Il a fallu que le temps fasse son ouvrage pour que je puisse rendre hommage à Hubert Lucot. En effet, comment rendre compte, avec une certaine distance, de cette rencontre qui a été marquée du sceau de la connivence mais m’a aussi poussée à me poser des questions sur ce que fut cette relation si étonnante que je me garderai bien de qualifier ?
J’ai entendu Hubert Lucot pour la première fois à Cerisy lors du colloque sur l’autofiction où, le vendredi 29 juillet 2008, il fit une communication intitulée Je est un ogre. Sur l’estrade, un homme très grand, une carrure de rugbyman. Il était très impressionnant. Il a parlé de son écriture. Dans ses récits, il souhaitait mettre en valeur des « éclats mosaïques de la mémoire », « des surgissements fugaces », avec une obsession réaliste. Il n’est pas indifférent à la marche du monde. Il parle de sa « colère politique ». Il précise bien que ses textes n’ont rien de spontané. C’est un maniaque du mot juste. Il retravaille chaque phrase au niveau des couleurs, des silences, de la musique. Tout son travail de réécriture consiste « à retirer ». En fait, il est « un dévorateur de vie ». Il aime la flânerie, la bonne nourriture et tous les plaisirs de l’existence.