« - Emmerdez-les le plus possible, Monsieur Matthias. Foutez-leur une belle merde ! Ne laissez pas le monde tourner rond. Quand il tourne rond, on perd la boule. »
C’est Herr Singer qui parle. C’est la fin du livre de Denis GUEDJ « Villa des Hommes ». C’est la fin de l’histoire d’une amitié improbable entre un jeune soldat français blessé dans les combats douteux de la Première Guerre Mondiale et un vieux mathématicien allemand, génial, soigné dans le même hôpital parce qu’il souffre de dépression périodique. Entre eux s’est tissé un lien de plusieurs longs mois, lien fait de silences, de discussions interminables, lien indissoluble tressé dans les mêmes rêves, les mêmes dégoûts. La haine de la guerre, le refus des cécités nationalistes, le rêve partagé d’un monde plus fraternel et plus juste.
Herr Singer c’est, dans une libre inspiration, la figure de Georg CANTOR, mathématicien célèbre, père des « mathématiques modernes », père de la « théorie des ensembles » et des « nombres transfinis ». Monsieur Matthias, c’est un cheminot français qui se retrouve transformé en « chair à canon » dans la "grande boucherie" de 14/18. Rien ne les unit quand le directeur de l’hôpital entre dans la chambre de Herr Singer et lui dit :