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Critiques

Mes Oncles d’Amérique, Françoise Bouillot

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 13 Janvier 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Récits, Joelle Losfeld

Mes Oncles d’Amérique, janvier 2015, 72 pages, 9 € . Ecrivain(s): Françoise Bouillot Edition: Joelle Losfeld

 

Petit récit et grand plaisir. On lit ce livre d’une traite, sans que l’intérêt ne faiblisse un instant. Deux femmes se souviennent des « oncles d’Amérique ». Et, avec eux, par eux, elles se souviennent d’une époque de leur toute jeunesse, d’un univers aujourd’hui disparu d’un New-York qu’elles ont quitté depuis pour Montmartre – et qui s’est effacé. Pas dans les mémoires. Dans la réalité et même dans le nom. Alphabet City – qui s’appelait ainsi car ses rues portaient toutes des noms de lettres – A, B, C … – est devenu East Village et la bohême est morte.

Des mondes qui disparaissent constituent le thème récurrent de ce récit. Les deux oncles connus et aimés à NY, étaient anglais et avaient quitté l’Angleterre dans des conditions aussi mystérieuses que sulfureuses. L’Angleterre s’était dissoute pour eux dans un déni farouche. Surtout de la part d’onc’ Peter, le plus rigide des deux. Ils forment un couple de vieux homosexuels à la fois drôles et teintés d’amertume.

Je suis un dragon, Martin Page (Pit Argamen)

Ecrit par Philippe Chauché , le Lundi, 12 Janvier 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Robert Laffont

Je suis un dragon, janvier 2015, 288 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Martin Page Edition: Robert Laffont

« Les deux adolescents n’en croyaient pas leurs yeux.

Margot flottait à un mètre du carrelage. Elle était partagée entre la stupeur et le sentiment de sortir de sa chrysalide et de s’épanouir enfin ».

« Durant deux années, de quatorze à seize ans, Margot consacra son temps à sauver le monde.

Un avion de ligne en perdition au-dessus de l’océan Pacifique : Margot filait dans les airs trente secondes après le début de l’alerte. Elle recueillit l’avion sur son dos et le déposa sur une piste de l’aéroport d’Hawaï ».

Je suis un dragon est le roman de la naissance et des premiers âges de la vie d’un superhéros, d’une héroïne douée d’une force inouïe, qui d’un élan déjoue toutes les catastrophes humaines et d’un geste réduit en poudre tout agresseur. Je suis un dragon, comme l’on dirait je suis un monstre ou je suis une légende, mais aussi, je suis un roman. L’aventure m’appelle et m’hypnotise. Je suis Margot, petite fille perdue aux parents assassinés, à l’avenir flétri, mais à la colère intacte et dormante, une colère qui va se réveiller et tout déclencher, tout révéler. Je suis un dragon, je suis Margot, jouet des puissances mondiales qui tiennent, là, leur arme secrète.

Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier, Patrick Modiano (2ème article)

Ecrit par Laurent Bettoni , le Lundi, 12 Janvier 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard

Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier, octobre 2014, 160 pages, 16,90 € . Ecrivain(s): Patrick Modiano Edition: Gallimard

 

Ce qu’il y a de bien, avec Patrick Modiano, c’est que, contrairement à ses personnages, les lecteurs ne sont jamais perdus dans ses livres. Normal, ironisent certains, puisqu’il écrit toujours le même. C’est toujours l’histoire d’un homme qui marche dans les rues de Paris, la nuit et par temps de brume, à la recherche de son passé, de ses parents, de ses origines. Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier n’échappe pas au dogme. Il en serait même une sorte de quintessence, avec un titre fusion de deux précédents titres, Quartier perdu et Dans le café de la jeunesse perdue.

Soit. Sauf que. Sauf qu’en vérité c’est presque toujours le même livre, mais pas tout à fait non plus le même livre, et que tout réside dans le « presque », que là que se niche l’immense talent de l’auteur, que, là, tient son univers, son œuvre. Modiano, jusqu’à présent, a toujours su apporter une nouvelle nuance à la nostalgie, donner une nouvelle dimension à la mélancolie.

L’Écriture de l’innommable, Yves-Michel Ergal

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Samedi, 10 Janvier 2015. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Editions Honoré Champion

L’Écriture de l’innommable, mai 2014, 208 pages, 40 € . Ecrivain(s): Yves-Michel Ergal Edition: Editions Honoré Champion

 

Michael Bishop proposait récemment dans Poezibao cette très belle définition de l’écriture : « Ecrire, c’est aller vers l’autre, creuser profond dans les ressources du moi pour, au cœur d’un effacement, réaliser un accès moins illusoire que symbolique, virtuellement vivable, à la face secrète de ce que l’on est, et, ainsi, la restitution précaire mais sentie d’une plénitude purement psychique, d’une beauté spirituelle que parviennent à filtrer quelques mots sur une page autrement blanche et vide ».

Seulement, écrire, ce n’est pas toujours ça. Loin s’en faut. Il y a « l’écriture de la modernité », telle que la théorise Yves-Michel Ergal. Quels sont les représentants les plus emblématiques de cette forme d’écriture ? Dickens, Balzac, Melville, Dostoïevski, ou encore Conrad, Proust, Joyce, Kafka, Beckett. Et ceci parce que ces auteurs parviennent à puiser « leur force de création dans les régions obscures de l’innommable, mettant en place une poétique de l’interdit liée à la violence, à la sexualité, à la folie, à la haine, au crime et au châtiment ».

La rage est mon énergie, John Lydon alias Johnny Rotten, Andrew Perry

Ecrit par Guy Donikian , le Samedi, 10 Janvier 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Biographie, Seuil

La rage est mon énergie, John Lydon alias Johnny Rotten, octobre 2014, traduit de l’anglais Marie-Mathilde Burdeau et Marc Saint-Upéry, 711 pages, 25 € . Ecrivain(s): Andrew Perry Edition: Seuil

 

Voila encore quelqu’un qui aura fait noircir des pages et des pages (ici plus de 700) à des fins pécuniaires ou pour affirmer de façon livresque une notoriété qui serait plutôt mal en point, diront certains. N’en déplaise aux grincheux, cet homme-là, malgré quelques carences qui lui font admirer le foot comme un supporter inconditionnel, a de quoi surprendre quand on le découvre aux antipodes de ce qu’une certaine presse laissait bêtement supposer : qu’on se le dise, le chanteur des Sex Pistols, groupe punk des années 70, ne fut pas cette bête hurlante, ornée d’épingles à nourrice comme seuls attributs distinctifs, outre les fameux tee-shirts à l’effigie de la reine quelque peu « chopperisée ».

Qu’on se souvienne, donc. Musicalement, le rock et la pop s’enlisent, à la fin des seventies, dans des discours qui traînent en longueur, donnant des plages interminables à l’instar de groupes comme Yes, qui ont cependant commis quelques titres emblématiques. Mais la tendance du moment favorisait les démonstrations techniques au détriment d’une efficacité dont se réclamaient les groupes-phare de l’époque.