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Récits

Indigne, Cécile Chabaud (par Marjorie Rafécas-Poeydomenge)

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Lundi, 22 Avril 2024. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres

Indigne, Cécile Chabaud, éditions Écriture, 2023, 230 pages, 20 €

Scandé par l’écriture vive et élégante de Cécile Chabaud, Indigne relate le procès complexe de Georges Despaux, figure énigmatique et contrastée de la seconde guerre mondiale. L’auteure avait déjà eu l’audace de ressusciter Rachilde lors de son premier roman publié en 2022. Elle se penche cette fois-ci sur un sujet complexe : la face cachée des hommes en période de guerre. Ce roman nous démontre à quel point les visions manichéennes peuvent nous éloigner de la vérité. Comment avoir des certitudes entre les faux-semblants et les arrangements ? Qu’y a-t-il au plus profond des hommes ? Sont-ils prêts à tout pour sauver leur peau ou au contraire, sauver leur dignité ?

Ce roman nous renvoie à la réflexion de Sartre sur ce qu’est au fond un « salaud ». Dans L'Être et le Néant, l’exemple du garçon de café qui joue au « jeu » d’être un garçon de café et qui finit par y croire lui-même nous dérange. « Le salaud est celui qui, pour justifier son existence, feint d’ignorer la liberté et la contingence qui le caractérisent essentiellement en tant qu’homme ». Le « salaud » est celui qui n’assume pas sa liberté. Souvent, il est plus confortable, plus lâche, d’imaginer que l’on n’est pas libre pour se convaincre que l’on n’a pas le choix. Alors, Georges Despaux était-il libre ?

Dis-moi de vivre (Bid Me to Live), Hilda Doolittle (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 14 Mars 2024. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Dis-moi de vivre (Bid Me to Live), Hilda Doolittle, éd. des femmes-Antoinette Fouque, janvier 2024, trad. anglais (États-Unis) Claire Malroux, 228 pages, 9 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

 

Dislocation

IV

Hilda Doolittle (H.D.) emprunte pour le titre du 4ème tome de son cycle autobiographique et féministe, écrit en 1947 : Portrait d’aujourd’hui – après Dis-moi de vivre, Le Don, Hermione – les premiers mots des vers du célèbre poète anglais Robert Herrick (1591-1674, vicaire dans le comté de Devon) : « Dis-moi de vivre, et je vivrai / pour être ton Champion : / Ou dis-moi d’aimer, et je me ferai / Pour toi un cœur aimant… ». Ce nouvel ouvrage campe la génération « de moins ou d’à peine plus de trente ans [qui plongeait] encore des racines dans un passé lointain ». Cette génération ayant survécu à deux guerres mondiales, intellectuels, suffragettes et artistes, élevés entre deux siècles, entre des courants artistiques divers, de l’art nouveau, du symbolisme, de l’orientalisme au dadaïsme et au cubisme, jusqu’à l’expressionnisme abstrait.

Le Don (The Gift), Hilda Doolittle (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 07 Mars 2024. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Biographie, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Le Don (The Gift), Hilda Doolittle, dite H.D., éd. des femmes-Antoinette Fouque, 2024, trad. anglais (États-Unis) Claire Malroux, 168 pages, 9 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Scènes d’enfants

III

Dans Le Don, écrit en 1941, à nouveau l’histoire des États-Unis prend forme au sein des ressouvenances d’H.D. petite fille, constitutifs de sa chair même de descendante d’émigrants et de pionniers : « C’était la vie dans sa plénitude, une vie qui n’était pas destinée à sécher dans la mémoire comme la mousse pressée (…) ».

Le don, c’est le legs biologique et psychologique d’Hilda Doolittle, l’héritage du père astronome, la délicatesse de la mère musicienne, les litanies, les chants bibliques, les légendes de la parentèle et les lectures de contes de fées. À ces valeurs s’ajoutent celles de l’abolitionnisme, de l’idéal de liberté et de fraternité d’une famille éduquée. L’enchantement passe par la vision, par « le regard fasciné de ces enfants américains » bouleversés par une pièce de théâtre ambulant sur l’esclavage, regard venu de « leurs ancêtres visionnaires de l’Europe centrale et leurs aïeux de l’Angleterre élisabéthaine ».

American Mother, Colum McCann, Diane Foley (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 05 Mars 2024. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, USA, Belfond

American Mother, Colum McCann, Diane Foley, Belfond, janvier 2024, trad. anglais (Irlande) Clément Baude, 197 pages, 21,90 € . Ecrivain(s): Colum McCann Edition: Belfond

C’est en octobre 2021 qu’eut lieu le procès « d’Alexanda Kotey. Ex-citoyen britannique. Ex-soldat de Daech et membre, en son sein, d’un groupe surnommé par les journaux “les Beatles”. Ex-dealer. Aujourd’hui incarcéré. Citoyen de nulle part. Un homme désormais voué à passer sa vie dans une pièce d’où l’on ne peut s’échapper ».

Alexanda Kotey est celui qui a participé à la décapitation de Jim Foley. Sa mère, Diane Foley, va assister à son procès, et Colum McCann va l’accompagner et va rendre compte dans cet ouvrage des questionnements qui vont assaillir cette mère dont l’attitude, les comportements restent exceptionnels de courage et de dignité face à la barbarie.

En effet, que ressentir face à celui qui a assassiné son fils, dans quel état sera-t-elle devant lui, autant de questions qu’elle se posera alors qu’elle a accepté la confrontation.

Robinson des improbables, Gilles Lapouge (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 01 Mars 2024. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Le Passeur

Robinson des improbables, Gilles Lapouge, textes établis et présentés par Éric Poindron, Le Passeur Éditeur, 2023, 242 pages, 15 € Edition: Le Passeur

 

« Chaque jour, j’écrivais et nous confrontions cette vie imagée. Gilles reprenait le stylo, précisait, ajoutait une anecdote et me rendait le texte. Comme une amitié à quatre mains. À la fin de cette aventure, Gilles me confia en lisant le manuscrit : “Quand tu racontes ma vie, c’est encore plus beau que si c’était ma vie”. Ce qui n’était pas très compliqué avec une telle vie » (Éric Poindron, Préface).

« À force de fréquenter mes timbres, leurs fruits, leurs oiseaux-mouches, leurs capitales, et les tampons appliqués des facteurs du Congo belge ou du Balouchistan, je m’étais confectionné un projet de carrière. Je serais exotique ».

Gilles Lapouge fit donc carrière dans l’exotisme, sa vie s’y conjugua, de Digne à Dellys et Oran en Algérie, de Marseille à Aix-en-Provence, puis de Paris à São-Paulo, et de São-Paulo à Paris, auxquels on peut ajouter mille autres destinations pour ce « voyageur étonné » et qui n’a cessé de nous surprendre et de nous étonner par ses romans et ses récits.