Modifier les programmes scolaires fait partie du rituel institutionnel. Rares cependant sont les changements qui ont des répercussions notables dans les pratiques pédagogiques et les résultats des élèves. En revanche, il arrive qu’une modification mineure, qui aurait dû passer inaperçue, déclenche une polémique virulente. Il est vrai que passions et médias se déchaînent facilement dès qu’on touche à l’enseignement du français. L’introduction de la notion de prédicat en cycle 3 a mis le feu aux poudres. Chacun a choisi son camp. D’un côté ceux qui croient renouveler et simplifier la grammaire avec un redécoupage de la phrase, entre ce dont on parle – le sujet, et ce qu’on en dit – le prédicat. De l’autre, ceux qui ressortent leurs vieilles armes de guerre, COD, COI, BLED, pour défendre une grammaire authentique, qu’ils croient attaquée par ce nouveau cheval de Troie.
Deux causes tout aussi nobles, mais tout aussi vaines car toutes deux traitent la grammaire comme un objet en soi, dont les règles doivent être sues par cœur. Un énoncé obéit à des règles et contraintes différentes selon les langues, d’où la nécessité d’une grammaire pour organiser ces règles, mais la réalité qu’il évoque ne change pas en fonction de la langue utilisée.