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Les Livres

L’Enfant de l’œuf, Amin Zaoui (2ème article)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 06 Mars 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Maghreb, Le Serpent à plumes

L’Enfant de l’œuf, septembre 2017, 202 pages, 18 € . Ecrivain(s): Amin Zaoui Edition: Le Serpent à plumes

 

Cet ouvrage singulier est un roman à deux voix, celle du chien Harys et celle de son maître Moul, diminutif de Mouloud.

Il se présente sous la forme de courts textes narratifs pourvus chacun d’un titre, assimilables à des fragments d’un double journal intime écrit à la première personne, tantôt rêveries, tantôt chroniques prosaïques de la vie quotidienne, tantôt scènes amoureuses soit sentimentales soit puissamment sensuelles, tantôt satires aucunement voilées de la situation politico-religieuse de l’Algérie actuelle.

Au moment où débute le récit, Moul vit seul dans son appartement, dans son œuf, depuis le départ de sa femme Farida, qui l’a quitté pour aller « vivre sa vie » loin d’une Algérie dont elle ne supportait plus les contraintes.

Moul lui-même est une espèce d’anarchiste libertaire que l’auteur campe comme un résistant irrémissible à l’acculturation qui dénature un pays où l’intégrisme religieux impose de plus en plus, malgré la fin officielle des années noires du FIS et les lois d’amnistie, ses règles rétrogrades, morales, idéologiques, civiles, de manière insidieuse et pernicieuse, sur les moindres aspects de la vie quotidienne.

Visiteurs de Versailles. Voyageurs, princes, ambassadeurs (1682-1789), Daniëlle Kisluk-Grosheide, Bertrand Rondot

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 06 Mars 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard, Histoire

Visiteurs de Versailles. Voyageurs, princes, ambassadeurs (1682-1789), Daniëlle Kisluk-Grosheide, Bertrand Rondot, novembre 2017, 336 pages, 45 € Edition: Gallimard

 

Dans l’esprit de Louis XIV, autant qu’on puisse le savoir, le château de Versailles n’avait pas pour seules fonctions de le séparer de Paris, cité tumultueuse, ligueuse et frondeuse, dont le jeune monarque se retrouva quelque temps prisonnier (un très mauvais souvenir), et de domestiquer une noblesse attachée aux vestiges de l’ordre féodal. Cette ancienne demeure de chasse fut agrandie démesurément afin de frapper les esprits et de présenter une sorte d’image ramassée de la puissance royale (ce n’est évidemment pas un hasard si l’édification du château « moderne » a coïncidé avec la période la plus riche de l’opéra et du théâtre français : Versailles est une scène où le roi se produit), à une époque où la France tenait, dans la conscience européenne, la place des États-Unis dans l’actuelle conscience mondiale : pays riche, puissant, influent et donnant la note au continent entier. Au XVIIIe siècle, on parlera français dans la plupart des cours européennes et il n’y aura presque pas de potentat, de margrave, qui ne voudra sa réplique du château de Versailles, de la même manière qu’au début du XVIIe siècle tout le monde cherchait à imiter les jeux d’eau des palais romains.

Sexe, Christophe Donner

Ecrit par Arnaud Genon , le Lundi, 05 Mars 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Grasset

Sexe, janvier 2018, 272 pages, 19 € . Ecrivain(s): Christophe Donner Edition: Grasset

 

A la fin de L’Image fantôme, Hervé Guibert eut cette jolie formule : « Il faut que les secrets circulent » (1). Elle pourrait résumer à elle seule le projet littéraire de Christophe Donner, initié avec Petit Joseph (Fayard, 1982) il y a 36 ans. Celui qui avait signé un essai intitulé Contre l’imagination (Fayard, 1998) n’a jamais eu pour sujet, à quelques exceptions près, que lui-même, sa famille et ses proches (et les proches de ses proches), non pas par narcissisme béat (loin de là), mais tout simplement parce que sa vie a souvent été plus romanesque que ne le sont beaucoup de romans qui se présentent comme tels. Christophe, le narrateur de Sexe, le remarque lui-même : comme dans toute bonne autofiction, « la réalité finit toujours par écraser la fiction ».

Sexe, c’est le roman que le narrateur tente d’écrire depuis plusieurs années, mais dont les différentes versions ne le satisfont jamais. C’est un peu le roman de Christophe Donner qui contiendrait tous les autres, qui les lierait, qui ferait de ses histoires passées une histoire, son histoire. Bien sûr, il n’est jamais question que d’amour. De la relation avec son amant mexicain, Moïse, avec qui il visite les backrooms du bar gay La Casita de Mexico, de sa difficulté à échanger avec lui autre chose que du sexe…

De face, de profil, de dos, George Besson, Henri Matisse

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Lundi, 05 Mars 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts, L'Atelier Contemporain

De face, de profil, de dos, George Besson, Henri Matisse, février 2018, 296 pages, 25 € Edition: L'Atelier Contemporain

 

Matisse tel qu’en lui-même


Oublié aujourd’hui, George Besson (1882–1971) fut une éminence grise de l’art eu égard à sa position officielle à partir de 1947 aux Lettres Françaises où il tint la tribune artistique. Fidèle au réalisme socialiste et au PCF stalinien, il défendit un art qu’il connut autour de 25 ans au moment où il rencontre Signac, Marquet, Bonnard, Van Dongen, Marquet et Matisse. Avec Francis Jourdain, il fonde en 1912 Les Cahiers d’aujourd’hui. S’y retrouvent les signatures de Léon Werth, Octave Mirbeau, Elie Faure, Emile Verhaeren, Jules romain, Valéry Larbaud, Colette et des dessins de Bonnard, Vuillard, Albert André, Matisse, Marquet, Renoir, Rodin, Signac.

Panama Al Brown L’énigme de la force, ALEX W. INKER, Jacques Goldstein

Ecrit par Jean Durry , le Vendredi, 02 Mars 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Sarbacane, Bandes Dessinées

Panama Al Brown L’énigme de la force, septembre 2017, 165 pages, 24 € . Ecrivain(s): Alex W. Inker, Jacques Goldstein Edition: Sarbacane

 

Alfonso Teofilo Brown, alias Panama Al Brown, « l’Araignée noire », a laissé sa trace fulgurante dans l’histoire de la boxe et dans le Paris de l’entre-deux guerres. Poids coq (53,524 en un temps où n’étaient reconnues que huit catégories), d’une taille inhabituelle, doté d’une allonge et d’un punch foudroyants, il devint champion du monde aux Etats-Unis en 1929 et ne perdit son titre – ou ce qu’il en restait sur les tablettes de la seule IBU (International Boxing Union) reconnue surtout en Europe – qu’en 1935 à Valencia dans un contexte douteux face à l’espagnol Baltazar Sangchili. Mais au-delà des douze cordes du ring, son élégance naturelle, ses frasques, incompatibles avec la vie en principe équilibrée d’un athlète, et l’amitié d’un poète, ont selon l’expression consacrée fait de sa vie un roman, bouleversant, roman revisité en 1982 à travers les pages écrites par un autre artiste, le peintre Eduardo Arroyo.