Il fallait une longue et solide amitié entre Marie-Paule Farina et Sade – assortie d’une étroite intimité (avouable s’entend) – pour qu’un tel livre vît le jour. Car s’il n’avait tenu qu’au divin marquis, nous en aurions été privés. N’a-t-il pas écrit en effet : « De la fiction, de la fiction, jamais de mémoires ni de confessions, c’est mon credo ! ».
À l’instar de Diogène, Marie-Paule Farina a donc cherché un homme dans le tonneau de ses écrits et les traces qu’on trouve de lui. Elle y réussit on ne peut mieux, et l’on se surprend à penser que ce témoignage de vie n’aurait pas été aussi authentique, oserais-je dire aussi sadien, si Marie-Paule n’avait tenu la plume à Donatien Alphonse François.
Les personnages sont campés comme au théâtre. Le tragique se mêle à la farce. Côté farce, Monsieur de Sade, imitant en cela Figaro, se presse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer. Philosophe quoi qu’il advienne, il prend le contrepied de la réalité (« De la fiction, de la fiction », n’oublions pas). Dieu sait pourtant quelles avanies il s’est vu infliger – avec à la manœuvre, en coulisses, Marie Madeleine Masson de Plissay, sa belle-mère. Concentrant en elle autant de haine que les trois Harpyes réunies, elle va, sa vie durant, s’acharner sur son gendre.