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Les Livres

Énigmes du seuil, Poèmes & dessins, Rio Di Maria (par Murielle Compère Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Lundi, 29 Octobre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Arts

Énigmes du seuil, Poèmes & dessins, L’Arbre à paroles, juin 2018, 148 pages, 15 € . Ecrivain(s): Rio Di Maria

 

 

« La maison » qu’habite le poète est celle du Langage, où « le poème résiste chambre de passage pour l’ailleurs ». Maison originelle, maison des mots, dont il lui a fallu / dont il lui faut franchir « le seuil » tendu vers « l’intransigeante énigme » invoquée par l’horizon, – seuil

« que nul ne pourra franchir

tant

que l’impossibilité d’être ailleurs

subsistera »

Seuil, situé dans le mouvement de flux et reflux, entre la « maison vide » et la « maison de lumière ». Naître, grandir, franchir le seuil, partir et, revenir car « revenir au foyer dilate l’horizon ».

Le chant des marées, Watson Charles (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 29 Octobre 2018. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Le chant des marées, Watson Charles, éd. Unicité, mai 2018, 90 pages, 13 €

 

 

J’ai pris le petit recueil de Watson Charles (petit en volume) comme une traversée, un voyage au milieu d’un monde animé par des oppositions. Oui, j’ai lu là une certaine poésie double, double par le mouvement vers les choses réelles, vers l’extérieur, vers la ville, vers le monde, vers autrui, et le retour de ces éléments dans l’intériorité poétique de l’ouvrage. D’ailleurs, je ne rechigne pas à préciser que j’observe souvent dans mes lectures de poésie ce qui est de l’ordre de la coupure, de la blessure intérieure et du caractère inaliénable de ce que provoque en soi cette schize. Ainsi, grâce à cette observation, j’ai décelé dans ces poèmes de Watson Charles une sorte d’apologie de la métamorphose, par exemple quand la ville se transforme en île, ou quand le monde se confond en un bateau naufragé, quand le lointain devient proche, quand l’exil devient une richesse. Et cela avec l’étude presque directe de la fonction du poète dans le monde.

Fièvre des polders, Henri Calet (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 26 Octobre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Fièvre des polders, novembre 2017, 200 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Henri Calet Edition: Gallimard

 

Troisième roman, publié la première fois en 1939, de l’auteur célébré de La Belle Lurette, des Grandes largeurs et de Le Tout sur le toutFièvre des polders est un tableau hallucinant de réalisme, planté en pleine Flandre, dans la région des polders, d’où le titre choisi par l’écrivain franco-belge, né d’un père parisien et d’une mère flamande, et qui passa son adolescence en Belgique occupée (il est né en 1904).

Ward Waterwind et sa famille, Nette, sa femme, ses enfants Odilia et Basilius, vivent de la bière que Ward fabrique, que sa femme sert à L’Ancre, estaminet parmi d’autres, dans une concurrence de tous les instants : il faut affronter ces autres cafés, Le Scaphandrier, par exemple, ou encore Le Perroquet, L’Ange, Le Transvaal…

Ward fait la tournée avec son cher cheval Jules pour servir ses clients en tonneaux, en bouteilles, ne se fait pas toujours payer, encourt bien sûr les reproches de Nette car il est plus porté à boire qu’à recueillir monnaie. Heureusement que l’estaminet lui est bien tenu par sa femme et sa fille…

Le testament de Dina, Herbjørg Wassmo (par Zoé Tisset)

Ecrit par Zoe Tisset , le Vendredi, 26 Octobre 2018. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays nordiques, Roman

Le testament de Dina, Editions Gaïa, septembre 2018, trad. norvégien Loup-Maëlle Besançon, 552 pages, 24 € . Ecrivain(s): Herbjørg Wassmo

 

Ce livre vous tient en haleine, il égaie la journée du lecteur car il sait qu’il a rendez-vous le soir avec Karna, jeune fille fragile dont la parole ou plutôt le silence et le corps sont devenus, pour une seule cérémonie, les lignes du testament de Dina sa grand-mère. Pour Karna alors, le monde de la réalité et celui onirique d’une grand-mère aventurière et féministe avant l’heure se sont confondus.

« Comment Johan, un adulte, un pasteur, avait-il pu ainsi exposer une enfant en lui demandant de confesser à l’église les crimes de sa grand-mère ? Ne comprenait-il pas qu’il y avait des limites à ce qu’une jeune personne était en mesure de supporter ? ».

Le lecteur est rapidement happé par l’histoire de cette famille aux prises avec la folie et la passion. Nous sommes dans une tragédie et chaque personnage est ancré dans une réalité qui le dépasse. Benjamin, le père de Karna, mais aussi le mari d’Anna qu’il a trahi mais qu’il aime, ne sait plus comment « réparer sa faute ».

Libres sentences, Jacques Brigaud (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 26 Octobre 2018. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Libres sentences, Jacques Brigaud, France-Libris, 2017, 112 pages, 15 €

« Qui prendrait de l’élan pour foncer dans un mur ? C’est pourtant toute l’histoire de nos vies » (p.97)

 

Depuis sa retraite, il y a presque vingt ans (nous étions collègues de Lycée), peu ou pas de nouvelles de l’ami Jacques ; et je n’en souhaitais pas, même si nous ne vivons qu’à quelques kilomètres : ses « brèves de couloirs », du temps de notre lointaine splendeur professionnelle, m’avaient (par leur constant cynisme, leur virtuose vacharderie) suffi. La drolatique vivacité de ce petit bonhomme élégant et tatillon m’avait (pour toujours, pensais-je) lassé : je ne m’imaginais pas du tout lui rouvrir bras et tempes un jour.

Et voici que ce livre (plus qu’inattendu !) dans ma boîte aux lettres change – presque – tout ! L’homme (à près de 80 ans, semble-t-il) écrit et pense donc ! Jacques est visiblement resté misogyne, misologue (un terme bien philosophique pour dire qu’il raillait la philosophie – « j’étudierai monsieur Kant dans ma prochaine vie » disait-il, sarcastique, à nos élèves communs) –, misanthrope, et homophobe. Ma mémoire peut détailler d’abord ces divers hauts-faits :