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Critiques

Dominique suivi de Épectases de Sollers, Stéphane Barsacq (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 29 Août 2024. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres

Dominique suivi de Épectases de Sollers, Stéphane Barsacq, Éditions Le Clos Jouve, mai 2024, 116 pages, 19 € . Ecrivain(s): Stéphane Barsacq

 

« Par elle-même, elle avait gardé une fraîcheur très remarquable. Elle irradiait de vie et de beauté » (Portrait d’une femme).

Une carte de Dominique à l’encre bleue : « Cher Stéphane, Heureuse de vous avoir vu, plus byzantin que jamais, c’est-à-dire très beau, comme je vous l’ai déjà dit. Et j’ai toujours raison » (Page de journal, 12 décembre 1999).

« Sollers était au cœur du pouvoir, cependant qu’il s’en tenait en retrait, par une liberté réelle. Comme Claudel, il n’a pas voulu être maudit pour réussir, il a voulu réussir quitte à être maudit » (Sur Sollers).

« Ce qui intéresse Sollers au fond ? L’élégance des êtres. Leur faculté à la joie. L’élan de la nuance du plaisir qui les détermine » (Hommage).

Maï, une femme effacée, Geetanjali Shree (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 29 Août 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Asie, Roman, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Maï, une femme effacée, Geetanjali Shree, éditions Des femmes Antoinette Fouque, mai 2024, trad. du hindi, Annie Montaut, 250 pages, 22 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

 

La résignation

Dans son roman récent, Maï, une femme effacée, Geetanjali Shree (née en 1957, auteure de langue hindi basée à New Delhi, lauréate de L’International Booker Prize 2022) aborde la destinée et le conditionnement moral de la femme indienne – voilée même à l’intérieur de sa demeure, muette, vouée à toutes les tâches de la domesticité : « Quand on voyait le pardah de maman, on ne se posait même pas la question de ce qu’il y avait derrière. Le voile, symbole des bonnes manières et de son effacement ». La famille ici, une communauté, une famille élargie, une famille conjointe de nature patriarcale, est placée sous l’autorité incontestée des aïeux auxquels les descendants doivent obéissance absolue et respect – ce qui équivaut à une sorte de dictature. Le « modèle féminin de vertu dévouée aux siens » est imposé, le mariage considéré comme une institution sacrée. Les unions arrangées sont encore nombreuses en Inde et rompre avec la tradition, pour les jeunes couples, demeure un grand risque, celui de se retrouver sans ressources et isolés.

Le Panoptique, Jeremy Bentham (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 28 Août 2024. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Iles britanniques, En Vitrine, Cette semaine, Bartillat

Le Panoptique, Jeremy Bentham, Editions Bartillat, septembre 2024, trad. anglais, Maud Sissung, 195 pages, 20 € Edition: Bartillat

 

Au-delà de l’établissement lui-même, le Panoptique – dispositif d’enfermement destiné à surveiller au plus près les populations incarcérées –, ce qui fait de ce recueil de lettres un moment essentiel de la pensée occidentale moderne réside dans les conséquences bouleversantes de la pensée qui conduit à l’élaboration de ce dispositif.

La « machine » consiste en une organisation architecturale qui vise à un but idéal pour le gardien :

« La perfection idéale, si l’on se fixait cet objet, exigerait que chaque individu soit, à tout instant, surveillé. Cela étant impossible, le mieux que l’on puisse souhaiter est que, à tout instant, ayant motif de se croire surveillé, et n’ayant pas les moyens de s’assurer du contraire, il croie qu’il en est ainsi ».

Bois-aux-Renards, Antoine Chainas (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 27 Août 2024. , dans Critiques, Les Livres, Polars, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Bois-aux-Renards, Antoine Chainas, Folio policier, février 2024, 496 pages, 9,40 € Edition: Folio (Gallimard)

 

« Adiaphorie » est l’un des nombreux mots dont se sert Antoine Chainas au fil de son neuvième roman pour inciter le lecteur à interrompre le fil narratif le temps d’une plongée dans le dictionnaire. Car l’auteur dispose et use d’un riche lexique, et il en fait étalage tout au long des soixante-trois brefs (ou parfois moins brefs) chapitres de Bois-aux-Renards. On est ainsi confronté, en ouverture du quarante-cinquième d’entre eux, aux phrases suivantes : « L’aube avait une couleur de liquide amniotique. On imaginait les cellules desquamées mélangées à l’eau des altostratus, le chorion connecté aux nuées utérines et la migration des kératocytes pour combler dans les fonds lointains du ciel ». Un peu avant, concernant le petit-neveu d’Admète, personnage sur lequel on reviendra, on apprend « que le livedo sur son long nez, s’il se prolongeait, se muerait avec l’âge en thrombose ». Cela peut sembler paradoxal, à l’ère de l’appauvrissement lexical généralisé, mais la débauche lexicale à laquelle procède Chainas a le don d’agacer : c’est un peu gratuit et démonstratif. Surtout venant d’un auteur qui se fend au passage d’un joli « maître étalon »…

Le XIXe siècle à travers les âges, Philippe Muray (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 26 Août 2024. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Les Belles Lettres

Le XIXe siècle à travers les âges, Philippe Muray, Les Belles-Lettres, février 2024, 652 pages, 29 € Edition: Les Belles Lettres

 

Qu’est-ce que Le XIXe siècle à travers les âges ? L’ouvrage a le volume et l’érudition des anciennes thèses de doctorat d’État et Philippe Muray l’a d’ailleurs conçu dans un cadre universitaire (lors d’un séjour à Stanford, en 1983), mais il manque l’appareil foisonnant des références, les notes infrapaginales qui prolifèrent et remontent parfois jusqu’au titre courant, les dizaines de pages de bibliographie répertoriant ouvrages imprimés, manuscrits conservés dans les endroits les plus insolites ou les moins accessibles, la littérature secondaire recensant même des notules publiées dans des périodiques locaux disparus et oubliés, la volonté d’exhaustivité, enfin, appliquée parfois à un seul auteur, voire à une seule œuvre. Mais le projet de Philippe Muray dépassait les forces d’un homme seul, puisqu’il s’agissait d’embrasser tout un siècle au long duquel on a beaucoup pensé, écrit et publié. Il le définissait ainsi :