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Les Livres

Le Syndrome du varan, Justine Niogret (par Christelle d'hérart-Brocard)

, le Mardi, 11 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Seuil

Le Syndrome du varan, mai 2018, 220 pages, 16 € . Ecrivain(s): Justine Niogret Edition: Seuil

 

 

Ceux et celles qui sont familiers de l’univers romanesque de Justine Niogret ne manqueront pas de s’étonner à la lecture du Syndrome du varan qui, réaliste à l’extrême, tranche radicalement avec le genre de la fantasy. Ils s’accorderont aussi, sans doute, à reconnaître les indéniables qualités littéraires de l’auteure. Cela étant dit, quid de ce roman détonnant ? Car il s’agit bien là d’un récit qui se veut sinon excessivement provocant, du moins fortement dérangeant. En tout premier lieu, c’est l’écriture crue et choquante qui fait saillie dès les toutes premières pages et qui reste irrévérencieuse jusqu’à la dernière ligne. « Pute », « bite », « con », « merde », « poil de cul », « faire chier », « bordel de merde » et « esprit de chiotte » ne représentent qu’un tout petit échantillon du champ lexical coloré qui rythme et scande le récit. A cela s’ajoute, très logiquement, une syntaxe grammaticale plutôt simple, voire parfois relâchée.

Frère d’âme, David Diop (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Lundi, 10 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Afrique, Roman, Seuil, La rentrée littéraire

Frère d’âme, août 2018, 175 pages, 17 € . Ecrivain(s): David Diop Edition: Seuil

 

On l’admet maintenant après avoir minimisé ou même carrément occulté cette réalité historique : les Africains, et plus généralement tous les indigènes de l’empire colonial français, ont combattu pour la France durant les deux guerres mondiales.

David Diop, romancier sénégalais, livre dans Frère d’âme non pas un témoignage de combattants originaires de l’Afrique noire, mais le ressenti de deux tirailleurs sénégalais, Alfa Ndiaye et Mademba Diop, face à la guerre, face à leur supérieur hiérarchique, le capitaine Armand. Cette remémoration de leur condition de combattants se révèle alors loin d’être anodine, très éloignée des clichés que l’on entretenait alors couramment à propos des sujets de l’empire. Ainsi, la sauvagerie, caractéristique selon ces vues, des Africains est-elle en quelque sorte retournée à l’envoyeur :

Ajoie, précédé de Passage des ombres et de Cette âme perdue, Jean-Claude Pirotte (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 10 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Gallimard

Ajoie, précédé de Passage des ombres et de Cette âme perdue, février 2018, préface Sylvie Doizelet, 424 pages, 7,30 € . Ecrivain(s): Jean-Claude Pirotte Edition: Gallimard

« Je m’appelle Montjoie et je viens en Ajoie vous apporter la joie ». L’Ajoie est cette pointe que pousse la Suisse en territoire français, au Sud de Belfort (analogue à la pointe de Givet, dans les Ardennes). Au XVIesiècle, le prince-évêque de Bâle, chassé de la cité rhénane par la Réforme protestante, se replia vers l’Ajoie et vint s’installer dans la petite ville de Porrentruy, dont il fit la capitale de son pouvoir temporel et spirituel. Ses successeurs poursuivirent l’œuvre d’embellissement et, de nos jours, Porrentruy est une magnifique cité ancienne, veillée par le château des princes-évêques, avec de nombreux bâtiments du XVIIIesiècle, qui lui confèrent unité et harmonie. Ce fut précisément un des princes-évêques de Bâle, Simon Nicolas de Montjoie (1698-1775), qui, selon la tradition locale, prononça à son arrivée en Ajoie (1762) la formule citée plus haut. En 1793, l’Ajoie se trouva rattachée à la France et forma le département du Mont-Terrible (du nom d’une montagne proche, le Mont-Terri), avant d’être incorporée au département du Haut-Rhin, puis de revenir à la Confédération helvétique. Peu touchée par l’urbanisation, l’Ajoie offre aux rêveurs et aux hommes libres des paysages intacts, où le temps s’écoule paisiblement.

Opus Niger, Pierre Stans (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 10 Septembre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Opus Niger, PhB éditions, juin 2018, 100 pages, 10 € . Ecrivain(s): Pierre Stans

 

Ce sont presque 40 années d’écriture que ce recueil de poèmes offre au lecteur (1976-2014). Opus Niger, le titre de l’ouvrage, est également le titre de l’un des six « chapitres » qui ponctuent la publication. Lire Pierre Stans, c’est s’immerger dans une écriture que caractérisent le souci des « petits riens » et une extrême sensibilité. C’est aussi confirmer que la poésie est sans doute le dernier bastion d’une réelle écriture face à l’hégémonie du roman qui voit aujourd’hui se succéder des truismes dont le poème n’a que faire. Il ne s’agit plus de (se) raconter des histoires, mais de souligner ce que toute civilisation a mis au jour, un rapport on ne peut plus sensible au réel, qui tient du paradoxe puisque c’est l’impalpable qui se meut dans les vers, cet impalpable qui fait de nous des êtres bourrés de vibrations pour exprimer le plus intime de chacun. La « musicalité », la scansion donnent aussi au texte une épaisseur que les termes révèlent essentiellement dans ces circonstances.

Échos d’étreintes sauvages, Nasser-Edine Boucheqif (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 10 Septembre 2018. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Échos d’étreintes sauvages, Nasser-Edine Boucheqif, éditions Polyglotte, 2018, 20 €

 

Hic et nunc

Pour aborder ce gros recueil de poésie de l’écrivain et éditeur Nasser-Edine Boucheqif, il faut tout de suite évoquer la morphologie de l’ouvrage. Car, sans savoir avec précision si le livre a été écrit tous les jours d’une année bissextile, à chaque poème correspond une date du calendrier, un poème chaque jour sans exception, ce qui laisse entrevoir une remarquable ténacité – sachant qu’écrire un poème journellement durant une année civile est un tour de force. D’autre part, le cours de ces poèmes est agencé selon quatre chapitres – dépeints sous le nom de « géopoétique » – qui renvoient à chaque trimestre, et plus concrètement aux quatre saisons qui jouent sur les couleurs et les impressions du poète, ce qui me permet de considérer comme avérée mon idée d’un poème quotidien. Donc, cette poésie saisit la Loire et la nature environnante, marquées bel et bien par les éléments climatiques du pays angevin.