Peut-on effacer ou à tout le moins atténuer les différences de classe ? C’est à cette question que s’attache Bernard Alteyrac dans son roman Faux-Miroir. Adrien est un paysan de Provence, dur à la tâche, soucieux de la prospérité de sa terre, avec pour tout espoir d’ascension sociale le mariage avec une femme de sa condition. Il est au service du marquis de Villecroze, dont il est l’intendant des terres, ce qui le distingue, un peu, du reste de la paysannerie locale. Henri de Villecroze, le fils du marquis châtelain, a connu dans sa prime enfance Adrien Juvénal, et s’est même lié avec lui, en dépit des différences sociales. Un événement, cependant, a éloigné les deux hommes : une promenade près d’un lac qui s’est très mal terminée et les a dissuadés de se revoir.
Colombe, le village natal d’Adrien, en ce début d’août 14, voit ses enfants partir au front : Adrien, bien sûr, avec ses camarades Lucien Vidal d’Arles, Victor André, Gaspard Brunet, avec lesquels il s’est lié pendant son service. Pourtant, quelque chose de troublant se produit : sur le quai de la gare de départ, Gabrielle, sœur jumelle d’Henri, s’avance vers Adrien, visiblement émue et bouleversée : elle crie, mais ses mots sont couverts par le vacarme du train qui démarre…