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Les Livres

Totalement dépassés, Gérald Sibleyras

, le Vendredi, 18 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Editions de Fallois

Totalement dépassés, janvier 2017, 136 pages, 17 € . Ecrivain(s): Gérald Sibleyras Edition: Editions de Fallois

 

Totalement dépassés est une succession de petites tranches de vie saisies sur le vif, que Gérald Sibleyras, auteur dramatique à succès, nous livre en précisant qu’il s’agit de témoignages. Témoignages qu’il a entièrement inventés, cela va sans dire. Certains sont drôles, d’autres étranges ou émouvants. Petite revue de détail.

Jean-Patrick, infographiste, a une liaison idéale depuis six mois avec Delphine qui est « sympathique, rieuse, équilibrée ». Ils se voient en cachette de ses deux garçons de 7 et 9 ans qu’elle appelle mes p’tits bouts. Elle décide de les présenter à Jean-Patrick. Les p’tits bouts sont deux monstres qui ressemblent à des vikings, désobéissants et grossiers. « A la place de Delphine j’aurais envoyé un bataillon de gendarmerie ». C’était il y a dix jours, Jean-Patrick n’a pas rappelé Delphine.

Franck a connu Marine, qui est bretonne depuis toujours. Marine vote socialiste et son prénom lepenien la désole, mais elle ne peut se résoudre à lui substituer son deuxième prénom, Aouregwenn. Franck et Marine se marient, elle travaille un peu puis décide d’être bretonne au foyer. Ils essaient vainement de procréer et, en désespoir de cause, adoptent la solution écœurante de prendre un chat qu’ils baptisent Traoumad.

Le Jour d’avant, Sorj Chalandon

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Jeudi, 17 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Grasset, La rentrée littéraire

Le Jour d’avant, août 2017, 336 pages, 20,90 € . Ecrivain(s): Sorj Chalandon Edition: Grasset

 

Après quatre jours d’arrêt de la mine, à la reprise de l’activité, le 27 décembre 1974, à 6h30 du matin, un bruit sourd retentit au fond d’une galerie de la fosse 3 dite Saint-Amé du siège 19 du groupe Lens-Liévin à Liévin dans le Pas-de-Calais. C’est un quartier de Six sillons qui a été touché, situé à 50 mètres en aval du niveau -70, dans le secteur de la taille 31. Le carreau de la mine se trouve bientôt envahi par les proches en quête d’informations. Le bilan est très lourd : 42 morts. Une enquête sera ouverte. Les syndicats CGT et FO se porteront partie civile. Assez rapidement, des faits de négligence seront révélés. Le coup de grisou sera confirmé par des experts. La bataille juridique durera jusqu’en 1981 (Extrait emprunté au site de l’INA intitulé Mémoire de mines qui relate la catastrophe). Le dernier roman de Sorj Chalandon, Le Jour d’avant, est dédié à la mémoire de ces Quarante-deux mineurs.

L’auteur s’empare de ce fait divers pour construire une fiction.

Ce n’est pas le premier roman où Sorj Chalandon trouve le chemin d’une histoire singulière pour rendre compte d’un évènement historique.

Les attachants, Rachel Corenblit

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 17 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, La Brune (Le Rouergue)

Les attachants, août 2017, 188 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Rachel Corenblit Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

 

« Les gens lisent ce genre de récit. Ils sont curieux des histoires qu’ils ne vivent pas et qu’ils parcourent en s’étonnant. Ils disent : les jeunes, de nos jours, ils vivent des choses horribles, des choses qu’ils ne devraient pas connaître. Les gens frissonnent derrière leurs livres… »

 

Que vous dire, madame Corenblit, sinon notre admiration, notre solidarité, affection même, si d’aventure on vous lit en parent, en collègue, en citoyen simplement. Votre livre prend aux tripes ; on en sort tourneboulé, et bien sûr différent. Magnifique écrit politique que votre ouvrage, que vous revendiquez fort justement comme tel : peut-on vivre dans cette société ? Et quelle place pour l’école face à elle ; quelle utilité.

Ode maritime et autres poèmes, Fernando Pessoa, Alvaro de Campos

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 17 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Langue portugaise, Editions de la Différence

Ode maritime et autres poèmes, Fernando Pessoa, Alvaro de Campos, trad. portugais Dominique Touati, Michel Chandeigne, préface Claude Michel Cluny, 189 pages, 10 € . Ecrivain(s): Fernando Pessoa Edition: Editions de la Différence

 

 

De l’auteur multiple, 72 hétéronymes (selon Teresa Lopez, la spécialiste de la « manne » aux manuscrits, le coffre aux 21000 manuscrits, tapuscrits, dactylogrammes…), l’on retient les quatre grands coauteurs, créés de toute pièce par l’immense écrivain : Soares (Le livre de l’intranquillité), de Campos (Les grandes Odes), Caeiro et Reis, tous trois « apparus en 1915 », tous trois disposant d’un curriculum vitae, d’une vraie biographie.

Alvaro de Campos, né le 15 octobre 1890, à peine plus jeune que l’orthonyme Pessoa, ingénieur naval, tête de pont et premier à publier dans la Revue Orpheu, connaîtra « une évolution », « aspiré par l’échec » comme le découvre le fameux poème Tabacaria (Bureau de tabac) : « J’ai tout raté ».

Survivre, Frederika Amalia Finkelstein

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 16 Août 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, L'Arpenteur (Gallimard)

Survivre, août 2017, 144 pages, 14 € . Ecrivain(s): Frederika Amalia Finkelstein Edition: L'Arpenteur (Gallimard)

 

« Je fais ce cauchemar de façon régulière depuis que j’ai vu la photographie sordide de la fosse du Bataclan. Quand je revois les corps troués, déchiquetés, abandonnés dans des positions humiliantes, quand je revois cette boucherie dans ma mémoire : j’ai la haine. Quand je revois le sang répandu sur le sol, un goût métallique, c’est comme si j’avais ce sang dans ma bouche, c’est comme si leur sang était mon sang, et de nouveau j’ai la haine ».

Survivre est un roman étourdissant, éblouissant, âpre, troublant, saisissant par sa force, sa rage, sa composition, un roman à l’écoute des morts. Ceux du Bataclan hantent ce roman inouï, comme ceux du 11 septembre nourrissaient celui tout aussi exceptionnel de Don DeLillo (1). Ces morts anonymes, puis identifiés, ces ombres transpercées, visages effondrés, ces corps mutilés, cette jeunesse sacrifiée, cette terreur qui s’immisce dans chaque regard, entre chaque page, font trembler Survivre, comme nous avons tremblé la nuit de ce crime contre nature, contre la vie, la pensée et la joie.