Identification

Les Chroniques

À propos du roman Plages non loin de Nantes, Germont, par Yasmina Mahdi

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 05 Mai 2017. , dans Les Chroniques, La Une CED

Cruelle beauté

Tout d’abord, voici un bref résumé de ce roman-récit, Plages non loin de Nantes, de Germont, auteur discret. Un portrait idéal : une vision, un miroir ; le début d’un conte. Un monde désillusionné : à la recherche de cruelle beauté (…) où je me reconnais, en vrai fils d’une époque anxieuse et désorientée (…) [dans] la désillusion des jeunes gens d’alors… Un contexte sociohistorique : nous avions été contraints de nous réfugier dans la réalité souterraine de notre vie individuelle. La société officielle n’étant plus qu’un marais pourrissant (…) la détérioration des valeurs qui la rongeait continuait son œuvre souterraine et bientôt triomphante. L’homosexualité. Une des facettes de l’homosexualité, l’éraste et l’éromène, le Giton du Satyricon de Pétrone. Ces amours étranges entre deux jeunes hommes également prompts à se craindre et à se mépriser nous renvoient à l’universel d’un égoïsme sacré auquel personne n’échappe. Le statut de victime : la victime a d’avance consenti au sacrifice, et son tourmenteur est peut-être au fond plus abandonné et désespéré encore que celui qu’il semble martyriser. L’évocation de Ganymède, entre enlèvement, extase et maltraitance : Ganymède, le plus beau des mortels, élevé par amour jusqu’aux cieux afin à jamais de verser au banquet des dieux l’ivresse de leur éternité. Le temps de la déréliction (…) d’une instabilité matérielle et affective permanente.

A propos de Syrie et autres poèmes, Salim Barakat

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 04 Mai 2017. , dans Les Chroniques, La Une CED

Syrie et autres poèmes, Salim Barakat, Actes sud Sindbad, avril 2017, 112 pages, 16 €

 

Syrie et le poème

 

Il est très pathétique d’écrire quelques lignes seulement sur le recueil Syrie de Salim Barakat, surtout au gré de la connaissance que nous avons de jour en jour de la guerre en Syrie, et des bouleversements horribles que subit ce pays. Mais il restera sans doute mieux dans la mémoire des hommes de demain la langue et le propos humaniste, la ressource poétique pour expliquer et surmonter l’horreur. Néanmoins, et même si la terreur passe, car elle finira par passer, seules resteront les blessures et les larmes, et les poèmes qui les ont accueillies, et l’histoire des hommes ne fera que se poursuivre, d’événements en événements.

Carnets d’un fou - XLIX, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Mercredi, 19 Avril 2017. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

« Quand on parle à quelqu’un d’argent, son visage change, et qu’y lit-on ? L’inquiétude. Je l’ai remarqué cent fois. On dirait qu’on touche aux sources mêmes de la vie » (Julien Green, Journal, 10 nov. 1967)

 

#. Menus amuse-gueules ou l’apéritif. Ce février 17 démarre en coup de vent.

§. Le chant du rossignol. La loi anticonstitutionnelle portée par Mme Rossignol, s’opposant à ma liberté de penser et de parler sur une seule question, mais essentielle – principe de vie ou principe de mort ? –, et consistant à ne m’autoriser que la seule approbation de la mort, vient d’être votée par l’immense majorité de nos députés, gauche, centre et droite réunis. On peut, avec eux, être assuré de la lâcheté la plus abjecte, au nom de leur réélection sous le masque du progressisme et de la défense des droits des femmes. Le « texte » est maintenant devant le Sénat, où la même hypocrite démagogie produira les mêmes effets. Il sera entériné, puis adopté par les deux chambres. Pots de chambre ! Chante Rossignol, chante !…

Proche lointain, Martine Rouhart

Ecrit par Gilles Brancati , le Mardi, 18 Avril 2017. , dans Les Chroniques, La Une CED

Proche lointain, Martine Rouhart, éditions Dricot, janvier 2017, 152 pages, 14 €

 

Bien qu’il y ait des reproches à faire à ce livre, je dois avouer qu’on se fait prendre malgré les défauts. Je m’explique.

De quoi s’agit-il ? D’une histoire d’amitié, entre deux hommes, qui s’effrite jusqu’à disparaître ou presque. Mais l’auteure a la finesse de nous le dire tout de suite sans rien révéler. Pour savoir le pourquoi des choses, il faut aller au bout. Alors on y va, et on découvre, outre les évènements – parfois un peu attendus comme la liaison de l’ami avec l’épouse du narrateur avant leur rencontre –, des personnages auxquels on finit par s’attacher. Ils se découvrent au fur et à mesure, ne se livrent pas d’emblée, c’est plaisant pour la lecture.

Dès les premières pages, je n’ai pas été captivé, je trouvais que ça débutait mal et j’ai failli abandonner. Je me serais privé d’un bon sujet. Par correction, j’ai continué ma lecture et je suis entré dans les relations simples entre les personnages. On peut regretter d’ailleurs qu’elles ne soient pas parfois un peu plus fouillées, on aurait aimé en savoir un peu plus sur leur intimité. J’ai dit parfois, ce n’est donc pas un reproche majeur, seulement une constatation.

L’Arabe poussé à être kamikaze ou à n'être rien, par Kamel Daoud

Ecrit par Kamel Daoud , le Vendredi, 14 Avril 2017. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Finalement le choix de la « rue arabe », ce long boulevard des pas perdus, est terrible : retour hystérique aux « Allah Ouakbar » rageurs ou silencieuse analyse des impuissances en cascade depuis la Nebka et jusqu’à la pendaison de Saddam. C’est-à-dire soit la barbe, soit la télécommande. Et ce fragile équilibre policier que les régimes arabes ont cru un moment avoir réussi en verrouillant les expressions et en assimilant les islamistes soft, ce fragile équilibre vient de « casser » pour imposer ce que l’on redoute le plus dans la planète d’Allah : le retour du politique malgré les polices et les bureaucraties. Pour cette fois-ci, les assassins d’Israël ont réussi à saper ce que ces mêmes régimes ont mis des années à construire : le statu quo entre eux et les islamistes, en évacuant les démocrates et tous ceux qui en appellent à la démocratie. Encore une fois, c’est la radicalisation qui nous reste pour exprimer les colères, et les courants forts islamistes doivent aujourd’hui jubiler, qu’ont réussi à leur offrir les opinions arabes sur un plateau, là où on le leur a refusé par les urnes et les partis traditionnels.