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Essais

Chronologie et critique biblique à l’époque des Lumières : Les travaux de Pierre Michel

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 27 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Honoré Champion

Chronologie et critique biblique à l’époque des Lumières : Les travaux de Pierre Michel, Miguel Benítez, Honoré-Champion, coll. Libre pensée et littérature clandestine, n°70, octobre 2017, 534 pages, 85 € Edition: Editions Honoré Champion

 

Ceux qui lisent la Bible en la prenant, selon l’expression consacrée, au pied de la lettre, se voient en général traités de fondamentalistes et ce n’est pas un compliment. Mais, comme le remarquait le comparatiste allemand Carsten Peter Thiede, un courant herméneutique dominant (dont le postulat principal se résume ainsi : « On ne peut pas et on ne doit pas faire confiance à la Bible, sauf s’il existe des preuves externes indiscutables ») a fini par imposer l’idée que la Bible, « Ancien » et « Nouveau » Testaments confondus, était tout ce que l’on veut – de la théologie, de la propagande nationaliste, de l’idéologie tribale, de la fiction, voire de la science-fiction – tout, sauf une source historique fiable. Autant l’interprétation du Coran, livre incréé et antérieur même à la création du monde (ce qui reprend une ancienne tradition juive, selon laquelle le Temple et la Torah auraient fait l’objet d’une pré-création) est close, voire verrouillée, autant l’herméneutique de la Bible est ouverte.

Et vous avez eu beau temps ?, Philippe Delerm

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mardi, 27 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Seuil

Et vous avez eu beau temps ?, janvier 2018, 176 pages, 15 € Edition: Seuil

 

A l’instar de La Bruyère et de ses Caractères, Philippe Delerm se livre ici à une critique fine et ironique des « petites phrases », ordinaires et perfides, qui émaillent nos conversations et fonctionnent comme des marqueurs de discours, entre intimité et vie sociale. Plus de soixante phrases sont ainsi analysées, parmi lesquelles le lecteur trouvera nécessairement quelques échos de ses propres habitudes de discours, ou des paroles régulièrement entendues dans l’espace social, qu’elles lui aient été ou non adressées.

Moraliste, linguiste, sociologue, ethnologue, entomologiste du langage, de la cognition et des interactions sociales, tel est Delerm dans ce nouvel opus où il décortique les travers et hypocrisies de la conversation.

L’amour est une géographie intérieure, Elysabeth Loos

Ecrit par Patrick Devaux , le Lundi, 26 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles

L’amour est une géographie intérieure, éd. Le Coudrier, 2018, 121 pages, 16 € . Ecrivain(s): Elysabeth Loos

 

Qu’importent les situations de temps, de lieu ou d’action dans ce que l’auteur annonce comme étant « des carnets de deuil ».

Ecrits par à-coups, hoquets, comme pour gérer, à petites doses progressives, le choc, à moins que cela ne soit le contraire et que la série de textes courts ne résulte de la brutalité de l’évènement.

En tout cas, l’auteur conjure la cendre. Son amour se fait urne funéraire, dépositaire de souvenirs : « Mes mains ne cherchent pas à toucher, pas à sentir la masse. Le corps ne pèse rien. A peine le poids de la peine. Il n’est pas besoin de le peser ».

Le vide se remplit d’une présence placardée jusque dans les détails. Les lieux deviennent obsessionnels. L’alchimie fonctionne à restituer : « Dans les grimoires du temps, je refais ce qu’il a défait. Je bande sa chair calcinée ».

La personne et le sacré, Simone Weil

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 23 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Rivages poche

La personne et le sacré, avril 2017, préface de Giorgio Agamben, 96 pages, 6 € . Ecrivain(s): Simone Weil Edition: Rivages poche

 

Simone Weil, dans cet extraordinaire opuscule, nous fait d’abord comprendre que l’effort qu’elle attend de nous ne sera pas essentiellement d’intelligence :

« Un homme intelligent et fier de son intelligence ressemble à un condamné qui serait fier d’avoir une grande cellule » (p.67-8).

C’est ensuite qu’elle y dégomme, sans appel et périlleusement le cœur même de notre exigence occidentale d’humanité, les droits démocratiques de la personne humaine.

« Mettre dans la bouche des malheureux des mots qui appartiennent à la région moyenne des valeurs, tels que démocratie, droit ou personne, c’est leur faire un présent qui n’est susceptible de leur amener aucun bien et qui leur fait inévitablement beaucoup de mal » (p.60).

Elle laisse d’ailleurs aux malheureux peu de marge d’illusions utiles sur eux-mêmes :

Traités spirituels, Edition critique, introduite et annotée par Bernard Forthomme, Paulin d’Aumale

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 21 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Honoré Champion

Traités spirituels, Edition critique, introduite et annotée par Bernard Forthomme, Paulin d’Aumale, octobre 2017, 45 € Edition: Editions Honoré Champion

Paulin d’Aumale fut un membre du Tiers-ordre régulier de saint François. On ignore bien des choses à son sujet, à commencer par son patronyme véritable (Paulin d’Aumale était un nom de religion), la date de sa naissance et celle de sa mort. Ces lacunes obéissent toutefois à une logique interne, car, quel qu’ait été son nom, celui qui se faisait appeler ainsi n’était pas entré en religion pour se faire connaître de la postérité. On sait qu’il vécut à Paris, où il exerça des responsabilités au sein de son ordre. Ce fut dans la capitale qu’il rencontra Madame Guyon, que Voltaire (mal placé pour la comprendre) qualifiait de « femme à révélations, à prophéties et à galimatias » (Siècle de Louis XIV, chapitre XXXVIII ; Œuvres historiques, éd. René Pomeau, Gallimard, La Pléiade, 1957, p.1091). Elle prêchait, comme on le sait, un « pur amour » de Dieu, allant jusqu’au renoncement absolu à soi-même, à toute action, au point même de ne plus prier (la charité et les bonnes œuvres, il n’en était même pas question). Comme cela se produit en général, un message à ce point radical, extrême, divise en deux groupes ceux qui en prennent connaissance : soit il leur répugne, soit ils y adhèrent. Les autorités religieuses, à une exception près, se rangèrent parmi la première catégorie et Madame Guyon finira embastillée.