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Les Livres

La Grande épaule portugaise, Pierre Lafargue (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 26 Novembre 2020. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

La Grande épaule portugaise, Pierre Lafargue, Editions Vagabonde, août 2020, 259 pages, 17,50 €

 

« Une rivière est là, car il en faut toujours une (p.28). Les ormes, les jolis peupliers aussi. Le vent ajoute à tout cela une animation bienvenue.

(p.28) Ce point de vue aurait mérité d’être développé ».

La Grande épaule portugaise est un roman qui ne ressemble qu’à lui-même, une aventure romanesque étourdissante, étonnante, foudroyante, un roman qui à l’image de l’océan, passe d’un calme rassurant à une fureur sidérante, et qui est littéralement foudroyé par ce qu’il raconte, ce qu’il suit à la lettre. Un roman placé sous l’influence d’astres, de fleuves et de dieux, d’écrivains fantasques réels ou imaginaires. Un roman placé sous les feux de notes de bas de page qui se bousculent et bousculent le roman – à faire trembler les universitaires lettrés qui en raffolent –, des romans s’y glissent, c’est un jeu, où se mêlent humeurs, reproches, mises au point, références les plus loufoques les unes que les autres, le tout dans un éclat de rire, jaune parfois, qui traverse toute l’histoire de ce roman échevelé.

La vie brûle, Jean-Claude Leroy (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 26 Novembre 2020. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

La vie brûle, Jean-Claude Leroy, Editions Lunatique, octobre 2020, 212 pages, 20 €

 

 

« Tout le réel, rien que lui, dans mon je essoufflé » (in Ça contre Ça, Rougerie, p.61, 2018).

L’auteur (né en 1960) de ce livre, poète et essayiste, est ici aventurier et chroniqueur (instruit, agité et fin) d’une période de quelques mois du début 2011 où il se trouvait en Egypte (Alexandrie, Le Caire), assistant, par le jeu des circonstances, en direct à la révolution qu’on sait. Révolution qu’il soutient sans l’avoir prévue, qu’il accompagne sans s’en prétendre digne, qu’il aime et photographie sans l’admirer tout à fait, comme on va voir. Une sorte de samouraï perplexe, en sac à dos et baskets, misanthrope et bienveillant, comprenant mieux l’Occident (capitaliste, nucléarisé, cynique) quitté sans regret que ce qu’il vient là découvrir, avec effroi, gourmandise et scrupule :

Gueule noire, Estelle Fenzy (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 25 Novembre 2020. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, La Boucherie Littéraire

Gueule noire, 54 pages, 12 € . Ecrivain(s): Estelle Fenzy Edition: La Boucherie Littéraire

 

Le responsable éditorial, Antoine Gallardo, le précise dans les remerciements inscrits à la fin de l’opus : « Tout comme moi, Estelle Fenzy ne s’imaginait pas au moment où elle me confiait ces tendres souvenirs d’enfance, qu’ils m’inspireraient une nouvelle collection ». Après la collection éminente des éditions de La Boucherie littéraire, « Sur le billot », Gueule noire ouvre ainsi la nouvelle collection « Sur le billot pour tous » avec un opus poétique s’adressant à des lecteurs de 7 à 107 ans qui souhaiteraient goûter « la saveur de l’enfance retrouvée ». Et celle-ci, universelle par sa période d’inédite exploration à un âge où les perspectives du monde offert sont encore indemnes, indéfinissables et terriblement ouvertes, est profondément palpable entre les pages de cette publication aussi rafraîchissante que chaleureuse, comme la tendresse peut remuer les herbes folles et verdissantes de l’enfance, réactiver la joie ou la nostalgie dans un présent traversé par les souvenirs.

Le Cœur en bandoulière, Michel Tremblay (par Marie du Crest)

Ecrit par Marie du Crest , le Mercredi, 25 Novembre 2020. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Actes Sud, Théâtre

Le Cœur en bandoulière, 128 pages, 10,99 € . Ecrivain(s): Michel Tremblay Edition: Actes Sud


Michel Tremblay considère Le Cœur en bandoulière comme « un roman hybride » ; il serait possible pour lui de créer à la façon des agronomes un nouveau fruit littéraire. En effet, son texte rassemble deux genres : un récit à la première personne, dont le narrateur est un auteur de théâtre septuagénaire, en villégiature à Key West, aimant aller voir les couchers de soleil sur la jetée, et une pièce de théâtre en un acte, Cher Tchékhov, présentée avec sa première de couverture, sa liste de distribution, et dont l’auteur n’est autre que le promeneur de la jetée. L’écrivain vieillissant désire reprendre le texte de 82 pages qu’il a abandonné et tenter enfin de l’achever. Les deux genres s’entrecroisent tout au long de l’œuvre. On sait que Michel Tremblay écrit romans et pièces. Même s’il rejette l’écriture autobiographique, les lecteurs pourront reconnaître des morceaux de vie de l’écrivain : l’âge du narrateur, les séjours à Key West, l’homosexualité de l’un des personnages, le métier d’auteur dramatique redoublé sous les traits du narrateur principal et de Benoît, personnage principal de la pièce, ou encore le décor québécois près d’un lac dans la seconde partie du texte.

Le Cœur révélateur (Contes), Edgar Poe (par Mona)

Ecrit par Mona , le Mercredi, 25 Novembre 2020. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, USA, Flammarion, Contes

Le Cœur révélateur (Contes), Edgar Poe, Flammarion, Coll. bilingue Aubier, 1966, 375 pages

 

L’artiste défie le moraliste, une parodie de Platon

Poète maudit, auteur de célèbres contes fantastiques et policiers, critique littéraire implacable, très apprécié en France depuis les traductions de Baudelaire et de Mallarmé mais écrivain mal-aimé dans son pays natal, l’Amérique puritaine, où il déplaît pour sa vie dissolue (ivresses, mariage avec une cousine de 13 ans, dettes de jeu, mort d’éthylisme dans le caniveau de Baltimore), sa critique de la démocratie américaine et son esthétique aux antipodes de la pensée positive. Fasciné par la folie, le crime et le mal sous toutes ses formes, il appartient à un genre littéraire équivoque, le romantisme noir, et met en scène des monstres pervers aux passions sombres et destructrices dans des atmosphères lugubres et angoissantes.

Le Cœur révélateur, publié en 1843, illustre bien la formule de Mallarmé : « Poe, c’est le cas littéraire absolu » : entre maîtrise artistique et folie, jeux ambigus du réel et de l’imaginaire, polysémie et ironie, symbolisme subtil, l’histoire du cœur révélateur voile et dévoile. Défenseur de l’art pour l’art dans ses Principes Poétiques, Poe réfute le didactisme de convention et, avant Nietzsche, réhabilite le poète chassé de la cité par Platon.