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Les Livres

Les Destinées sentimentales, Jacques Chardonne (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 31 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Le Livre de Poche

Les Destinées sentimentales . Ecrivain(s): Jacques Chardonne Edition: Le Livre de Poche

 

Ce roman, en trois parties, apparaît a priori comme le portrait d’un monde déjà éloigné, historiquement : celui de la bourgeoisie charentaise et limousine protestante de la fin du XIXe siècle.

M. Pommerel est un fabricant de cognac, très croyant. Il n’éprouve pas de contradiction entre l’exercice de sa foi et le commerce des spiritueux. Il y voit une sorte de confirmation : « Il retrouvait dans les affaires de multiples prescriptions, des coutumes sacrées, des défenses et des permissions, des frontières précises entre le bien et le mal ».

Cet homme assiste justement à la fin d’un sermon prononcé par Jean Barnery, pasteur. L’épouse de Pommerel, disparue, était la fille de David Barnery, fondateur de la fabrique de porcelaine de Limoges. Jean Barnery est apparenté à cette famille et conserve des intérêts dans la fabrique.

Pauline est la fille de son frère Lucien. Après le décès de ce dernier, Pommerel offre à Pauline de venir habiter chez lui à Barbazac.

Etat d’ivresse, Denis Michelis (par Christelle d'Hérart-Brocard)

, le Mercredi, 30 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Editions Noir sur Blanc

Etat d’ivresse, janvier 2019, 140 pages, 14 € . Ecrivain(s): Denis Michelis Edition: Editions Noir sur Blanc

Elle est femme, épouse, mère et rédactrice d’un magazine de psychologie. Autant de statuts qui se combinent et façonnent une belle identité, solide et légitime. Mais que se passe-t-il quand l’état d’ivresse vient s’immiscer dans l’engrenage et gangréner tout le système ?

On ne peut plus exemplaire et significatif, le procédé narratif de focalisation interne prend toute son ampleur dans ce court roman de Denis Michelis puisque la narratrice enferme littéralement le lecteur dans son carcan d’ivrogne, sans d’autre perception que celle de ses propres délire et obsession. Hormis les spéculations hors texte auxquelles le lecteur ne manquera pas de s’adonner, il est inutile d’attendre des explications sur les tenants et aboutissants de cette situation. Comme le suggère le titre du roman, l’ivresse est postulée comme un état de fait que la narratrice, qui domine l’appareil discursif, serait bien en mal de justifier. En dépit de cette narration ingénieusement restreinte et resserrée dans le temps (une semaine et quelques jours), il n’est nullement question de l’allocution vaseuse, sans queue ni tête, d’une poivrote en plein délire, qu’il aurait été laborieux de retranscrire et plus encore de déchiffrer. Si confusion mentale il y a, elle se concentre sur le fond et n’entache point la forme. Faut-il rappeler que la narratrice est rédactrice de magazine et par conséquent capable de s’exprimer de manière intelligible ?

Bicyclettres, Jean-Acier Danès (par Jean Durry)

Ecrit par Jean Durry , le Mercredi, 30 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Seuil, Voyages

Bicyclettres, janvier 2018, 221 pages, 17 € . Ecrivain(s): Jean-Acier Danès Edition: Seuil

 

 

« Pour célébrer mes dix-huit ans […] j’ai conduit ma bicyclette vers des lectures que j’affectionne – ou leurs auteurs. Cela m’est apparu comme un bon socle pour rentrer dans l’âge adulte. Durant deux ans […] pédaler a signifié rendre visite à mes écrivains, à mes œuvres préférées […]. A la grâce de voyages pleins d’aléas et de rencontres, j’ai voulu écrire ces pages comme un carnet de [route], riche d’un désir que la littérature avait fait naître ».

Partant le plus souvent de Lyon, ne faisant qu’un avec sa fidèle « Causette », Jean-Acier Danès a rendu en première instance visite au Cimetière sétois et à Paul Valéry. « Au retour, en zigzaguant à bicyclette sur la ligne blanche tracée sur l’asphalte de la route, j’ai décidé de suivre les lignes noires des livres que j’aimais ».

Les petits livres des saisons, Rotraut Susanne Berner, La Joie de lire (par Laurène Berger)

Ecrit par Laurène Berger , le Mercredi, 30 Janvier 2019. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Jeunesse

Les petits livres des saisons, Rotraut Susanne Berner, La Joie de lire, janvier 2019, coffret de 4 albums cartonnés petit format 26 x 34 cm, 16 pages chacun, 24,90 €

Peut-être aviez-vous dans votre enfance de ces petits livres en coffret cartonné que vous emmeniez dans votre valise pour aller passer les vacances chez votre grand-mère… de ces petits livres miniatures que les enfants aiment tant feuilleter pendant les longs voyages en voiture et qui les aident à s’endormir en rêvant à des aventures en des pays lointains.

La Joie de lire vient justement de publier en coffret et en petit format les livres des saisons : Le Livre de l’hiverLe Livre du printempsLe Livre de l’été et Le Livre de l’automne, de R. S. Berner.

La thématique est classique mais Rotraut Susanne Berner choisit pour l’illustrer de nous emmener en promenade dans une petite ville. C’est une petite ville de province pas loin de la campagne avec ses maisons, ses immeubles, ses entreprises, sa gare, ses magasins, sa bibliothèque et son parc près du lac. On part d’une grande maison avec ses habitants dont certains vont prendre le bus, d’autres se préparent à aller au travail. Celui-ci fait son jogging avec son chien et nous les suivrons, au fil des pages, à travers la ville jusqu’au lac gelé en hiver.

Le Cherokee, Richard Morgiève (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 29 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Roman, Joelle Losfeld

Le Cherokee, janvier 2019, 480 pages, 24 € . Ecrivain(s): Richard Morgiève Edition: Joelle Losfeld

 

Le Cherokee de Richard Morgiève porte superbement son titre, celui d’un des classiques de Jazz les plus célèbres, joués par Charlie Parker, Count Basie, Lee Konitz ou Wynton Marsalis. Un rythme staccato, très élevé, mais une sonorité retenue. Morgiève écrit sur ce tempo, sur ce son. Obsédant et possédé, comme l’est le Shérif Nick Corey, assailli par ses fantômes et ses blessures incurables. Car c’est bien le personnage qui occupe la place centrale du roman, détrônant la sacro-sainte enquête traditionnelle du roman noir. Morgiève se moque des codes du genre, une abracadabrante histoire d’avion sans pilote et d’invasion de Martiens vient pasticher avec ferveur les storytellers purs et durs. On peut en dire autant de l’éternel Serial Killer, le Dindon, dont on peut se demander s’il n’est pas celui de la farce.

Non, ce roman est une expédition spéléologique dans les profondeurs d’un homme, Nick Corey, dont les recoins de l’âme sont un paysage halluciné, peuplé de fantômes – ceux de son père et sa mère adoptifs adorés et sauvagement assassinés quand il était encore enfant – d’horreurs sanglantes, d’échecs amoureux, de pertes inlassables. L’âme d’un homme jeté dans la solitude et le désespoir d’une humanité haineuse et violente. Désespoir des humains, désespoir de soi, Corey ne se supporte pas lui-même, ne s’épargne pas la responsabilité de la déchéance du monde.