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Les Livres

Ajours, Miron-C. Izakson (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mardi, 27 Août 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Israël

Ajours, Éditions Levant, 2019, trad. Michel Eckhard Elial, Gravure Denis Zimmermann, 58 pages . Ecrivain(s): Miron-C. Izakson

 

« Voici les choses qui retournent à notre premier corps.

Main dans la main elles s’apprennent maintenant,

nous redevenons de tendres cellules

qui n’ont pas encore décidé quel organe servir. (…)

Un cri profond,

le corps d’un homme dans celui d’une femme,

griffure et cascade de pleurs sur le front d’un enfant.

Un homme sur les épaules d’un autre homme

pour franchir ensemble le feu.

Casa Bianca, Jacques de Saint Victor (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 26 Août 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Récits, Editions des Equateurs

Casa Bianca, mai 2019, 398 pages, 23 € . Ecrivain(s): Jacques de Saint Victor Edition: Editions des Equateurs

 

Ce voyage romanesque (enfin mi-romanesque mi-récit) en Apulie profonde est sans doute l’idéale lecture d’été pour le lecteur féru de dépaysement comme de culture. Ici l’esprit, la joie de raconter, l’abord de personnages attachants, les Pouilles comme vous ne les avez jamais aussi bien perçues, l’intime relation à un « paese » profond, que l’on porte, chacune, chacun en soi : tout invite à une belle lecture, apaisée et féconde.

Jacques et Michela redécouvrent dans un beau petit patelin d’Apulie, à mi-distance de Lecce et de Tarento, un couvent en ruine qu’ils s’entêtent de restaurer, à tout prix ?

De Paris, où le couple a ses activités, Jacques est professeur d’histoire, animé de l’esprit de recherche, « républicain », aux Pouilles, c’est quitter une « terre » pour en cueillir une autre, c’est aussi affronter sa propre histoire : le Français vient en Apulie se mettre à l’ombre du passé de sa compagne : Michela a reçu de ses parents cette vieille bâtisse, et tout est à refaire, et tout est à recommencer : à l’aune de la vie.

L’Amérique fantôme Les aventuriers francophones du nouveau monde, Gilles Havard (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 26 Août 2019. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

L’Amérique fantôme Les aventuriers francophones du nouveau monde, Gilles Havard, Flammarion, août 2019, 640 pages, 26 €

 

Depuis plus de quinze ans, l’historien Gilles Havard consacre ses recherches et ses écrits à l’histoire des relations entre Européens et Amérindiens en Amérique du Nord à l’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècle). L’Amérique fantôme, son dernier livre, se situe dans la continuité des travaux historiographiques du précédent, publié en 2016 aux Indes savantes : Histoire des coureurs de bois Amérique du Nord, 1600-1840.

Ces hommes, ces coureurs de bois, d’origine européenne et bien souvent française ont chassé, commercé, découvert de nouveaux espaces, se sont mariés parfois avec des amérindiennes, ont vécu, sont morts, dans ce qu’on appelle le Pays-d’en-haut, à l’époque de la Nouvelle-France (1600-1760) ; un territoire correspondant à une immense étendue de terre située à l’ouest de la vallée du Saint-Laurent, autour des Grands Lacs. Dans L’Amérique fantôme, Gilles Havard, il s’en explique en introduction, « tente d’explorer les replis ou les impensés du phénomène colonial » sans pour autant négliger les bouleversements épidémiologiques, écologiques et politiques qui, de fait, préparèrent la conquête.

Poétique 185, Revue de théorie et d’analyse littéraires, Gérard Genette (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Lundi, 26 Août 2019. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Revues

Poétique 185, Revue de théorie et d’analyse littéraires, Gérard Genette, mai 2018, Seuil, 192 pages, 19 €

 

Alphabet genettien

Le numéro 185 de la revue Poétique est consacré à feu Gérard Genette, dont les ouvrages les plus célèbres – Figures I à VI ont marqué des générations d’étudiants et de chercheurs. Il faut savoir que Genette a établi une filiation à partir des théories des Anciens, dans Introduction à l’architexte (1979), en déconstruisant « la théorie des genres, de la division fondamentale due à Aristote (…) entre les trois genres fondamentaux (…) lyrique, épique et dramatique ». Le Genette théoricien a défini la notion de paratexte, qui s’approche étroitement des théories de la réception. Michel Charles ouvre l’hommage-débat qu’il lui consacre dans ce numéro de Poétique, en avertissant « qu’il ne s’agira pas ici de “décrypter” Genette, qui s’est largement décrypté sans notre aide ».

Ordesa, Manuel Vilas (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 23 Août 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Espagne, La rentrée littéraire

Ordesa, Editions du sous-sol, août 2019, trad. espagnol Isabelle Gugnon, 400 pages, 23 € . Ecrivain(s): Manuel Vilas

 

« Le passé est la vie déjà livrée au saint office de l’obscurité. Le passé ne part jamais, il peut toujours reparaître. Il revient, revient sans cesse. Le passé est porteur de joie. Le passé est un ouragan. Il représente tout dans l’existence des gens. Le passé est aussi porteur d’amour. Vivre obsédé par le passé ne nous permet pas de profiter du présent, et pourtant profiter du présent sans que le poids du passé chargé de désolation fasse irruption dans ce présent n’est pas un plaisir mais une aliénation. Il n’y a pas d’aliénation dans le passé ».

Ordesa est le troublant journal radical d’un espagnol d’aujourd’hui, d’un écrivain qui porte tout le passé de l’Espagne, et offre son présent turbulent. Il ne fait pas de cadeau à son époque, à son pays, à son passé, à ses contemporains et à lui-même, mais avec la manière. Pas un mot plus haut que l’autre, pas une phrase qui ne déroge aux belles règles du style, son humeur vagabonde, mais elle reste classique. Manuel Vilas a la politesse de bien écrire, et de bien rire des situations parfois ridicules où il s’aventure. Ordesa est le roman d’une vie, celui d’un enfant du siècle né durant une dictature, qui a connu la transition démocratique, Juan Carlos et son fils Felipe VI, et qui ne cesse de se souvenir de ses parents et de l’odeur des cigarettes qu’ils fumaient, comme si la crémation n’était pas autre chose qu’une dernière cigarette fumée jusqu’au filtre.