Á la fin des années 1940, à bord d’une station wagon Mercury bourrée de boites de films, Billie Dixon parcourt le Midwest. Elle (puisque Billie est une jeune femme, même si elle porte le pantalon) est chargée par la PRC, l’une des maisons de production de la Poverty Row, de la distribution de films série B, dans les villages les plus reculés. Un jour elle s’enfonce dans les Ozarks, à la limite du Midwest et de l’Arkansas et débarque à Stock’s Settlement. Là, trône, avec sa façade Beaux Arts marron, le cinéma Eureka. Claude Jeter dit Claude, le propriétaire de la salle, serait prêt à projeter les films de Billie si le pasteur Obadiah Henshaw maître de l’Église baptiste du tabernacle rachetée par le sang ne veillait, ô combien, à la pureté des âmes de ses ouailles ! Sa vision fanatique de la religion et de ses pratiques s’oppose à tout ce qui se rattache à la perverse Hollywood ! Les arguments de Billie resteront lettres mortes face à l’intolérance de l’exalté frère Henshaw. Mais, notre démarcheuse, peut-être, plus sensible aux plaisirs de la chair que son interlocuteur a remarqué chez Amberly, l’épouse de l’ecclésiastique, que les liaisons gomorrhéennes (comme l’eût dit Proust) ne semblent pas effaroucher, des charmes qui font naître de douces pensées et de délicieux vertiges. C’est l’équation de départ de ce livre. Un beau thriller, dont l’éclatante noirceur nous mène insidieusement dans un style classique et précis sur les rives de l’inconscient où (le sait-elle ?) la pauvre Billie va échouer avant qu’on ne la conduise devant la justice des hommes, au tribunal.