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Les Livres

Ferme du bois clair, Céline, Danemark, 1948-1951, Pierre Grouix (par Augustin Talbourdel)

Ecrit par Augustin Talbourdel , le Mardi, 09 Juillet 2019. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Biographie

Ferme du bois clair, Céline, Danemark, 1948-1951, éditions du Bourg, février 2019, 252 pages, 24 € . Ecrivain(s): Pierre Grouix

 

 

Des pans de la vie de Céline, l’âge danois est, de toute évidence, le moins exploré. « Cette absence de curiosité renvoie à une question : aimons-nous assez Céline ? » demande Pierre Grouix. Son travail sur les trois années que Céline a passées chez son avocat, Thomas Mikkelsen, à Klarskovgaard, en compagnie de Lucette et de son chat, s’apparente davantage à une méditation sur l’intimité d’un écrivain esseulé et épuisé qu’à une biographie au sens strict du terme. Grouix ne tombe pas dans le piège qui guette toute littérature secondaire sur Céline, à savoir de se livrer à une plaidoirie plus qu’à une étude littéraire. Céline n’a besoin ni de vigiles ni d’avocats, mais de lecteurs fidèles et de quelques exégètes, tel Pierre Grouix, pour guider la lecture.

Apôtres, Sur les pas des Douze, Tom Bissell (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 09 Juillet 2019. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Apôtres, Sur les pas des Douze, Tom Bissell, Albin-Michel, septembre 2018, 542 pages, 25,90 €

 

Est-il fréquent que des personnes qui, dans leur enfance, ont pratiqué les rites d’une religion avec l’innocence et le sérieux propres à cette période de la vie, s’en détachent une fois venu l’âge adulte ? Sans doute. Qu’éprouvent-elles alors vis-à-vis de la foi qu’elles ont abandonnée ? De la nostalgie ? De l’indifférence ? De la rancœur ? Ressentent-elles le besoin de régler des comptes avec cette religion qui fait partie de leur passé et de leurs souvenirs ? Peut-être. Il est toutefois rare – heureusement – qu’un règlement de comptes prenne la forme d’un volume de plus de cinq cents pages, consacré aux douze hommes inégalement célèbres regroupés sous le nom d’« apôtres ». On raconte qu’Ernst Robert Curtius, le grand romaniste allemand, aimait taquiner les ecclésiastiques qui s’aventuraient dans son séminaire, en leur demandant de lui énumérer les noms des douze apôtres. Rares étaient ceux qui parvenaient au bout de la liste.

Un étrange pays, Muriel Barbery (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Lundi, 08 Juillet 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Un étrange pays, janvier 2019, 400 pages, 22 € . Ecrivain(s): Muriel Barbery Edition: Gallimard

 

Un étrange pays fait se rencontrer le monde des hommes et le monde des elfes, tout comme Muriel Barbery s’y était aventurée avec ce qu’on peut considérer être un premier tome : La Vie des elfes. (On retrouve d’ailleurs les personnages de Maria et de Clara.) Avec un tel choix de thème, on serait trop (beaucoup trop) tenté d’en déduire que l’ouvrage ne séduira pas suffisamment le cercle des adultes auxquels il s’adresse – ce qui est évidemment plus que probable pour un certain nombre d’entre eux.

Pourtant, là se trouve justement la singularité vers laquelle nous sommes conduits avec ce roman de Muriel Barbery (comme avec le précédent) : nous devons accepter de retrouver en nous une volonté d’enchantement du monde, et ce avec le plus grand naturel, accepter de réorganiser nos concepts habituels – l’univers sur lequel la porte s’ouvre n’obéit pas à nos visions quotidiennes (et ceux qui ont le goût de sortir des sentiers battus y dénicheront une vraie source de plaisir). Au-delà de cette caractéristique fondamentale, il ne faut pas s’y tromper : la romancière ne cherche pas, via cet univers qu’elle nous propose, à nous éloigner de notre humanité.

Vies silencieuses, Daniel Kay (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 08 Juillet 2019. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Vies silencieuses, Daniel Kay, Gallimard, mai 2019, 128 pages, 14,50 €

 

Poésie de la couleur


Ce que je retiens des Vies silencieuses de Daniel Kay, c’est surtout la plasticité des images, lesquelles illustrent souvent l’univers de la peinture. Oui, c’est une apologie de la peinture italienne notamment, à quoi se livre le poète morlaisien. J’ai retenu davantage les textes en rapport avec la peinture ténébriste en fait, laquelle révèle le génie esthétique des grandes figures artistiques de la Haute Renaissance. Du reste la peinture est un art suprême du silence, et c’est sans doute là où le titre un peu énigmatique du recueil trouve son sens. C’est ce silence qui autorise la « conversation » poétique et l’exercice de la poésie elle-même.

Une boîte de nuit à Calcutta, Nicolas Idier, Makenzy Orcel (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 05 Juillet 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Robert Laffont

Une boîte de nuit à Calcutta, mai 2019, 306 pages, 20 € . Ecrivain(s): Nicolas Idier, Makenzy Orcel Edition: Robert Laffont

 

« … Calcutta m’a regardé, et j’ai baissé les yeux. Je n’aurais pas dû les baisser. J’ai vu s’allonger à même le sol cette Nouvelle jeunesse (1) qui se cherche, cherche une sortie, à travers une foule aussi compacte que les murs des palais vides, dans les ordures, le regard éteint des dieux » (Makenzy Orcel).

« … Quand un écrivain écrit, ce n’est pas seulement le monde qui entre dans son rythme, c’est la création d’un rythme du monde. Un mélange de bénédiction et de malédiction. Car il faut prendre sur nous tant de poids, traverser tant de strates de pierre sèche encombrée de mots et d’espoirs avortés… » (Nicolas Idier).

Une boîte de nuit à Calcutta est le roman épistolaire de deux écrivains, deux voyageurs, entre Pékin, Paris et Calcutta, deux amis qui se livrent et livrent ce qu’ils voient, pensent, sentent, et lisent. Deux écrivains armés d’un sismographe qu’ils maîtrisent à merveille : la littérature. Le roman est une arme qui fait voir le réel, même lorsqu’il semble s’en détourner, et Une boîte de nuit à Calcutta en est au centre.