au lecteur sa capacité à penser l’impératif d’individuation, à faire mémoire des morts, à mettre en partage des expériences sensibles ou à inventer des devenirs possibles » (2).

Coups de griffes N°9 (par Alain Faurieux)

Ecrit par Alain Faurieux , le Mardi, 18 Juin 2024. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

 

La Langue des Choses Cachées, Cécile Coulon, L’Iconoclaste, janvier 2024, 134 pages, 17,90 €

Merci Madame Coulon. Je viens de terminer Le langage des choses cachées, votre dernier (ou avant-dernier, vous écrivez si vite) roman. Disons plutôt votre nouvelle, vous et moi savons que quelquefois les éditeurs… Dès les premières lignes j’ai ressenti une certaine familiarité avec votre récit. Des lieux et un temps restant vagues, mal définis, des personnages semblables aux cartes d’un tarot retrouvé. Un conte moral, bien sûr. J’ai d’abord cru que les nombreux heurts, les hésitations ou contradictions dans vos phrases faisaient partie de votre style ; un sens caché. Un voile levé sur notre monde illogique et brutal. Signifiant/signifié, tout ça tout ça. Malheureusement cette lecture s’est révélée optimiste. Et pourtant quand un livre fait moins de cent pages (quelquefois la pagination et l’édition…), le moindre mot compte, non ?